Vinicius dans ses oeuvres, le 11 août, lors du match de handball entre le Brésil et l’Allemagne. | ROBERTO SCHMIDT / AFP

Les héritiers de Vinicius de Moraes en ont gros sur la patate. La raison de leur courroux ? Une des scènes les plus mémorables de la cérémonie d’ouverture des Jeux de Rio, vendredi 5 août. On y voit la mannequin brésilienne Gisele Bündchen marcher au milieu du stade Maracana, sur la célébrissime chanson A garota de Ipanema (La Fille d’Ipanema).

Le tube de bossa-nova le plus connu au monde, qui doit sa mélodie au compositeur Antonio Carlos « Tom » Jobim et ses paroles au poète Vinicius de Moraes, reste l’un des grands moments du début de la fête olympique version carioca.

Tom Jobim: Garota de Ipanema (com Vinicius de Moraes)
Durée : 03:38

Mais alors que le petits-fils de Tom Jobim était au piano et qu’un portrait géant était diffusé sur l’écran géant du stade, pas de référence à Vinicius de Moraes. « Nous avons été déçus. Nous étions perplexes, tristes », a confié aux journalistes Maria Gurjão de Moraes. La plus jeune fille du poetinha (petit poète), mort en 1980, avait du mal à digérer ce qu’elle estime être un manque de reconnaissance. Les héritiers sont entrés en contact avec les organisateurs de Rio 2016 pour leur faire part de leurs griefs.

Cette colère est-elle bien justifiée ? Pas sûr. Car depuis une semaine, Vinicius est partout. Là où il passe, il illumine les compétitions. Oubliez Michael Phelps et ses 23 médailles d’or – dont 5 à Rio. Oubliez Usain Bolt et ses folles enjambées vers un « triple triplé » olympique. La vraie star de ces Jeux s’appelle Vinicius. Je n’avais pas vu de mascotte aussi réjouissante depuis la vache Cooly aux championnats d’Europe d’athlétisme de Zurich, en 2014.

Il a « l’agilité du chat » et « la grâce de l’oiseau »

Avec sa tête ovale, ses jambes orange, ses mains bleues et sa queue verte, certaines mauvaises langues oseront prétendre que Vinicius ne ressemble à rien. Blasphème. Je préfère voir les choses différemment : Vinicius est unique. Un « mélange des différents animaux de la faune brésilienne », précise une page du site web des Jeux. Difficile de savoir quelles espèces ont été croisées. Heureusement, sur un autre onglet du site olympique, un rédacteur s’est laissé aller à un peu de lyrisme, et offre une description plus détaillée : « Vinicius a l’agilité du chat, il se balance comme un singe, il a la grâce d’un oiseau. Il est capable d’étirer ses bras et ses jambes aussi loin qu’il le désire, son odorat et son ouïe sont particulièrement développés. » Rien que ça.

Ah, on allait oublier l’ambitieux programme de Vinicius, qui « se donne pour mission de répandre sa joie de vivre à travers la planète, et de célébrer à chaque instant l’amitié qui naîtra entre tous les gens du monde entier ». Les mêmes vœux que ceux affichés par toute bonne Miss France qui se respecte, certes. Mais Vinicius, lui, donne de sa personne pour y parvenir.

Alors que, depuis plusieurs semaines, la jeunesse reste le nez bloqué dans ses smartphones à la recherche du moindre Pokémon, les envoyés spéciaux de Rio ne répond plus ont utilisé leurs téléphones pour trouver les meilleures images de la petite bête jaune – on ne parle pas ici de Pikachu. Et qu’a-t-on vu ? De pures merveilles visuelles. A l’image de cette vidéo prise lors du tournoi de basket-ball, et sur laquelle Vinicius fait la démonstration d’un groove incroyable. Le début d’un coup de foudre.

14 août 2016
Durée : 00:31

Lors de la compétition d’haltérophilie, c’est un bijou de basket-ball imaginaire que la géniale mascotte a offerte au public. Je vous laisse apprécier la performance :

14 août 2016
Durée : 00:15

Les petites mains des Jeux – dont Rio ne répond plus a dressé plusieurs portraits – ont besoin d’un coup de main pour faire le ménage ? Vinicius est là. Les volleyeuses américaines veulent fêter leur victoire devant le crépitement des objectifs ? Vinicius s’incruste sur la photo.

Vinicius a fait le ménage partout pendant ces Jeux. Il a juste oublié de s’occuper des eaux de la baie de Rio. | MIKE BLAKE / REUTERS

La raison de la joie des volleyeuses américaines, le 12 août ? Peut-être leur victoire contre l’Italie, mais plus probablement le fait de pouvoir figurer en photo avec Vinicius. | YVES HERMAN / REUTERS

Vinicius et ses Viniciusettes. | RICARDO MORAES / REUTERS

Teddy Riner a de la chance, Vinicius ne concourrait pas dans la même catégorie. | TORU HANAI / REUTERS

Les participants et les spectateurs des Jeux paralympiques, qui auront lieu du 7 au 18 septembre, pourront quant à eux assister au spectacle proposé par une autre mascotte, Tom, prénom choisi en hommage à Jobim.

Dernier détail au passage : Vinicius a failli se prénommer autrement. Les deux mascottes des Jeux olympiques et paralympiques auraient en effet pu s’appeler Oba et Eba, ou Tiba Tuque et Esquindim. Mais parmi les plus de 323 000 votants qui se sont prononcés sur ce sujet de la plus haute importance, 44 % ont préféré Vinicius et Tom. Les héritiers du poète peuvent leur dire obrigado.

Venir à Rio, voir Vinicius et être conquis. Voilà peut-être ce que certains de mes collègues appellent « la magie des Jeux ». Veni, vidi, Vinicius.