L’arrivée du président François Hollande au sommet du G20, le 4 septembre à Hangzhou. | POOL / REUTERS

Et si, réellement, ça allait mieux ? Il ne s’agit pas ici de billevesées autoréalisatrices mais d’un bilan dressé, lundi 5 septembre, par l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), du quinquennat de François Hollande. Pour l’institut de recherche, plutôt classé au centre gauche, « force est de constater que la France montre des signes de reprise depuis quelques mois, malgré un taux de chômage élevé et des finances publiques retrouvant péniblement le chemin de l’équilibre ».

A moins d’un an de l’élection présidentielle, alors que les candidatures aux primaires se multiplient dans les deux camps, cet état des lieux est probablement le premier d’une longue liste. Avec, à la clé, une question centrale : le président Hollande a-t-il tenu ses promesses ? Est-il légitime pour briguer un second mandat ? Si nombre d’économistes planchent encore sur le sujet, les politiques ont déjà commencé à tirer leurs conclusions. « Si l’on veut réussir, on ne peut pas faire les choses à moitié et, malheureusement, on a fait beaucoup de choses à moitié ! », blâmait ainsi, à propos de son passage au gouvernement, l’ex-ministre de l’économie Emmanuel Macron, qui a démissionné mardi 30 août, dans le Journal du Dimanche du 4 septembre.

« Un redressement coûteux mais réel »

Le bilan que l’OFCE établit, lui, est plutôt positif mais très contrasté. « Un redressement coûteux mais réel », résume l’institut dans sa note. Certes, le quinquennat s’est ouvert « dans un contexte économique des plus défavorables : chômage en hausse, finances publiques dégradées, croissance en berne et crise européenne ». Toutefois, si la croissance française a été plutôt meilleure que celle de ses voisins entre 2008 et 2012, elle s’est depuis, jusqu’à la mi-2015, laissée distancer par l’Allemagne et rattraper par la zone euro. Pour l’OFCE, « ce résultat est en grande partie l’effet des transferts fiscaux des ménages vers les entreprises qui ont freiné la croissance à court terme ».

La seconde partie du quinquennat marque un début de redressement « grâce aux premiers effets positifs des politiques d’offre et à l’allégement de la consolidation budgétaire ». La consolidation budgétaire engagée à partir de 2012 pour rétablir les finances publiques a, en effet, eu un impact négatif sur la croissance de 0,8 point par an en moyenne. En revanche, le contre-choc pétrolier et les premiers effets du Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) et du Pacte de responsabilité ont eu un impact positif pour les entreprises.

Selon l’OFCE, ces différents facteurs conjugués auraient eu un impact négatif de 5 % sur le PIB au cours des quatre premières années de mandat.

« Les politiques de compétitivité et de soutien aux entreprises ont des effets faibles à court terme et importants à long terme [cinq ans], tandis que les politiques de hausses d’impôt ont des effets importants à court terme pour décroître progressivement, observe l’organisme. Cette différence de temporalité explique que les résultats positifs ne soient obtenus qu’en fin de mandat. »

Et à plus forte raison au cours du suivant.

Hausse sensible des prélèvements obligatoires

Malgré une conjoncture défavorable, le redressement des finances publiques a été significatif : le solde structurel français s’est amélioré de 2,5 points entre 2012 et 2016, tout en repoussant à la fin du quinquennat l’objectif de repasser sous la barre des 3 % du produit intérieur brut (PIB) pour le déficit public. Cet ajustement budgétaire s’est fait au prix, durant la première période du quinquennat, d’une hausse sensible des prélèvements obligatoires tandis que la seconde partie en a amorcé la décrue et s’est concentrée sur la maîtrise de la dépense publique.

Entre 2012 et 2013, ce sont ainsi 52 milliards d’euros de mesures fiscales qui ont affecté les ménages, pour les deux tiers, et les entreprises, à hauteur d’un tiers, dont 15,5 milliards avaient été décidés par la majorité précédente. Au total, selon les calculs de l’OFCE, sur l’ensemble du quinquennat, les entreprises ont bénéficié de 20,6 milliards d’euros d’allégements des prélèvements obligatoires, tandis que les ménages ont vu les leurs augmenter de 35 milliards.

