Nicolas Sarkozy en meeting, le 16 septembre, à Mandelieu-la-Napoule (Alpes-Maritimes). | VALERY HACHE / AFP

Editorial du « Monde ». Il fut un temps où un candidat à l’élection présidentielle se fixait l’objectif de ramener à 0 % en 2017 le déficit public de la France. C’était en 2011, et François Hollande voulait ainsi démontrer que la gauche saurait gérer avec sérieux les finances publiques et réussir l’exploit de les rétablir dans un équilibre jamais atteint depuis 1974. Il fut un temps où un président de la République voulait graver dans le marbre de la Constitution cette « règle d’or » de l’équilibre. C’était en 2010 et Nicolas Sarkozy, à la tête d’un « Etat en faillite », selon la formule de son premier ministre, François Fillon, voulait rompre définitivement avec le laxisme budgétaire et renforcer la crédibilité de la France auprès de la Commission européenne.

Finalement, depuis le traité de Maastricht, qui a imposé, en 1992, la règle d’un déficit public sous la barre des 3 % du produit intérieur brut, la France n’a pas cessé de quémander des délais à Bruxelles. M. Sarkozy l’a fait. M. Hollande, qui s’est engagé à respecter les 2,7 % de déficit prévus par le programme de stabilité en 2017, a eu la même démarche. Avec le succès que l’on connaît.

Au nom du refrain de l’héritage

Aujourd’hui, en pleine campagne de la primaire pour la désignation de son candidat à l’élection présidentielle, la droite a tendance à oublier les leçons d’orthodoxie budgétaire qu’elle a administrées avec constance depuis quatre ans – « Nos déficits et notre dette publique remettent en cause notre indépendance », assénait M. Sarkozy dans Le Monde en novembre 2015 – et s’affranchit de l’objectif d’un déficit de 3 % du PIB en 2017. Au nom du refrain de l’héritage qu’elle va trouver si elle revient au pouvoir.

M. Sarkozy, qui avait promis en 2007 un retour à l’équilibre en 2012, prône un « contre-choc fiscal », qui aura pour effet d’aggraver le déficit. Une « dégradation transitoire », assure-t-il. M. Fillon table sur un déficit de 4,7 % en 2017 – soit quasiment le niveau qu’avait trouvé la gauche en arrivant au pouvoir – et un équilibre en 2022. Plus vertueux, Alain Juppé renvoie l’objectif des 3 % à 2018… Quant à Bruno Le Maire, il refuse purement et simplement de faire de cet engagement de la France « un mantra ».

Le débat agite aussi la gauche

Ce débat qui touche au respect de la parole de la France agite aussi la gauche. M. Hollande, qui a lourdement augmenté l’impôt des ménages avant d’accorder des allégements de charges aux entreprises, n’a pas tenu ses promesses de candidat, même s’il est parvenu à réduire (modestement) le déficit. Le 29 août, Manuel Valls a plaidé pour un « assouplissement des règles du pacte de stabilité », tout en affirmant que la France respecterait ses engagements en 2017.

La droite compte sur la clémence de ses partenaires européens, sûre qu’elle donnera suffisamment de gages avec ses réformes structurelles – sur l’âge de la retraite, la réduction du nombre de fonctionnaires, la réforme du marché du travail – pour obtenir gain de cause. Mais une campagne électorale n’autorise pas tous les reniements. Alors que le Front national prône la sortie de l’euro et surfe sur la défiance qu’inspire l’Europe à un nombre croissant d’électeurs, les candidats à la primaire des Républicains affichent leur volonté de se libérer du carcan budgétaire imposé par Bruxelles. Sur un tel sujet, on ne peut avoir deux discours, « vertueux » quand on est dans l’opposition, « laxiste » quand on revient au pouvoir. Il y va de la crédibilité de la parole politique.