La direction de SFR a présenté jeudi 22 septembre les grandes orientations stratégiques de l’opérateur. | PHILIPPE WOJAZER / REUTERS

Patrick Drahi souhaite-t-il progressivement « externaliser » une partie des activités de SFR vers la sphère Altice, la maison mère de SFR ? En apparence secondaire pour leur quotidien, la question inquiète les salariés en interne. Tous l’avaient à l’esprit jeudi 22 septembre, alors que se tenait chez SFR un comité de groupe, sorte de super-comité d’entreprise. A cette occasion, Michel Paulin a présenté aux organisations syndicales les grandes orientations stratégiques de l’opérateur. Le directeur général de SFR est revenu sur la convergence entre les tuyaux et les contenus, les investissements dans les réseaux, l’amélioration de l’expérience client.

La réunion devait servir de prélude à la vaste réorganisation annoncée cet été. SFR a en effet prévu de supprimer, à travers un plan de départs volontaires, un tiers de ses effectifs en 2017, soit 5 000 postes. Cet été, les syndicats ont signé avec la direction un accord sur les conditions financières liées à ces départs. Pour le moment, M. Paulin n’a pas donné plus de détails sur les branches et les métiers concernés par la restructuration. De nouveaux comités d’entreprise entité par entité auront lieu ces prochaines semaines.

Inquiétudes syndicales

En revanche, une nouvelle a fait l’effet d’une bombe. La direction de SFR a annoncé aux syndicats que 1 400 des 1 660 salariés du service client quitteraient le giron de l’opérateur pour fusionner avec Intelcia, un opérateur de centre d’appels franco-marocain, en cours de rachat par Altice, et qui emploie quelque 1 500 personnes en France. Une fois l’opération réalisée, Altice créera une nouvelle filiale française, pour loger l’ensemble de ses centres d’appels.

Pour les représentants du personnel, ce transfert revient à « externaliser » les salariés de SFR chez Altice. Une vision contestée par la direction du groupe. « On ne peut pas parler d’externalisation. Tous les salariés appartiennent à Altice-SFR », dit un porte-parole.

Les syndicats craignent que SFR en profite pour réduire les coûts. Horaires, convention collective, traitement salarial, mutuelle, la direction sera en effet en mesure de remettre à plat l’ensemble des acquis des salariés du service clients quinze mois après le changement d’entité.

Or, le service client de SFR bénéficie de conditions beaucoup plus généreuses qu’un prestataire classique. « Nous sommes beaucoup plus concentrés sur la valeur ajoutée, nous avons des projets et la productivité est un peu plus secondaire », explique Fabrice Pradas, délégué syndical central de l’UNSA.

Pas de licenciements

« L’intéressement et la participation sont calculés sur l’entité SFR, et pas Altice », dit M. Pradas. « Si cela n’est pas pour faire des économies, pourquoi ne pas rapatrier les salariés d’Intelcia dans le service client existant de SFR, et leur donner de meilleures conditions de travail ? », s’interroge le syndicaliste. « C’est une logique de réduction de coûts pure et dure », complète Xavier Courtillat, de la CFDT, encore traumatisé par l’externalisation en 2007 de centres d’appels de SFR vers Arvato et Teleperformance.

Autre interrogation, les salariés se demandent s’ils devront travailler pour d’autres entreprises que SFR, à l’image d’Intelcia, qui est multiclients.

En revanche, la direction ne pourra pas en profiter pour licencier. Selon l’accord signé cet été, si elle supprimait des emplois dans la nouvelle filiale, elle serait obligée de réembaucher dans le pôle télécoms, afin d’employer toujours au total 10 000 personnes dans le pôle télécoms.

Rencontre à Bercy

Ce transfert en annoncerait-il d’autres ? Début septembre, Altice a annoncé le rachat de Parilis, et sa filiale ERT, spécialisée dans le déploiement du réseau, dans le but de renforcer ses propres activités d’infrastructures. « Ils ont ouvert la boîte de Pandore », dit Sana Iffach, de la CFE-CGC.

En attendant, la direction a annoncé dans un document préparatoire envoyé aux organisations syndicales que le siège pourrait déménager. Le campus de Saint-Denis inauguré en grande pompe fin 2013 devrait être abandonné en 2018 pour être transféré à Balard, sur le nouveau site qui héberge le pôle médias du groupe (BFM, RMC, SFR Sport…).

Une chose est sûre : à la veille de la présidentielle, cette restructuration inquiète le gouvernement, qui s’interroge sur la capacité de SFR à opérer et à investir dans les réseaux avec un tiers des effectifs en moins. A Bercy, on a prévu de rencontrer les responsables de l’opérateur pour obtenir des garanties.