Une affiche de la série « Mr Robot ». | USA Networks

Il est 15 h 12, la torpeur du bureau au mois d’août combinée à la digestion du déjeuner commence à faire son œuvre, les paupières tendent à s’alourdir… Gling ! Un sursaut. Sauvés par la notification – le gong à l’ère numérique. Un nouveau message vient d’apparaître sur notre téléphone. C’est Darlene ! Rush d’adrénaline, concentration immédiate. Des heures que l’on attendait ce message que l’on s’empresse de découvrir.

Non, Darlene n’est pas la fille que l’on dragouille en ce moment. Et pour cause : Darlene n’existe pas. C’est un des personnages principaux de l’excellente série américaine Mr. Robot, consacrée à l’histoire d’un hackeur, dont France 2 devrait diffuser la première saison dans les mois à venir. Une série qui vient de faire l’objet d’une adaptation en jeu vidéo, Mr. Robot : 1.51exfiltratiOn, sorti mercredi 17 août sur Android et iOS.

Ici, pas de graphismes en 3D, de cinématiques issues de la série ni même d’un style 8-bits rétro. A la place, une interface simplissime mimant celle d’un téléphone mobile opéré par E-Corp, le géant de l’informatique de la série : contacts, messages, pièces jointes, notifications et paramètres. Pas de personnage à manipuler donc, mais des textos à envoyer.

L’interface du jeu « Robot:1.51exfiltrati0n » mime celle d’un smartphone. | Night School

L’an dernier, Lifeline avait mis sur le devant de la scène ce type de jeu narratif : le joueur communiquait par messages écrits avec un astronaute perdu sur une lune, et devait l’aider à s’en sortir. Le jeu Mr. Robot pousse le concept plus loin en multipliant les interlocuteurs, parfois simultanément, tous dotés d’une forte personnalité habilement retranscrite sous forme de textos.

Faire chanter un inconnu

Vous jouez votre propre rôle. Ce téléphone virtuel, vous l’avez trouvé dans la rue, et les SMS envoyés à son ancien propriétaire s’enchaînent – tous en anglais, le jeu n’est pas encore traduit en français. Tout y passe. Un groupe de potes qui réfléchissent à un cadeau d’anniversaire en s’envoyant des vannes. Des spams publicitaires qui pourrissent le fil des notifications. Quelques messages plus ou moins graveleux issus de sites de rencontres.

Et puis il y a ceux de Darlene, la propriétaire du téléphone, ainsi que d’un certain « E », qui vont vous embarquer, texto après texto, dans leurs magouilles de pirates informatiques révolutionnaires. Récupérer les identifiants informatiques d’une salariée d’une grande entreprise. Faire chanter un inconnu pour s’infiltrer dans le réseau de sa société…

On attend chaque nouvel échange avec fébrilité, et le studio Night School, à l’origine du jeu, a parfaitement su retranscrire l’authenticité des échanges de textos et la personnalité des protagonistes. Le jeu se tait pendant parfois de longues heures, avant une nouvelle notification. On scrute avec impatience les trois petits points animés annonçant que notre interlocuteur est en train de rédiger un message. On se surprend à balayer d’un « swipe » un message d’un ami – un vrai – pour poursuivre la conversation avec nos camarades imaginaires de Mr. Robot.

Etrangement, l’absence d’images et le fait de communiquer avec eux de façon si banale tend à rendre ces personnages plus crédibles et présents que s’ils avaient été incarnés à la manière d’un jeu vidéo plus classique. Mais il est parfois frustrant de ne pas pouvoir répondre absolument ce que l’on veut, certaines des propositions imposées par le jeu se montrant peu satisfaisantes ou réalistes.

Pas une ligne de code

Loin de prétendre nous initier à la programmation informatique, le jeu a ses vertus pédagogiques et montre comment, parfois, le piratage ne nécessite pas une ligne de code : le « social engineering », ou « ingénierie sociale », consiste à manipuler des personnes pour obtenir des informations confidentielles comme des mots de passe. En endossant les habits du pirate, et en se confrontant à ses obstacles, on apprend aussi dans une certaine mesure à s’en prémunir dans la vraie vie.

Palpitant, Mr. Robot : 1.51exfiltratiOn nous tient en haleine et infiltre notre vie une semaine durant. C’est à peu près la durée du jeu, mais celle-ci peut être raccourcie ou allongée selon les choix du joueur… Mais aussi selon les bugs de l’application ! La frustration de ne plus voir aucun message apparaître pendant plus de 24 heures après ce qu’on croit être une erreur ou un mauvais choix de notre part n’a rien d’un game over : c’est une erreur des développeurs, réparée sur Android, mais pas encore sur iOS.

En bref

On a aimé :

  • L’excitation à l’arrivée de chaque nouveau texto
  • La personnalité des protagonistes
  • L’interface minimaliste et efficace

On a moins aimé :

  • Le scénario parfois un peu tiré par les cheveux
  • La durée de jeu un peu trop courte
  • Le bug qui nous fait languir de longues journées

C’est pour vous si :

  • Vous aimez les dilemmes éthiques
  • Vous êtes accro à Mr. Robot et vous n’avez plus aucun épisode à vous mettre sous la dent
  • Vous parlez la langue de Shakespeare

Ce n’est pas pour vous si :

  • Vous êtes du genre impatient
  • Vous pensez que les pirates informatiques travaillent dans le noir avec une capuche et un masque Anonymous
  • Vous n’êtes pas allés plus loin que le cours « Brian is in the kitchen »

La note de Pixels :
36 profils piratés sur 42