Nicolas Sarkozy en 2013 à Bruxelles. | VIRGINIA MAYO/ AP

Islam, immigration, sécurité… Nicolas Sarkozy tente de surfer sur l’actualité marquée par la menace terroriste, dans son livre Tout pour la France (Plon), à paraître mercredi 24 août, où il officialise sa candidature à la primaire à droite pour l’élection présidentielle de 2017. Si ce livre-programme de plus de 230 pages contient quelques idées nouvelles, il reprend pour une bonne part des propositions qu’il a déjà formulées.

  • Immigration : « suspendre le regroupement familial »

Convaincu que l’identité nationale « sera bien l’un des tout premiers débats de la prochaine campagne présidentielle », M. Sarkozy durcit encore un peu plus ses propositions en matière d’immigration et de lutte contre l’islam radical. Sa proposition phare consiste à « suspendre » le regroupement familial – décidé par Valéry Giscard d’Estaing en 1976 – jusqu’à l’adoption d’un nouveau traité européen. La mesure concernerait près de 20 000 personnes par an. S’il avait déjà préconisé de restreindre les conditions du regroupement familial, l’ex-chef de l’Etat n’était jamais allé aussi loin sur ce sujet.

S’engageant à « stopper » l’immigration économique pendant le prochain quinquennat, il répète sa volonté de durcir les conditions d’accès à la nationalité en faisant passer de cinq à dix ans la durée de résidence pour devenir français, ainsi qu’en réformant le droit du sol. Il plaide de nouveau pour une politique de quotas, qui verrait le gouvernement « exposer ses objectifs chiffrés d’accueil d’étrangers, catégorie par catégorie, pour l’année suivante ». Objectif : « réduire drastiquement (…) le nombre d’étrangers que nous aurons à accueillir chaque année » car, selon lui, « la grande problématique de notre politique d’immigration est d’abord celle du nombre ».

Répétant qu’un étranger devra avoir cinq ans de résidence sur le sol français pour bénéficier d’une allocation sociale, il s’engage de nouveau à supprimer l’aide médicale d’Etat, alors qu’il s’y refusait lors de la campagne de 2012.

  • Religions : interdiction du voile à l’université

Fustigeant à nouveau la « tyrannie des minorités », il redit vouloir instaurer « un nouveau pacte d’assimilation » - un concept qu’il oppose à celui d’« intégration », cher à son rival Alain Juppé - dans lequel « le nouveau venu » devrait « apprendre la langue et se confirmer au mode de vie national ». Résolu à « engager un combat déterminé contre le multiculturalisme », M. Sarkozy « refuse de prendre en compte chaque différence ».

Pour se démarquer de « l’identité heureuse », un objectif assumé par le maire de Bordeaux, il confirme vouloir la suppression des menus de substitution dans les cantines scolaires et l’interdiction du voile à l’université.

Réaffirmant sa volonté de voir émerger « un islam de France », il pointe du doigt la seconde religion la plus pratiquée en France : « ce n’est pas avec les religions que la République a aujourd’hui des difficultés, mais avec l’une d’entre elles ». Voulant permettre au Conseil français du culte musulman (CFCM) d’habiliter les imams sous le contrôle du ministère de l’intérieur, il se dit favorable à l’expulsion des imams radicaux et veut mettre fin à la pratique des imams dits « détachés » par les gouvernements étrangers pour intervenir dans les mosquées en France. Chose nouvelle : il souhaite « suspendre toute aide sociale et familiale » pour les femmes portant le voile intégral, en cas de récidive.

  • Sécurité : une cour spéciale antiterroriste

Nicolas Sarkozy, qui avait diminué les postes de policiers et de militaires pendant son quinquennat, veut aussi axer sa campagne sur « l’autorité ». M. Sarkozy propose pour la première fois de « créer une Cour de sûreté antiterroriste à l’image de la Cour de sûreté de l’Etat créée par le général de Gaulle contre l’OAS en 1963 et abrogée par François Mitterrand en 1981, à laquelle serait adossé un parquet national spécialement dédié ».

Déterminé à adapter l’Etat de droit à la menace djihadiste, il répète sa volonté de « placer dans un centre de rétention fermé ou d’assigner à résidence sous surveillance électronique, tous les individus français fichés et susceptibles de constituer une menace pour la sécurité nationale ». Autres propositions : expulser tout suspect étranger, ainsi que « pérenniser les possibilités de perquisitions administratives ». Il préconise aussi l’expulsion du territoire des étrangers condamnés à une peine d’emprisonnement de plus de cinq ans, à l’issue de leur détention.