Bilan mitigé en matière de chômage

L’inversion de la courbe du chômage était le principal enjeu du mandat de M. Hollande. En la matière, le bilan est plutôt mitigé. Certes, malgré les vents contraires affrontés par l’économie française depuis 2012, le taux de chômage s’est stabilisé ces derniers mois. Reste qu’en avril 2017, en dépit des 720 000 emplois créés sur la période, le nombre de chômeurs aura progressé de 100 000 personnes au total selon la définition du Bureau international du travail (BIT), prévoient les économistes de l’OFCE.

Mais ce chiffre est une estimation basse. Si l’on y ajoute les personnes en sous-emploi et celles souhaitant travailler mais classées comme inactives par l’Insee, 6 millions d’individus au total sont aujourd’hui fragilisés vis-à-vis de l’emploi, soit 440 000 personnes de plus qu’il y a quatre ans.

Le CICE et le Pacte de responsabilité auront créé ou sauvegardé 230 000 emplois d’ici à 2017.

Quel bilan tirer des différents dispositifs censés favoriser l’emploi, par la baisse du coût du travail ou bien par les emplois aidés ? Ils ont freiné la hausse du chômage. Le CICE, qui offre des baisses de charges sur les salaires jusqu’à 2,5 smic, et le Pacte de responsabilité, auront créé ou sauvegardé 230 000 emplois d’ici à 2017. Début 2016, 113 000 contrats aidés ont été signés mais 57 000 contrats de génération seulement. Un peu décevant, juge l’OFCE. Enfin, le plan de formation de 500 000 chômeurs annoncé en début d’année devrait avoir « un effet limité, du fait du risque de substitution entre personnes formées et non formées ».

En outre, « de 2012 à 2016, la France est, avec l’Espagne, le pays qui a connu le plus fort ajustement sur sa masse salariale », révèle l’OFCE. La raison ? Les politiques de l’offre axées sur la baisse du coût du travail, principalement. Sous l’effet du CICE et du Pacte de responsabilité, la part de la rémunération du travail dans le PIB a baissé de 1 point entre le deuxième trimestre 2012 et début 2016. La mauvaise nouvelle, c’est que le pouvoir d’achat des ménages en a pâti : il est toujours inférieur de 350 euros à son niveau de 2010, au tout début des politiques d’austérité.

Le taux de marge des entreprises a progressé

En revanche, les entreprises ont reconstitué leurs marges. C’est probablement dans ce domaine – celui où on l’attendait le moins – que le bilan du mandat de François Hollande est le plus positif. Alors qu’il s’érodait doucement depuis près de dix ans, le taux de marge des entreprises a progressé de deux points dans la valeur ajoutée depuis 2012. « Dans l’industrie, le taux de marge a atteint un niveau comparable aux records historiques du début des années 2000 », soulignent les économistes de l’observatoire. S’il continue de plonger dans la construction, l’investissement se redresse enfin dans l’industrie, et c’est encourageant.

Les parts de marchés des entreprises tricolores à l’international se sont un peu améliorées depuis mi-2014.

Dit autrement : nos PME ont regagné en compétitivité. Mais cela ne tient pas seulement aux mesures fiscales en leur faveur. La baisse de l’euro et des cours de pétrole ont également joué. Les parts de marchés des entreprises tricolores à l’international se sont un peu améliorées depuis mi-2014, alors qu’elles se dégradaient depuis 2000. De quoi ralentir la désindustrialisation dont souffre la France, mais pas encore l’enrayer.

L’OFCE conclut que « la France de 2017 devrait se trouver dans une dynamique économique plus positive qu’en 2012, même si la fragile reprise ne doit pas occulter les difficultés persistantes du pays en matière de commerce extérieur et de chômage ». Un bilan, finalement, pas aussi sombre que ne veulent le décrire ceux qui, à droite comme à gauche, aspirent à succéder à M. Hollande. Et pourraient finalement tirer les bénéfices de la politique mise œuvre durant ce quinquennat.