La première économie d’Afrique se porte mal. Le Nigeria est entré en récession mercredi 31 août, après deux trimestres consécutifs de croissance négative marqués par des attaques sur ses installations pétrolières, la chute des cours de l’or noir, une inflation galopante et des taux d’investissements étrangers historiquement bas. « Au deuxième trimestre, le PIB a décliné de 2,06 % (sur un an) » après une baisse de 0,36 % au premier trimestre, selon les chiffres du Bureau national des Statistiques (NBS) dévoilés mercredi.

Le ralentissement de la croissance touche de nombreux secteurs, indiquant que le pays souffre de problèmes bien plus importants que la seule baisse du prix du baril du pétrole, en dépit de la forte dépendance de l’économie nigériane aux hydrocarbures.

« L’avenir est vraiment, vraiment sombre », estime John Ashbourne, économiste pour la société de recherche Capital Economics. Le gouvernement nigérian, lui, se veut confiant. « La seconde moitié de l’année 2016 sera bien meilleure que la première », a rassuré Adeyemi Dipeolu, conseiller économique pour la présidence. « Les dépenses d’investissement commencent à montrer des résultats (…) et le taux de croissance du Nigeria a de grandes chances de remonter », a-t-il asséné.

Les prédictions internationales sont moins encourageantes : le PIB du Nigeria pourrait se contracter de 1,8 % cette année, selon le Fonds monétaire international.

  • Chute des investissements étrangers de 75 %

Les investisseurs étrangers, méfiants après la décision du gouvernement de maintenir le naira à un taux artificiel, ne sont pas revenus investir après sa dévaluation en juin dernier. Le pays enregistre un taux « historiquement » bas d’importation de capitaux, rapporte le NBS.

Les 647,1 millions de dollars investis au Nigeria au second trimestre, représentent une « chute de 75,73 % » par rapport à la même période en 2015. « S’il est confirmé, ce chiffre provisoire serait le plus bas enregistré (…) et représenterait aussi la plus grosse chute de capitaux d’une année à l’autre », écrit l’agence des statistiques.

« Le Nigeria est très dépendant des investissements étrangers pour améliorer ses infrastructures et remettre l’économie sur ses rails, remarque John Ashbourne, il y a besoin de restaurer la confiance. »

  • Une politique monétaire floue

Le président nigérian Muhammadu Buhari, à Nairobi, au Kenya, le 28 août 2016. | SIMON MAINA / AFP

Le président Muhammadu Buhari a finalement décidé de laisser flotter le naira en juin, après l’avoir artificiellement maintenu à taux fixe pour maintenir des prix bas et éviter une trop grande inflation. Mais son administration a tardé à mettre en place cette politique monétaire que tous les experts encourageaient depuis des mois, ce qui n’a pas rassuré les investisseurs alors que l’inflation dépassait les 17 % en juillet.

« Les investisseurs ont besoin de voir les directions que va prendre Buhari. Pour l’instant, ils sentent que les décisions qu’il a prises jusqu’à présent ne fonctionnent pas », explique M. Ashbourne.

  • Les sabotages menacent le secteur pétrolier

D’autre part, le secteur pétrolier, duquel le Nigeria tire l’essentiel de ses revenus depuis 50 ans, est toujours sous la menace des sabotages et des attaques des groupes armés dans le Delta du Niger. Fin août, le ministre du pétrole a déclaré que 1 600 pipelines avaient été sabotés depuis janvier.

La production de pétrole a diminué de 21,5 % par rapport au mois de janvier, selon les chiffres de l’OPEP pour juillet et le Nigeria a perdu sa place de premier exportateur de pétrole d’Afrique.