Des élèves allemands participent à un examen d’une femme enceinte à Halle, en 2013. | WALTRAUD GRUBITZSCH / AFP

La justice allemande pourra désormais demander aux mères de révéler le nom de leur amant lorsque leur conjoint conteste sa paternité, affirme un projet de loi approuvé mercredi 31 août en conseil des ministres. Pour le gouvernement, l’enjeu relève de la « sécurité juridique » : il s’agit de permettre au « faux père » de réclamer au père biologique les frais engagés pour élever un enfant né d’une relation extraconjugale.

Une telle possibilité « empiète profondément sur les droits de la personne », a déploré Katja Keul, spécialiste des questions juridiques au sein des Verts allemands, alors que le texte n’a suscité aucun débat au sein de la coalition entre conservateurs et sociaux-démocrates au pouvoir.

Le futur article 1607 du Code civil prévoit « d’obliger » la mère à communiquer « au tiers qui a assuré en tant que père la subsistance de l’enfant » le nom de son ou de ses amants « pendant la période de conception ». L’objectif est de pouvoir ensuite se retourner vers le père biologique pour exiger de lui le remboursement des frais engagés pour l’enfant, sur une période limitée à deux ans.

Des situations « intolérables pour la mère »

Le texte soumis au Parlement prévoit toutefois une exception si la révélation du père biologique s’avère « intolérable pour la mère », une situation que les tribunaux devront apprécier au cas par cas. Parmi les exemples évoqués figurent ceux d’enfants issus d’un inceste, d’un viol par un proche, ou les cas où le conjoint avait décidé d’assumer sa paternité même en la sachant fictive.

Le projet de loi ne prévoit pas de sanction si la mère refuse de répondre, laissant ce soin aux tribunaux. L’exposé des motifs donne pour seul exemple la possibilité de contraindre la mère à dédommager le « faux père », « lésé dans son intérêt financier ».

A l’origine de ce texte, une décision de la Cour constitutionnelle, rendue le 24 février 2015, qui estimait qu’exiger d’une femme le nom de son amant outrepassait le rôle des tribunaux. La cour de Karlsruhe n’écartait pas totalement cette possibilité mais affirmait la nécessité d’une loi pour concilier « le droit au recours » du conjoint trompé et le droit de la mère « au respect de sa vie privée ».

Aucune évaluation officielle n’existe concernant le nombre d’enfants adultérins. Selon les études sur le sujet, les estimations vont de 4 à 10 % des naissances.