Porte-conteneurs du groupe danois Maersk dans le port du Havre. | ROBERT FRANCOIS / AFP

La très violente crise en cours dans le transport maritime pousse les armateurs à de déchirantes révisions stratégiques. Témoin, le projet dévoilé jeudi 22 septembre par A. P. Møller-Maersk, le groupe danois qui domine largement la profession au niveau mondial.

Après plusieurs mois de réflexion, ses dirigeants ont tranché : l’entreprise va éclater en deux. Le principal groupe danois tous secteurs confondus va conserver son activité historique de transport maritime, et se séparer de son importante branche pétrolière. Une scission plutôt appréciée par les investisseurs : en Bourse, l’action du roi des porte-conteneurs a gagné 4 % dans les premiers échanges.

Le plus puissant conglomérat du Danemark

Remettre en cause l’équilibre actuel de Maersk n’avait rien d’évident. Le groupe est certes né dans le transport maritime : sa fondation en 1904 date du moment où le capitaine Peter Maersk Møller et son fils Arnold Peter ont acheté un premier bateau à vapeur. Mais il s’est assez rapidement déployé dans des métiers plus ou moins connexes : le transport de produits pétroliers, puis les forages pétroliers et gaziers, le com merce, le transport aérien, la banque, etc. De proche en proche, Maersk est ainsi devenu un conglomérat, le plus puissant du Danemark.

Ces dernières années, son directeur général Nils Smedegaard Andersen a commencé un travail de recentrage, et coupé plusieurs branches. Il s’est ainsi défait de titres qu’il détenait dans Danske Bank et dans une chaîne de supermarchés, pour focaliser le groupe sur le monde maritime et l’énergie. Mais pour lui, pas question d’aller plus loin : Maersk devait demeurer un conglomérat, notamment pour bénéficier d’un effet de taille, et pour ne pas dépendre d’un seul métier très cyclique.

Tempête économique

Cette doctrine a été emportée par la tempête économique. Depuis un an, les deux grandes branches de Maersk ont souffert l’une comme l’autre au lieu de s’équilibrer. Le transport maritime a été pénalisé par le ralentissement du commerce international de marchandises, le trop grand nombre de navires disponibles dans le monde et la chute des prix qui s’est ensuivie.

La partie pétrolière a, elle, été soumise à rude épreuve par la chute des cours du brut. Résultat : dans son ensemble, le groupe a vu son bénéfice divisé par six en 2015. La seule division pétrole a affiché une perte de 2,1 milliards de dollars, la valeur de certains actifs ayant été revue à la baisse dans les comptes. Le chiffre d’affaires global, lui, s’est contracté de 15 %, à 40,3 milliards de dollars.

Eventuelle vente des activités pétrolières

Le 23 juin, quatre mois et demi après la publication de ces résultats, M. Andersen était remercié, et le président du groupe, Michael Pram Rasmussen, annonçait la mise à l’étude d’un éventuel éclatement.

Désormais, le principe de cette scission est décidé. Maersk va ainsi devenir « une compagnie de transport et de logistique », selon le communiqué publié jeudi. Elle regroupera les porte-conteneurs, mais aussi les remorqueurs de Svitzer, les terminaux portuaires (APM), ou encore la logistique (Damco), soit environ 75 % du chiffre d’affaires au premier semestre.

Les activités pétrolières, correspondant au quart restant du chiffre d’affaires, seront « séparées » du reste. Leur sort exact n’est pas encore connu. Elles pourraient être vendues à un concurrent ou introduites en Bourse, par exemple.