  • Justice : des peines planchers exponentielles

En matière de justice, M. Sarkozy ne se contente pas de promettre le rétablissement des peines planchers. Pour la première fois, il propose de créer des peines planchers dont les risques encourus seraient « exponentiels » : « Après trois condamnations pour des crimes et des délits, le quantum de la peine sera automatiquement majoré de 25 % (…) pour la quatrième. Après cinq condamnations de 50 %. Et après dix condamnations de 100 %. »

Autre idée nouvelle : confier au parquet l’application des peines pour en faire « le bras armé de la politique pénale du gouvernement ». Comme lors de ses campagnes de 2007 et 2012, il répète également sa volonté d’abaisser la majorité pénale à 16 ans au lieu de 18.

S’engageant à construire 20 000 nouvelles places en prison, il veut rétablir les jurés populaires au sein des tribunaux correctionnels.

  • Travail : retraite à 64 ans et « heures sup » défiscalisées

Le candidat Sarkozy, qui remet la valeur travail au cœur de son projet, réhabilite son « travailler plus pour gagner plus ». Il confirme sa volonté de rétablir les heures supplémentaires défiscalisées et de laisser le choix aux entreprises qui le souhaiteraient de s’affranchir des 35 heures, à la condition de rémunérer le temps de travail supplémentaire.

Sur les retraites, il réitère son objectif de reporter l’âge légal de départ à 63 ans en 2020 et à 64 ans en 2025, plaide pour la suppression des régimes spéciaux et pour que les règles de calcul de la retraite dans la fonction publique soient alignées sur le régime général.

Concernant la fonction publique, il réaffirme son souhait de supprimer 300 000 postes de fonctionnaires en promettant une augmentation de la durée de travail à 37 heures payées 37 dans la fonction publique d’Etat.

  • Fiscalité : suppression de l’ISF

Evoquant la dégressivité des allocations-chômage au bout d’un an, il s’engage à une « suppression immédiate » de l’impôt sur la fortune (ISF) et à « une baisse immédiate, dès juillet 2017, de 10 % de l’impôt sur le revenu ». Une mesure dénoncée par Alain Juppé et François Fillon, au motif qu’elle ferait exploser les déficits.

Les seules nouvelles propositions concernent la fiscalité : « la transmission d’entreprise fera l’objet d’une exonération de 85 %, voire d’une exonération totale, si l’activité est maintenue pendant cinq ans au minimum, avec le maintien de la majorité des emplois correspondants ». S’il propose à nouveau une « exonération totale des charges au niveau du SMIC, qui diminuerait pour s’annuler progressivement à 1,6 SMIC », il s’engage pour la première fois à coupler cette mesure au Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) sous réserve de doubler le montant des sommes dédiées à ce dispositif mis en place par François Hollande.

« Il s’agira donc de pas moins de 34 milliards d’euros », précise-t-il. Autre nouvelle mesure : défiscaliser 50 % de l’argent investi dans une start-up. L’ex-chef de l’Etat confirme par ailleurs son souhait de supprimer toutes les charges sur les emplois à domicile.

  • Europe, écologie, éducation…

Il répète par ailleurs sa volonté de « reprendre l’investissement dans la filière nucléaire », sans fermer la centrale de Fessenheim (Haut-Rhin), et de remplacer le principe de précaution par celui de la responsabilité. Sans interdire les recherches sur le gaz de schiste.

En matière sociale, il propose de nouveau de mettre fin « dès l’été 2017 » au « monopole » des syndicats lors des élections professionnelles. « Les candidatures seront libres comme il se doit dans une démocratie digne de ce nom », juge-t-il au sujet de cette idée déjà défendue par plusieurs candidats à la primaire, notamment Bruno Le Maire et François Fillon.

Sur l’éducation, il redit vouloir revenir sur la réforme des collèges et sur celle des rythmes scolaires, en instaurant l’autonomie des établissements scolaires et des primes au mérite pour les enseignants.

Quant à l’Europe, il n’exclut pas l’organisation d’un référendum, comme l’a proposé Bruno Le Maire et réitère sa volonté de refonder l’Europe, en instaurant un « Schengen 2 » sur les frontières.

Il redit enfin vouloir organiser un référendum le jour du second tour des élections législatives, en juin 2017, pour dans le même temps faire approuver la suppression de la loi sur le non-cumul des mandats et faire valider la baisse du nombre de parlementaires à l’horizon 2022.