GRAND PRIX DE LA FINANCE SOLIDAIRE

Depuis une dizaine d’années, les microbrasseries se multiplient, produisant localement des bières qui tranchent avec les produits standardisés de la grande distribution. Il y en aurait plus de 800 en France, 140 rien qu’en Auvergne-Rhône-Alpes. « Mais le malt qu’elles utilisent est rarement bio et n’est pas produit localement. La plupart s’approvisionnent en Allemagne et en Belgique », confie Guillaume Bourdon.

Ce trentenaire travaillant dans l’insertion par l’activité économique s’est associé avec son épouse, Marie, et son colocataire, Baptiste François, pour lancer Malteurs Echos en 2012. Quittant la région parisienne, ils se sont installés à Beauchastel, un village de l’ouest de l’Ardèche, près de la Drôme.

Une approche militante

Le choix du statut de société coopérative d’intérêt collectif (SCIC) leur a permis d’associer à leur projet de nombreux partenaires : fondateurs, salariés, agriculteurs, brasseurs, collectivités locales, consommateurs, ou encore plusieurs Cigales, ces groupes de citoyens qui mobilisent leur épargne pour financer des projets locaux.

La coopérative compte ainsi cent sociétaires, dont quarante brasseurs. Pour boucler le financement initial de 150 000 euros, Malteurs Echos a fait appel au réseau France Active et au programme d’investissements d’avenir (PIA), qui ont complété leur apport personnel de 30 000 euros. Ils ont également obtenu des subventions de l’Etat, de la région et du département.

Défendant les valeurs de l’économie sociale et solidaire, les fondateurs de cette coopérative veulent montrer qu’un autre mode d’organisation du travail est possible, très éloigné de celui des grands groupes qui dominent le marché du malt. Plutôt qu’automatiser leur production, ils ont opté pour des techniques manuelles, plus physiques, mais qui créent davantage d’emplois. Parmi les sept salariés de Malteurs Echos, trois sont en insertion. A terme, si l’entreprise atteint ses objectifs, six à dix emplois de ce type pourraient être créés.

Un rapport de un à mille

Un pari difficile dans une activité de transformation (le malt est produit par germination et cuisson de l’orge) où les marges sont faibles. Quand Malteurs Echos produit 600 kilogrammes de malt par jour, de quoi brasser 2 500 litres de bière, une unité de production industrielle peut en livrer quotidiennement jusqu’à 600 tonnes, soit un rapport de un à mille !

Sur ce marché concurrentiel, y a-t-il de la place pour des acteurs indépendants, forcément plus chers ? « A 1 200 euros la tonne de malt biologique, nos tarifs sont deux fois plus élevés que ceux des leaders. Mais cette matière première représente seulement 5 % à 10 % du coût de revient de la bière. A l’arrivée, la différence ne dépasse pas 13 centimes pour une bouteille de 75 centilitres. Nous atteindrons notre point d’équilibre lorsque nous produirons 600 tonnes par an », poursuit Guillaume Bourdon.

Déménagement programmé

Pour l’instant, la production annuelle de Malteurs Echos ne dépasse pas 250 tonnes. En déficit, la coopérative espère atteindre l’équilibre en 2017. Les capacités du site actuel étant saturées, elle se prépare à déménager. A quelques minutes du site actuel, une ancienne coopérative fruitière sera bientôt transformée en malterie.

Ce changement d’échelle nécessitera 60 000 euros d’investissement. Le prix à payer pour enclencher une dynamique positive qui pourrait dépasser le cadre rhônalpin. « Il y a la place pour quatre ou cinq malteries à vocation locale en France. Nous sommes en train d’ouvrir la voie, en espérant susciter des initiatives », déclare M. Bourdon.

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