Image fournie par le ministère de la défense russe d’un Tu-22M3 durant des frappes sur Alep en Syrie le 16 août. | AP

Pour la première fois depuis le début de l’intervention militaire russe déclenchée il y a près d’un an, en septembre 2015, des bombardiers Tupolev-22M3 et des Soukhoï-34 ont visé des positions tenues par des djihadistes en Syrie depuis l’Iran. Cette action conjointe est sans précédent, tant du côté russe, qui n’avait jamais encore utilisé une base aérienne extérieure autre que celle dont elle dispose en Syrie, à Hmeimim, que du côté iranien où aucune puissance militaire étrangère n’avait jamais été jusqu’ici autorisée à mener des opérations militaires depuis son territoire. Alliés indéfectibles du régime syrien de Bachar Al-Assad, Moscou et Téhéran ont franchi, mardi 16 août, un pas supplémentaire dans leur coopération.

Selon le ministère russe de la défense, les bombardiers Tupolev-22M3 et Soukhoï-34 ont décollé mardi de la base de Hamedan, située dans le nord-ouest de l’Iran, pour aller frapper des cibles de l’organisation Etat islamique (EI) et du Front Fatah Al-Cham (ex-Front Al-Nosra) « dans les provinces d’Alep, de Deir ez-Zor et d’Idlib », permettant de détruire « cinq dépôts d’armes et de munitions, des camps d’entraînement à Deir ez-Zor, Sarakab [Idlib] et Al-Bab [Alep] ». Les avions russes ont également visé « trois centres de commandement » dans les régions de Jafra et Deir ez-Zor, où « un grand nombre de combattants » auraient été tués.

A Alep après les frappes russes le 16 août. | THAER MOHAMMED / AFP

Moscou et Téhéran « échangent des moyens et des infrastructures » dans le cadre de « la lutte antiterroriste », a pour sa part commenté le secrétaire du Conseil suprême de sécurité nationale iranien, Ali Shamkhani, à l’agence de presse d’Etat Irna. Ces frappes décidées avec l’aval de l’Iran avaient été précédées par la visite, lundi, du vice-ministre russe des affaires étrangères Mikhaïl Bogdanov, reçu par le chef de la diplomatie iranienne, Mohammad Javad Zarif.

Au moins 19 civils, dont 3 enfants, ont été tués dans deux quartiers rebelles d’Alep, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme, après les bombardements de mardi. En parallèle, l’ONG Human Rights Watch a accusé les aviations russe et syrienne d’avoir fait usage à plusieurs reprises de bombes « incendiaires » pour des raids « honteux » sur le nord de la Syrie.

« Tripler l’efficacité » des Tupolev

Basés à Mozdok, en Ossétie du Nord, les bombardiers à longue portée Tupolev-22M3 sont déjà intervenus en Syrie. Partis le 14 août de Stavropol, dans le Caucase russe, ils ont mené ce jour-là des frappes avant de se poser pour la première fois à Hamedan, en Iran, d’où ils ont redécollé deux jours plus tard.

Pour Konstantin Sirkov, président de l’Académie des questions géopolitiques cité par l’agence de presse RIA Novosti, l’utilisation de la base iranienne permet non seulement de réduire le temps d’intervention mais surtout de « tripler l’efficacité » des Tupolev-22M3, capables d’embarquer 22 tonnes de bombes à quelque 800 kilomètres de distance contre 5 à 8 tonnes à 3 000 kilomètres. La base syrienne de Hmeimim n’a pas la capacité de les accueillir.

Vidéo : les images des frappes aériennes russes en Syrie menées depuis l’Iran
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Mardi, le colonel américain Chris Garver, porte-parole de la coalition contre l’EI pilotée par les Etats-Unis a indiqué que Washington avait été prévenu peu de temps avant le début de ces frappes. Selon Interfax, la Russie a par ailleurs demandé l’autorisation de l’Iran et de l’Irak pour tirer des missiles de croisière au-dessus de leurs territoires à partir de la mer Caspienne. Ce qu’elle a déjà fait en octobre 2015 en tirant une salve de SS-N-30, des missiles de croisière navals équivalents aux Tomahawks américains.