LA LISTE DE NOS ENVIES

Cette semaine, le quotidien sort de l’ordinaire grâce à l’humour de B. J. Novak, qui a réécrit ses sketches pour en tirer des nouvelles pleines de fantaisie, ou au récit de Philippe Artières, qui a composé, avec des petites annonces exhumées des archives, une histoire en « miettes » de l’année 1980. Philippe Jaenada raconte, lui, l’exceptionnel, les premiers Jeux olympiques (JO) de l’histoire moderne et la victoire du marathonien grec Spiridon Louis.

NOUVELLES. « Aura-t-on assez de temps au paradis pour voir Sinatra ? », de B. J. Novak

B. J. Novak, 37 ans, est surtout connu des fans de séries télévisées, qui l’ont vu incarner le rôle de Ryan Howard dans la version américaine de « The Office ». En plus des scénarios qu’il conçoit pour la série, il écrit également des sketches qu’il joue lui-même en public, en mode stand-up. Sa méthode : tirer le meilleur jus des petits riens du quotidien, instiller une petite dose de fantastique ici, de surréalisme là, et mêler à l’affaire quelques stars d’hier et d’aujourd’hui.

Les titres de ses courtes nouvelles se suffiraient presque à eux-mêmes : « L’homme qui postait des photos de tout ce qu’il mangeait », « Le regret n’est que perfectionnisme a posteriori », « Le critique gastronomique deleuzien », « Wikipedia Brown et l’affaire de la bicyclette volée », « Johnny Depp, le destin et le car rouge à deux étages », et plus si affinités. Frédéric Potet

EQUATEURS

« Aura-t-on assez de temps au paradis pour voir Sinatra ? » (One More Thing. Stories and Others Stories), de B. J. Novak, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Pascale-Marie Deschamps, Equateurs, 350 p., 22 €.

RÉCIT. « Miettes », de Philippe Artières

Chez Philippe Artières, l’écriture a toujours maille à partir avec le document et l’ordinaire, avec ces accrochages d’écrits qui sont l’écume des jours et celle de nos vies. Dans Miettes, constitué à partir de Sandwich, supplément de petites annonces de Libération de 1979 à 1981, il tire l’archive de l’obscurité, la découpe, la redispose.

A travers ces écritures quotidiennes, c’est une époque qui ressurgit, son grain, sa couleur. Empruntant à Perec, l’historien sous-titre son ouvrage Eléments pour une histoire infra-ordinaire de l’année 1980. Quelque chose de la saveur du monde se goûte en effet dans les « miettes » que forme sa sélection de petites annonces : on y vend des canapés blancs et les séminaires de Lacan, on cherche un partenaire sexuel ou les coordonnées de Jean-Luc Leblanc « rencontré à Perrache le 13.12 qui a un frangin en Ardèche ». Néanmoins, Miettes ne documente pas que l’histoire de la presse, celle de l’écriture ou des sensibilités ; il suscite une méditation plus profonde sur notre condition historique. Julie Clarini

VERTICALES

« Miettes. Eléments pour une histoire infra-ordinaire de l’année 1980 », de Philippe Artières, Verticales, 144 p., 16 €.

RÉCIT. « Spiridon Superstar », de Philippe Jaenada

D’habitude, Philippe Jaenada raconte des histoires de chute. Sans doute parce qu’il s’agit d’une commande de la nouvelle collection «  Incipit  », où des écrivains relatent des « premières fois  », Spiridon Superstar est propulsé par un autre mouvement  : celui de la course. Il s’agit en effet de revenir sur les premiers Jeux olympiques de l’histoire moderne, à Athènes, en 1896, et plus précisément sur la victoire au marathon du Grec Spiridon Louis, un ­paysan de Maroussi.

Que les lecteurs habituels de Jaenada ne s’inquiètent pas  : l’auteur progresse à son rythme flâneur, ­s’attarde pour une digression à sa façon ou une comparaison cocasse, menant son récit tambour battant, depuis ces JO de l’innocence jusqu’à ceux de 1936, à Berlin, où l’on vit Spiridon offrir à Hitler «  un symbole de paix et d’espérance, un rameau d’olivier sauvage coupé à Olympie. Ça n’a pas servi à grand-chose  ». Raphaëlle Leyris

STEINKIS

« Spiridon Superstar », de Philippe Jaenada, illustrations de Christian de Metter, Steinkis, « Incipit », 184 p., 15 €.