L’EpiPen, du laboratoire Mylan, contient de l’adrénaline auto-injectable utilisé comme traitement de réactions allergiques aigües afin d’éviter un choc anaphylactique. | Rich Pedroncelli / AP

La hausse est spectaculaire. Entre 2007 et 2016, le prix de l’EpiPen, un traitement populaire d’urgence face aux chocs allergiques, est passé de 100 dollars (89,75 euros) à plus de 600 dollars (538,20 euros).

L’EpiPen est utilisé dans le cas d’allergies sévères, notamment pour les enfants, et jouit d’un quasi-monopole aux Etats-Unis. Son prix est devenu rédhibitoire pour de nombreux patients, qui ont décidé de se mobiliser.

Une pétition sur le site MoveOn.org appelant le fabricant, le laboratoire Mylan, à annuler la « hausse immorale du prix » du traitement, a déjà récolté plus de 286 000 signatures. Même l’Association médicale américaine (AMA) a appelé le laboratoire à abaisser ses tarifs :

« L’AMA demande depuis longtemps à l’industrie pharmaceutique de rester raisonnable concernant le prix des médicaments, et, avec des vies en jeu, nous appelons le fabricant à faire tout ce qu’il peut pour limiter ces coûts exorbitants. »

Le laboratoire fait un geste, sans convaincre

Face au tollé, le laboratoire Mylan a pris des premières mesures, jeudi 25 août, pour rendre ce médicament plus abordable. Il a annoncé qu’il allait distribuer des cartes de paiement permettant de couvrir environ 50 % du prix de l’EpiPen, vendu par paquets de deux. Mais l’initiative n’a pas convaincu les élus et les personnalités politiques.

Le laboratoire Mylan est un donateur de la Fondation Clinton, à laquelle il a versé entre 100 000 et 250 000 dollars. Hillary Clinton, candidate démocrate à la présidentielle, n’en a pas moins condamné ses pratiques tarifaires : « De l’EpiPen peut sauver des vies. Il n’y a aucune justification à ces hausses de prix », a-t-elle personnellement écrit sur Twitter. « C’est scandaleux, et ce n’est que le dernier exemple troublant en date d’une entreprise qui profite de ses clients », a-t-elle ajouté dans un communiqué sur Facebook.

Pour le sénateur républicain Chuck Grassley, l’annonce de Mylan jeudi « ne change pas le prix du produit ». Il a noté que les bénéficiaires des programmes d’assurance-maladie Medicare (pour les plus âgés) et Medicaid (pour les plus démunis), ainsi que les patients ne bénéficiant pas de la carte de rabais proposée par le laboratoire, devaient payer plein tarif.

« Il est temps de changer les règles du jeu et d’introduire de la concurrence », a plaidé la sénatrice démocrate Amy Klobuchar. Elle a demandé à la commission fédérale de la concurrence américaine (FTC) d’enquêter sur ces hausses de prix. L’élue a souligné que les dix médicaments sur ordonnance les plus répandus aux Etats-Unis avaient tous connu de fortes augmentations de prix.

Le débat sur le prix des médicaments fait rage depuis plusieurs mois aux Etats-Unis, et plusieurs auditions ont déjà été organisées au Congrès sur ce thème. Hillary Clinton a dit qu’elle entendait mettre en place une législation sur la question si elle était élue.

Un générique d’EpiPen, moins cher

La polémique persistant, le laboratoire a annoncé, lundi 29 août, le lancement d’un générique dans un délai de « plusieurs semaines », au prix de 300 dollars (269 euros) au lieu de 600 dollars. Une démarche tout à fait inhabituelle, sachant que l’EpiPen est toujours sous brevet et qu’aucun traitement concurrent n’a reçu l’approbation des autorités sanitaires.

La directrice générale du groupe, Heather Brech, s’est défendue en expliquant que Mylan avait consacré des centaines de millions de dollars à l’amélioration de l’EpiPen depuis qu’il l’a racheté en 2007 à l’allemand Merck KGaA. « Notre décision de lancer une alternative générique à l’EpiPen est une réponse commerciale exceptionnelle. Nous avons décidé que la meilleure solution était de contourner le système des marques et de proposer une alternative. » Le laboratoire, établi aux Pays-Bas, a ajouté qu’il continuerait à promouvoir et à vendre la marque EpiPen.

Ce traitement n’est pas le seul à avoir vu son prix s’envoler. Les laboratoires Turing ont ainsi augmenté, il y a un an, de quelque 5 000 % le prix d’un médicament, le Daraprim, utilisé contre le paludisme et des co-infections du sida.