De gauche à droite : Margarita Louis-Dreyfus, le maire de Marseille, Jean-Claude Gaudin, et l’entrepreneur américain Frank McCourt. | BERTRAND LANGLOIS / AFP

« Droite au Boute ! » La prononciation de la devise de l’Olympique de Marseille – « Droit au but » – n’est pas encore parfaite, mais l’homme d’affaires américain Frank McCourt, qui vient d’engager une négociation exclusive avec Margarita Louis-Dreyfus pour acquérir le club de Ligue 1 de football, a passé avec brio, lundi 29 août, son premier examen sur le Vieux-Port. Le futur patron de l’OM, âgé de 63 ans, a annoncé son intention de bâtir « une équipe qui, année après année, concourra pour remporter le championnat de France », premier objectif d’un ambitieux plan de développement du club marseillais baptisé – en version anglophone – « OM champion project ».

Mme Louis-Dreyfus, propriétaire très chahutée de l’OM, est venue en personne présenter au maire de Marseille, Jean-Claude Gaudin (LR), celui qu’elle et son aréopage d’avocats ont choisi pour lui succéder à la tête de l’OM. Une visite impromptue, annoncée le matin même à M. Gaudin par un simple appel téléphonique. Un règlement express d’un long feuilleton médiatique ouvert le 13 avril. Ce jour-là, à bout d’envie et lassée de devoir investir pour équilibrer le budget de l’OM, Mme Louis-Dreyfus avait annoncé la mise en vente officielle du club. Un mythe du football français acquis vingt ans plus tôt pour un euro symbolique par son époux, Robert Louis-Dreyfus, mort en 2009.

« C’est une journée triste pour moi et pour mes fils », a dit, lundi 29 août, dans un de ses rares face-à-face avec la presse, la présidente du groupe Louis-Dreyfus, 171e fortune mondiale – entre 6 et 7 milliards d’euros, selon le magazine Forbes –, ajoutant que sa famille garderait « 5 % des actions de l’OM au terme de la vente ». « Cela nous permettra de vérifier que tout se passe bien », complétait Kyril Louis-Dreyfus, le plus passionné par l’OM des fils, qui, lundi, accompagnait sa mère, l’air déjà nostalgique.

Ni l’acheteur ni le vendeur n’ont voulu préciser les bases financières de leur négociation. « Il y a un processus qui est en cours et nous devons le respecter, a justifié Frank McCourt. Il nous mènera à la vente de l’OM dans quelques semaines. » « Les deux parties souhaitent finaliser la transaction d’ici la fin de l’année, après la consultation du comité d’entreprise de l’Olympique de Marseille », dit le communiqué diffusé par l’OM. Ces derniers mois, le prix du club marseillais a été estimé à des tarifs très différents, dans une fourchette oscillant entre 50 millions et 100 millions d’euros.

« On ne possède pas un club comme Marseille »

Conscient qu’il ne rachète pas n’importe quelle équipe et soucieux de ne pas vivre à son tour l’impopularité de Mme Louis-Dreyfus, l’homme d’affaires a toutefois préparé un discours parfaitement calibré pour une ville avide de bonnes nouvelles. Alors que l’OM est actuellement onzième du championnat de Ligue 1 (un nul, une défaite, une victoire en trois matchs) et que les supporteurs marseillais restent plombés par la piteuse treizième place de la saison dernière, M. McCourt a affiché toute son ambition. Accompagné dans le bureau du maire de Marseille par l’un de ses « poissons pilotes » français, Jacques-Henri Eyraud, propriétaire du journal Paris Turf, qui s’est chargé de la traduction, l’Américain a brossé le fan olympien dans le bon sens. « C’est un jour heureux pour ma famille et moi », a assuré le promoteur immobilier et ancien propriétaire de la franchise de base-ball des Dodgers de Los Angeles (2004-2012).

« Je sais qu’on ne possède pas un club comme Marseille. Il y a beaucoup de parties prenantes à l’OM – les supporteurs, la ville, le staff technique, les collaborateurs… – et, en tant que serviteur de ce club, je compte les représenter », a assuré M. McCourt. L’investisseur américain a ensuite décliné son plan « OM champion project » en quatre points : « Bâtir une équipe qui joue le titre de champion de France chaque année » ; « créer la meilleure expérience pour les supporteurs en Ligue 1 » ; « être un modèle au sein de sa communauté et de sa ville » ; et, enfin, « bâtir une organisation solide et pérenne sur le terrain comme en dehors du terrain ». Un discours que M. McCourt n’a pas accompagné de chiffres et qui rappellera sûrement aux plus vieux supporteurs de l’OM, celui de Robert Louis-Dreyfus à son arrivée au club.

Ravi de voir enfin ce dossier épineux évoluer dans un sens positif, Jean-Claude Gaudin s’est dit ravi que le futur propriétaire du club soit « un chef d’entreprise et non un de ces fonds de pension américain, chinois ou je ne sais quoi ». Le maire de Marseille a toutefois conclu en transmettant à Frank McCourt le fond de la pensée des Marseillais aujourd’hui : « Et maintenant, il faut gagner ! »

En attendant l’arrivée effective de son nouveau patron et de potentielles arrivées de joueurs lors du mercato de décembre, l’OM devra toutefois faire avec l’équipe dirigeante et l’effectif en place.