M. Chat ne sera finalement pas poursuivi pour ses dessins

Le procès de Thoma Vuille, l’homme qui dissémine ses fameux chats jaunes et hilares sur les murs des villes du monde entier, n’aura finalement jamais eu lieu, mercredi 29 octobre. Le tribunal correctionnel de Paris a en effet tranché en faveur de l’annulation pure et simple des poursuites envers l’artiste-graffeur par la RATP.

Rappel des faits : la Régie autonome des transports parisiens réclamait 1 800 euros de dommages et intérêts à cet artiste franco-suisse de 37 ans pour avoir « sans autorisation préalable, tracé des inscriptions, signes ou dessins, en l'espèce des têtes de chat », sur les murs de la station Châtelet-Les Halles pendant sa rénovation, en mai. Thoma Vuille avait refusé de payer, estimant que son intervention, éphémère, allait être recouverte de carrelage au cours du chantier.

« une irrégularité flagrante »

Spécialiste de la propriété intellectuelle, notamment dans le domaine de l'art contemporain, son avocate, Me Agnès Tricoire, a soulevé la nullité de la convocation de l'artiste, car celle-ci visait des articles de lois en partie abrogés, mais également contradictoires entre eux. L’artiste ne savait donc pas exactement quelle infraction lui était reprochée : encourait-il 3 700 euros d'amende et des travaux d’intérêt général, ou une peine pouvant aller jusqu'à trois ans d'emprisonnement et une amende de plusieurs dizaines de milliers d'euros ? Une « incertitude » qui portait « grief » à la préparation de sa défense, a affirmé son conseil.

Si la procureure a admis une « irrégularité flagrante », elle a rappelé que l’artiste avait déjà été poursuivi pour ce type d’infraction et savait préparer sa défense.

L'artiste franco-suisse Thoma Vuille à la veille de son procès, le 28 octobre, rue de la Glacière, à Paris. | AFP/MARTIN BUREAU

En 2007, Thoma Vuille avait en effet été arrêté le pinceau à la main par la police municipale d’Orléans (Loiret), où son personnage est né en 1997. Le député-maire de la ville, Serge Grouard, avait alors pris sa défense, et l’élu s’est également déplacé ce mercredi pour venir témoigner en sa faveur au tribunal, tout comme le maire PS du 13e arrondissement de Paris, Jérôme Coumet, qui encourage la pratique du street-art sur les murs de son arrondissement.

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« un clair désaveu » pour la RATP

Après suspension de l’audience, mercredi, le tribunal a constaté la nullité de la citation et renvoyé le parquet à mieux se pourvoir. Un « clair désaveu » pour la RATP et pour le parquet, a estimé l'avocate. Selon elle, la RATP ne demandait finalement qu'un euro de dommages et intérêts, et « était complètement en retrait par rapport à ses prétentions précédentes ». « Il n’y a pas de délit, pas d'infraction » a-t-elle fait valoir, car son client « n'a rien dégradé, il a peint des chats sur des supports qui étaient destinés à être recouverts par la RATP et qui l'ont été progressivement par les travaux. Mon client n’est pas un délinquant, c’est un artiste ! »

Ce procès « me terrifiait », a de son côté expliqué Thoma Vuille à la sortie de l’audience. « Je suis un peintre, je peins, et puis c'est tout », a-t-il ajouté. « Mon grand-père était peintre en bâtiment, mon père est maçon… Peindre sur les murs, c'est pas un délit dans ma famille ». Il explique avoir voulu « humaniser un lieu, un couloir de transit, qui est complètement gris. J'ai juste mis de la couleur ». Arrivé le front soucieux, l’artiste a avoué qu’il était « impressionné » par le retournement de situation : « Je suis comme la RATP, je suis KO ! »

L’artiste terminera dans l’après-midi, à partir de 15 heures, une fresque commencée la veille sur un mur de la rue de la Glacière, dans le 13e arrondissement, où il est question « de justice et de liberté », affirme-t-il.