Depuis 2015, le patron du groupe Airbus, Tom Enders s’est employé à concentrer tous les pouvoirs autour de lui. | PASCAL PAVANI / AFP

Ce n’est pas une restructuration, mais la poursuite de la réorganisation en cours du groupe Airbus. Selon le Financial Times du lundi 19 septembre, celui-ci réfléchirait à un plan de réduction de coûts qui, comme tout projet de ce type, pourrait avoir pour conséquences des suppressions d’emplois. « Vous n’excluez jamais rien quand vous parlez d’efficacité et de synergie, mais nous sommes en train de réfléchir à tout cela, aux moyens de réduire les coûts de nos structures et d’être plus efficaces », a indiqué, lundi, Tom Enders, président exécutif d’Airbus Group, en réponse aux interrogations du quotidien économique britannique.

Le PDG d’Airbus Helicopters, Guillaume Faury, s’est rendu le même jour sur le site de production de Marignane (Bouches-du-Rhône) pour tenter de rassurer les 8 500 salariés de l’entreprise inquiets pour leur emploi. Mais il a reconnu que les quatre derniers mois de 2016 seraient cruciaux pour la filiale, notamment « avec la concrétisation ou pas d’importants contrats en Pologne et en Asie », a indiqué la CFDT dans un communiqué.

Deux programmes en souffrance

Le plus mal en point est celui de l’avion militaire de transport A400M, mis en œuvre depuis quatre ans par sa division Airbus Space and Defense. La production de l’appareil est entravée par de nombreux retards, notamment causés par des problèmes de moteurs. A un point tel que l’entreprise a été conduite à constituer une provision de 1,4 milliard d’euros. Airbus Group s’attend à devoir indemniser les pays clients de l’A400M qui n’ont pas été livrés en temps et en heure.

Le très gros-porteur long-courrier A380 donne aussi quelques sueurs au constructeur. En juillet, à l’occasion du Salon de l’aéronautique de Farnborough, Fabrice Brégier, PDG d’Airbus, avait annoncé qu’il allait réduire de moitié la production de cet avion faute de nouveaux clients. Dès 2018, il ne sortira plus des chaînes de montage qu’un seul exemplaire d’A380 par mois, contre deux aujourd’hui.

Mais Airbus peut voir venir. Sur les 319 super-jumbos commandés, il lui en reste encore 126 à fabriquer. Soit près de dix années de production. Surtout, cet été, l’avionneur européen avait signalé que cette réduction de voilure se ferait sans casse sociale.

L’avionneur européen va en effet avoir besoin de toutes ses forces pour suivre la montée en cadence de la production de son « best-seller », l’A320. Dès le début de 2017, il a prévu qu’il en sorte 50 exemplaires par mois de ses chaînes.

Le redéploiement « d’une partie des personnels attelés à l’A380 » lui permettra également de donner un coup de pouce à l’A350. La production du dernier né des long-courriers d’Airbus a été affectée par des retards de livraison de l’un de ses fournisseurs, le fabricant de sièges Zodiac.

Enfin, Airbus espère toujours faire décoller les ventes de l’A380. C’est pourquoi il s’est fixé pour « principe (…) d’essayer de ne pas arrêter la filière de production, c’est-à-dire la chaîne d’assemblage et les fournisseurs, pour ne pas perdre le savoir-faire et les compétences ». Airbus est d’autant moins enclin à stopper l’A380 que l’avion préféré des passagers est à l’équilibre et ne perd pas d’argent.

Simplifier la gouvernance

En pratique, plutôt qu’une restructuration, c’est une complète réorganisation du groupe Airbus dont il s’agit. « Ce ne sont pas les pertes sur les programmes qui génèrent une nouvelle organisation », reconnaît-on chez Airbus.

Cet ample remaniement a débuté avec l’arrivée aux commandes du groupe, il y a quatre ans, de Tom Enders, désireux de faire de l’ex-EADS une « entreprise normale avec une gouvernance simplifiée ». En clair, pour asseoir son pouvoir sur toutes les divisions du groupe, M. Enders, comme on le dit chez Airbus, « ne veut plus voir qu’une seule tête » : la sienne !

La mise au pas a déjà largement commencé. Depuis 2015, le patron du groupe s’est employé à concentrer tous les pouvoirs autour de lui. Les directions de la communication, des ressources humaines, des finances et des achats ont été directement rattachées à la présidence. C’est désormais au tour de la recherche et développement (R&D) de monter d’un cran.

Cette remise à plat pourrait toucher les patrons des principales divisions du groupe. Les grands barons, tel Fabrice Brégier, pourraient cesser d’être les patrons d’une division pour, in fine, chapeauter un domaine de compétences à l’échelle du groupe. Des « fonctions transverses », traduit-on au sein du groupe. Une réorganisation qui fait grincer des dents.