La voie Georges-Pompidou, à Paris, lors de Paris-Plage, le 3 septembre. | FRANCOIS GUILLOT / AFP

Chahut dans les travées, vociférations, rappels au règlement ponctués d’interruptions de séance… Le Conseil de Paris a été le théâtre d’un débat houleux, lundi 26 septembre. Les élus parisiens étaient appelés à valider la fermeture définitive à la circulation automobile de la voie Georges-Pompidou, sur la rive droite de la Seine, entre le tunnel des Tuileries (1er arrondissement) et le port de l’Arsenal (4e arrondissement). Les groupes de la majorité – PS, EELV, Front de Gauche et PRG – ont voté « pour » ainsi que le Parti de Gauche. Les Républicains, l’UDI ont voté « contre ». Les six élus MoDem se sont abstenus.

Si l’adoption du projet ne faisait guère de doute, la maire de Paris n’en a pas moins déployé des efforts pour défendre « une décision historique : la fin d’une autoroute urbaine à Paris et la reconquête de la Seine », s’est-elle félicitée applaudissant l’épilogue des débats avant de lever la séance.

Mme Hidalgo a d’emblée mis en avant les arguments de santé publique. La pollution tue « 2 500 » personnes chaque année à Paris, a-t-elle indiqué. « Le trafic génère deux tiers des émissions de dioxyde d’azote et 56 % des particules fines », a t elle souligné. Dans ce cas, « pourquoi attendre ? », a-t-elle plaidé.

« Bilan de l’impact »

Pour lester sa démonstration, la maire de Paris a mis en avant la « réussite » de la fermeture de la rive gauche de la Seine, en 2013. Cette première piétonnisation a permis « une baisse de 15 % des émissions de dioxyde d’azote sur le site », a-t-elle rappelé. « Des résultats similaires sont attendus sur la rive droite », a-t-elle promis.

Citant une étude de la ville sur la piétonnisation des berges de la rive droite, fermées à la circulation depuis le 20 juillet, Mme Hidalgo a fait valoir que « l’allongement des temps de parcours est plus faible que les études ne le prédisaient », a-t-elle ajouté. Mme Hidalgo a promis « un bilan de l’impact » de cette fermeture « d’ici six mois ». Préfet de police de Paris, Michel Cadot a confirmé lors de la séance, qu’il présiderait un comité technique de suivi des effets de cette décision avec tous les acteurs publics et privés concernés.

Mme Hidalgo n’en a pas moins essuyé les violentes attaques de l’opposition sur son « manque de concertation », la « précipitation » et, au final, le « mépris des élus de banlieue » dont elle a fait preuve, à leurs yeux dans la conduite de son projet. « Vous avez décidé de fermer une route, voilà à quoi se résume votre projet », a lancé Nathalie Kosciusko-Morizet, chef de file de la droite parisienne. « C’est oublier que ce sont les véhicules qui tuent, pas la route », a-t-elle argué. L’ancienne ministre de l’écologie de François Fillon, soucieuse de ne pas apparaître comme « pro-voiture », a fait au passage la promotion de son « contre-projet » de pietonnisation de la rive droite qui se veut plus « progressif » dans le temps que celui de Mme Hidalgo.

« Mme Hidalgo, Paris n’est pas le Bucarest de Mme Ceausescu »

D’autres élus de son groupe ont été tout aussi offensifs : « Mme Hidalgo, Paris n’est pas le Bucarest de Mme Ceausescu », a lancé Pierre Lellouche, élu du 9e arrondissement.

Patron du groupe UDI-MoDem, Eric Azière a préféré l’humour : « Vous prenez tous les banlieusards et les Parisiens qui bossent pour des corniauds », a-t-il lancé en référence au film éponyme de Gérard Oury. « Vous essayez de nous faire passer pour des chauffards et c’est vous qui êtes le pied au plancher dans une course de vitesse contre le calendrier politique », a-t-il ironisé.

Les élus écologistes au premier rang desquels l’adjoint aux transports, Christophe Najdovski, se sont félicités du vote d’un projet qui n’est à leurs yeux que la première étape d’un plan plus large de la restriction de la voiture à Paris. « Nous travaillons à la restriction de la circulation sur la rue de Rivoli. Mais, pour le moment, le préfet de police est plus que réservé », reconnaissait un adjoint EELV dans les couloirs de l’hôtel de ville.

Valérie Pécresse en ligne de mire

Sans attendre le vote final, la quarantaine d’élus du Val-de-Marne, de droite pour la plupart, venus pour manifester leur hostilité à la piétonnisation de la rive droite, avaient quitté les lieux, dépités.

Ils n’en ont pas moins entendu, au début des débats, Mme Hidalgo cibler violemment Valérie Pécresse, la présidente (Les Républicains) de l’Ile-de-France, hostile à son projet. « Je demande solennellement à la région de se concentrer sur ses compétences et de cesser de s’occuper des compétences que la loi ne lui accorde pas », a tancé la maire de Paris. Mme Pécresse, qui déjeunait lundi avec NKM et les élus de la droite parisienne n’a pas manqué, de son côté, de fustiger la rupture de dialogue de Mme Hidalgo avec la région.