En 2004, une Australienne d’origine libanaise, Aheda Zanetti, invente le « burkini » et dépose le nom. | SAEED KHAN / AFP

Stop ou encore ? Le Conseil d’Etat a invalidé, vendredi 26 août, l’arrêté municipal de Villeneuve-Loubet (Alpes-Maritimes) qui interdisait les vêtements religieux ostentatoires à la plage, visant en premier lieu le « burkini ». Retour sur les dates clés d’une polémique qui a occupé une bonne partie de l’actualité politique au cœur du mois d’août et pourrait continuer de rebondir, malgré cette décision de la haute juridiction.

2004. Aheda Zanetti, une Australienne d’origine libanaise, invente le « burkini ». Elle explique au Monde avoir voulu proposer une tenue qui permette aux femmes de se baigner en respectant la pudeur religieuse. Les marques Burkini et Burqini sont déposées dans la foulée en Australie et dans plusieurs pays.

2004-2015. De premières polémiques éclatent en France autour de l’autorisation du burkini ou non, comme à Emerainville (Seine-et-Marne), en 2009, ou à Douai (Nord), en 2011. D’autres débats du même type apparaissent à l’étranger, de Constance (Allemagne) en 2014 à Charleroi (Belgique) en 2015, mais toutes ces controverses restent très localisées et la tenue de bain fait, dans l’ensemble, peu de vagues.

30 mars 2016. Alors que plusieurs polémiques éclatent à l’étranger à propos d’enseignes proposant des articles de « mode islamique », la ministre du droit des femmes, Laurence Rossignol, prend position contre ce phénomène dans une interview sur RMC. Le burkini n’est pas visé en tant que tel.

24 juin. Une femme porte plainte à Aurillac (Cantal) parce qu’on l’empêche de se baigner en burkini dans le centre aquatique de la ville, rapporte la presse locale.

Août : controverses en séries en France

5 août. La classe politique française s’empare du sujet à la faveur d’une polémique dans les Bouches-du-Rhône. Une association voulait louer le parc aquatique Speedwater Park des Pennes-Mirabeau sur une journée en septembre. Une réunion pour laquelle l’association avait demandé à ce que la baignade en burkini ou « jilbab de bain » soit autorisée. Bien qu’autorisé en principe par la loi, cet événement suscite une vive opposition de la mairie et de responsables politiques de droite et d’extrême droite. La journée est finalement annulée, annonce le parc le 9 août.

11 août. Un arrêté interdisant le port de vêtements religieux sur les plages de la ville de Cannes (Alpes-Maritimes) relance la polémique. Le texte, qui vise implicitement le burkini, a été publié le 28 juillet, mais c’est bien dans ce contexte qu’il attire l’attention au niveau national. Des dizaines de villes du nord et du sud de la France prennent des arrêtés similaires dans la foulée. Le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) et la Ligue des droits de l’homme (LDH) prennent position contre ces mesures et déposent des recours.

13 août. Une rixe sur une plage de Sisco, en Corse, est attribuée à une dispute sur le port d’un burkini. Le maire prend un arrêté interdisant la tenue. Il est finalement apparu dans l’enquête que la tenue de bain avait été évoquée à tort.

17 août. Manuel Valls apporte son soutien aux maires qui interdisent le burkini dans une interview à La Provence.

23 août. Des photographies de policiers niçois verbalisant une femme portant un voile sur la plage de Nice au nom de l’arrêté « anti-burkini » choquent en France et à l’étranger.

Bestimage

25 août. Le débat continue de diviser la classe politique, jusqu’au sein du gouvernement. Deux ministres, Najat Vallaud-Belkacem et Marisol Touraine, critiquent les arrêtés « anti-burkini », tandis que Manuel Valls réaffirme son soutien aux maires concernés.

26 août. Le Conseil d’Etat a décidé de suspendre l’arrêté municipal pris à Villeneuve-Loubet, qui visait implicitement le port du burkini. Les juges ont notamment estimé que dans cette commune « aucun élément ne permet de retenir que des risques de trouble à l’ordre public aient résulté de la tenue adoptée en vue de la baignade par certaines personnes. En l’absence de tels risques, le maire ne pouvait prendre une mesure interdisant l’accès à la plage et la baignade ».

Dans les trente autres communes ayant pris des arrêtés similaires, les arrêtés municipaux sont toujours en vigueur jusqu’à ce qu’ils soient contestés en justice. La décision du Conseil d’Etat concernant l’arrêté de Villeneuve-Loubet se veut un arrêt de principe. Il permet d’affirmer que, en cas de recours, les autres arrêtés seront eux aussi cassés par la plus haute juridiction administrative française.