Le port du burkini a été interdit dans trois villes en France, en cet été 2016. | AP

Faut-il autoriser ou non le port du « burkini » sur les plages ? En France, trois municipalités – Villeneuve-Loubet, Cannes, Sisco – ont pris des arrêtés pour interdire cette tenue de bain portée par certaines femmes de confession musulmane qui recouvre tout le corps.

D’autres pays européens se posent également la question. Ainsi, le quotidien El Pais affichait sur sa « une » mardi 16 août : « La polémique du burkini arrive sur les plages espagnoles ». D’après lui, « la récente interdiction du burkini sur les plages françaises de Cannes et Sisco a rouvert le débat sur le port du voile dans les lieux publics ».

Une trentaine de municipalités catalanes ont interdit la burqa

Le quotidien explique qu’en Espagne, une trentaine de municipalités catalanes ont voté depuis 2010 l’interdiction du port de la burqa dans les établissements publics. Mais en 2013, la Cour suprême a estimé que les municipalités n’étaient pas compétentes pour restreindre un droit aussi fondamental que la liberté religieuse.

Et en 2014, au Pays basque, le maire de Vitoria, Javier Maroto, a toutefois interdit à la baignade, dans les piscines publiques, toute personne voilée ou habillée. Ce dernier a toutefois autorisé les combinaisons en lycra. Un burkini dans cette matière peut donc être utilisé.

Sur le site d’El Pais, la journaliste et écrivaine Berna Gonzalez Harbour s’en prend aux arguments des maires français qui ont interdit le port de ce vêtement. « Si c’est un problème d’hygiène, comme le justifie si bien le maire (de Villeneuve-Loubet), il faudrait peut-être alors réfléchir à l’interdiction des maillots, des lunettes de plongée et des combinaisons thermiques pour les frileux », ironise-t-elle.

L’écrivaine revient ensuite sur les différents attentats qui ont touché la France. Mais selon elle, « l’inquiétude de la population et les précautions prises par les autorités sont des réactions compréhensibles. Mais de la précaution et des ressources nécessaires à la lutte antiterroriste, à l’intolérance irrationnelle, il y a un pas que la France ne doit pas franchir. »

« Je ne peux pas interdire à une femme de se baigner habillée »

En Italie, la Nuova di Venezia revient également sur le sujet. Pour le quotidien local, les édiles de la côte vénitienne, à l’est du pays, « ne semblent pas particulièrement troublés » par le port du burkini sur leurs plages. « Aucun n’a ainsi prévu de prendre des arrêtés », poursuit la Nuova di Venezia.

Interrogé, le maire de Jesolo, Valerio Zoggia, n’estime pas nécessaire d’intervenir sur la question. « Il n’y a pas eu encore de problème, selon lui. Je me soucie de la question de la sécurité dans son ensemble, mais je ne peux pas interdire à une femme de se baigner habillée. »

Plus au nord de l’Europe, certains médias anglo-saxons n’hésitent pas à se moquer de la polémique. Le Guardian dresse ainsi « cinq raisons de porter un burkini – et pas seulement pour embêter les Français ».

La journaliste du quotidien britannique, Remona Aly, liste ces « raisons de défier ces idioties » : « Rendre fou les médias », « économiser de la crème solaire », « diversifier la libération de la femme », « souligner le ridicule de la situation » et « célébrer la liberté ».

« Une attaque islamophobe contre les musulmans »

De son côté, la BBC prévient avec ironie que les autorités françaises « devront distinguer les nageurs en burkini et ceux en combinaison de plongée ».

La chaîne britannique a également demandé à des femmes de confession musulmane ce qu’elles pensaient de l’interdiction du port du burkini sur certaines plages françaises. Pour Aysha Ziauddin, de Norfolk, à l’est de l’Angleterre, ces arrêtés municipaux « sont une attaque islamophobe contre les musulmans ». « Le burkini me donne la liberté de nager et d’aller à la plage sans avoir l’impression de compromettre mes croyances », poursuit-elle.

Le Telegraph se montre également très virulent contre ces arrêtés municipaux. Pour le quotidien conservateur : « Les vrais ennemis de la liberté ne sont pas les femmes qui portent des burkinis, mais les politiques qui veulent les interdire. »

« Comme un régime théocratique, l’interdiction du burkini à Cannes oblige les femmes musulmanes à choisir entre leur religion et leur identité nationale, et suggère pernicieusement que leur choix du vêtement est une déclaration politique, que ce soit le cas ou non. »

« La France désigne la dernière menace pour sa sécurité : le burkini »

Enfin, la polémique sur le burkini a même traversé l’Atlantique. Dans son édition internationale, samedi, le New York Times affichait en « une » : « La France désigne la dernière menace pour sa sécurité : le burkini. »

Pour le quotidien américain, cette interdiction « peut parfois sembler étrange pour les étrangers ». Ainsi « aux Jeux olympiques de Rio, plusieurs femmes musulmanes ont participé à des épreuves avec des vêtements qui couvrent leurs cheveux et leur cou. Des maillots de bain couvrant le visage, portés par des baigneurs inquiets d’une exposition trop forte au soleil, ont également été repérés en Chine et dans d’autres endroits ».