Renho Murata à Tokyo, le 15 septembre. | KAZUHIRO NOGI / AFP

Le principal parti d’opposition japonais a, pour la première fois de son histoire, élu une femme à sa tête jeudi 15 septembre – un coup de projecteur bienvenu pour une formation qui peine à se faire entendre face au puissant Parti libéral démocrate (PLD) du premier ministre, Shinzo Abe. Malgré une polémique sur sa nationalité, Renho Murata, 48 ans, a emporté la présidence du Parti démocrate, minoritaire à la Diète, le Parlement japonais.

Le vote interne au parti avait été organisé à la suite de la démission, fin juillet, du précédent chef de la formation démocrate, Katsuya Okada. Ce dernier avait pris acte de la lourde défaite subie lors des élections sénatoriales du 10 juillet. M. Okada ne s’était pas représenté et avait apporté son soutien à « Renho », désignée par son prénom sur la scène politique nippone, candidate début août contre deux autres candidats.

Malgré sa popularité au sein de l’opposition, Renho Murata n’était pas assurée de gagner du fait d’une polémique sur sa double nationalité. Née à Tokyo d’un père taïwanais et d’une mère japonaise, elle était uniquement taïwanaise jusqu’à l’adoption en 1985 d’une loi permettant aux mères de transmettre leur nationalité à leurs enfants. Elle avait par la suite conservé sa citoyenneté taïwanaise, contrevenant au droit japonais qui proscrit la double nationalité.

« Fière d’être japonaise »

Lorsque la question fut soulevée par la presse, « Renho » avait expliqué avoir cru qu’elle avait perdu sa nationalité taïwanaise en devenant japonaise, à 17 ans. Elle a dit, avant le vote interne du parti, avoir lancé récemment les démarches pour l’abandonner, puis s’est dite « fière d’être japonaise » dans le discours qu’elle a donné jeudi après sa victoire.

Diplômée en droit, Renho Murata est passée par le mannequinat avant de devenir journaliste. Elle commente l’actualité à partir du début des années 1990 sur plusieurs chaînes de télévision, avant de se lancer en politique. Elle est élue à la Chambre haute en 2004 et est nommée ministre de la revitalisation industrielle et de la consommation lorsque le Parti démocrate accède au pouvoir pour la seule fois de son histoire, en 2009.

Le Parti démocrate a géré le pays jusqu’en 2012, pendant trois années marquées par les revirements sur la question de la base américaine à Okinawa, un scandale sur le financement occulte du parti et surtout la catastrophe de Fukushima. Depuis, la principale formation d’opposition peine à proposer une alternative à la politique de Shinzo Abe, marquée par le nationalisme et d’importants efforts de relance de la croissance qui peinent à donner des résultats.

Renho Murata s’est dite consciente de sa « lourde responsabilité », affirmant son ambition d’avancer des propositions concrètes face à la droite nippone « plutôt que de juste critiquer ». « Nous devons affronter l’immense parti au pouvoir, nous devons tenir tête au gouvernement actuel qui est si populaire », a-t-elle lancé jeudi.

La politique est longtemps restée une affaire d’hommes au Japon. Mais le 31 juillet, les habitants de Tokyo ont élu une femme, Yuriko Koike, au poste de gouverneure. Elle n’avait pas reçu l’appui du PLD auquel elle est rattachée. Elle s’est engagée à suivre au plus près les comptes des Jeux olympiques de 2020, source de dépenses qui mécontentent l’opinion. Puis Shinzo Abe a nommé au ministère de la défense, le 3 août, une alliée parmi les faucons du PLD, Tomomi Inada, qui souhaite comme lui une prochaine révision de la Constitution antimilitariste du Japon. Leur nomination a empêché l’opposition de prendre l’avantage en matière de féminisation.

Japon : Yuriko Koike, première femme élue gouverneure de Tokyo
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