Des étudiants assistent à un cours d’informatique, à Abidjan en 2015. | AFP

C’est une première qui n’en est pas vraiment une. L’Organisation internationale de la francophonie (OIF), qui compte 54 Etats et gouvernements membres, a organisé, mercredi 14 septembre, dans ses locaux parisiens sa première Journée de la francophonie économique et numérique. Son but était d’accompagner la préparation du XVIe Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement de la francophonie, qui se tiendra à Madagascar les 26 et 27 novembre, et aura pour thème « Croissance partagée et développement responsable : les conditions de la stabilité du monde et de l’espace francophone ».

« Une stratégie commune »

Ce type d’événement est toutefois loin d’être inédit. Cette journée s’inscrit moins d’un an après le deuxième Forum économique de la francophonie, organisé par Richard Attias, en octobre 2015 à Paris. « Les grands forums ont leur utilité car ils mettent en présence différents acteurs politiques et économiques de tout premier plan, comme des ministres et des chefs d’Etat, explique Michaëlle Jean, désignée secrétaire générale de l’OIF en novembre 2014. Cette première journée a été une réussite parce qu’elle a réuni des entrepreneurs, des décideurs et des experts et que j’y ai vu une volonté d’engager une stratégie commune, même si les niveaux de développement des pays diffèrent. Au cours de la journée, nous avons engagé de manière pragmatique des actions et ciblé des enjeux précis comme la question bancaire ou l’accès au capital. »

Avec une croissance moyenne de 5,1 % sur la période 2012-2015, l’Afrique francophone subsaharienne se présente comme l’un des principaux relais de la croissance mondiale. Mais la population ne perçoit que trop rarement les fruits de cette croissance. Avec une démographie galopante (60 % de la population africaine est âgée de moins de 30 ans), résorber le chômage endémique des jeunes Africains est un enjeu capital.

« Effet de levier »

« Il y a urgence, reconnaît Kako Nubukpo, ancien ministre de la prospective et de l’évaluation des politiques publiques du Togo, nommé à la tête de la francophonie économique et numérique au sein de l’OIF en avril. La croissance n’est pas suffisamment inclusive parce qu’elle est fondée uniquement sur l’exploitation des matières premières et que ce n’est pas forcément là qu’il y a le plus de travail. Il faut donc diversifier la base productive afin que la croissance se traduise par une amélioration du pouvoir d’achat et du niveau de vie. Les chefs d’Etat et de gouvernement ont adopté deux stratégies : celle de la francophonie numérique, en 2012 à Kinshasa et celle de la stratégie économique, en 2014 à Dakar. Des synergies doivent être créées pour utiliser notamment l’effet de levier que représente le numérique. »

Le numérique se place aujourd’hui au cœur du développement de l’Afrique. La stratégie de l’OIF s’articule notamment autour de l’entrepreunariat, grâce notamment au développement de données et de services géolocalisés reposant sur la cartographie.

Mais les inconnues sont nombreuses. L’une d’elles est de savoir si l’Afrique saura passer directement à une économie de services, sans être passée par une phase d’industrialisation. « C’est un vrai débat, reconnaît Kako Nubukpo. Si elle y parvient, quelles pourraient être les conditions ? Sinon, quelles pourraient être les conditions qui vont lui permettre de démarrer des phases d’industrialisation dans un monde aussi global et aussi ouvert ? Les défis sont nombreux mais ce qui me rend optimiste, c’est qu’il y a une convergence des aspirations, le fait que tout le monde se rende compte qu’on ne peut plus continuer ainsi les paradigmes qui ont guidé ces trente dernières années. »

Livre blanc

Cette première journée doit être suivie par la rédaction d’un livre blanc qui sera proposé aux chefs d’Etat et de gouvernement au Sommet d’Antananarivo, à Madagascar. « Sur la base de ces recommandations, nous allons impulser des actions concrètes que nous menons déjà autour des incubateurs d’entreprises, assure Kako Nubukpo. Nous venons d’ailleurs d’en inaugurer un à Madagascar. »

En fin de journée, l’Agence Malagasy de développement économique et de promotion des entreprises (AMDP) a été lancée, en présence du président malgache, afin de promouvoir le secteur privé à Madagascar. Elle se concentrera principalement sur les domaines de l’agro-industrie, des services et de l’énergie verte. Sur la Grande Ile, seulement 7 % des habitants ont accès à l’eau et à l’électricité.