Après l’affaire de la caissière licenciée par Auchan City, à Tourcoing (Nord), dans le cadre du vol par une cliente d’une boîte de sauce tomate à 0,85 euro, dont la réintégration a été annoncée par la direction le 16 août, voici l’histoire d’une assistante licenciée pour le prétendu vol du parapluie cassé d’une collègue.

Son employeur, l’Office public de l’habitat de l’Ain, dénommé « Dynacité », est allé jusque devant la Cour de cassation pour faire valider ce licenciement. Mal lui en a pris : la haute juridiction a confirmé, dans un arrêt du 13 juillet, que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse, comme l’a annoncé une dépêche de l’Agence emploi formation(AEF) du 17 août.

« Appropriation de bien d’autrui »

Il pleuvait, ce soir du 12 avril 2012, quand Brigitte (le prénom a été modifié) a quitté son bureau, au siège de Dynacité, à Bourg-en-Bresse. Dans le sas d’entrée de l’immeuble, elle trouve, posé au sol, un parapluie et l’emporte avec elle, le croyant abandonné. Celui-ci se révèle être en mauvais état et inutilisable. Arrivée chez elle, elle le jette. Ce qu’elle ne sait pas encore, c’est qu’il appartient à une collègue d’un autre site, qui s’est plainte du vol de son parapluie.

La caméra de vidéosurveillance du siège a filmé toute la scène. Peu après, la salariée reçoit une convocation à un entretien préalable au licenciement assorti d’une mise à pied pour cause d’« appropriation de bien d’autrui ». Cette sanction sera levée. Puis reposée deux jours après.

Dans un courrier à son employeur, Brigitte reconnaît les faits.

« J’ai proposé de racheter un parapluie à ma collègue », précise-t-elle.

Mais l’Office persiste et signe : Brigitte est licenciée pour faute grave, le 16 mai 2012.

« Je ne suis pas une voleuse »

Pour la cour d’appel de Lyon, selon son arrêt du 4 février 2015, « le vol est caractérisé », la « faute est avérée ». Mais est-elle suffisante pour motiver un licenciement ? Pour l’employeur, oui, « même si l’objet soustrait est de faible valeur, [ce vol] est de nature à ruiner la confiance entre les salariés et le bon fonctionnement de l’entreprise ».

Ce n’est pas l’avis de la cour d’appel, confirmé en cassation : la sanction est « disproportionnée à la faute commise. Le licenciement est privé de cause réelle et sérieuse ». Sollicité, Dynacité n’a pas voulu commenter cette décision.

Après des années pendant lesquelles Brigitte a alterné chômage et contrats précaires, cette femme, qui a deux enfants à charge, avait été embauchée en CDI par l’Office treize mois avant cette histoire. Sa colère n’est pas retombée. « Je ne suis pas une voleuse, souligne-t-elle. Cette affaire m’a bouffé cinq ans de ma vie, m’a rendue malade. Je n’ai jamais retrouvé de CDI. »