Des manifestants à Paris lors de la conférence sur le climat (COP21), le 12 décembre 2015. | FRANCOIS GUILLOT / AFP

Editorial du « Monde ». L’accord scellé en décembre 2015 pour contenir le réchauffement climatique entrera en vigueur dès novembre, moins d’un an après la conférence de Paris (COP21) qui l’a vu naître. C’est une heureuse surprise, et une bonne nouvelle. Une surprise, car jamais un traité international n’avait obtenu en un temps si court le quorum nécessaire à sa mise en œuvre. La ratification indienne, déposée dimanche 2 octobre, jour anniversaire de la naissance du Mahatma Gandhi, est l’avant-dernière marche vers l’entrée en vigueur de l’accord climat.

La dernière marche est sur le point d’être gravie : le Parlement européen devrait se prononcer, mardi 4 octobre, sur un projet de décision autorisant l’Union européenne, et ceux de ses Etats membres qui ont achevé leur processus de ratification, à rejoindre l’accord. L’issue du vote ne fait guère de doute, dans une enceinte favorable à une politique climatique et énergétique plus ambitieuse.

L’UE demain, l’Inde aujourd’hui, la Chine et les Etats-Unis début septembre. A la veille du G20 de Hangzhou, les deux plus gros pollueurs de la planète avaient officialisé eux aussi leur ratification, entraînant dans leur sillage le Brésil et l’Argentine.

Grâce à cette mobilisation sans précédent, les conditions à la mise en œuvre des engagements climat sont sur le point d’être réunies. Le texte impose qu’au moins 55 pays (sur les 195 Etats acteurs des négociations) ratifient le document : 62 pays ont déjà rejoint l’accord. Une autre clause exige qu’au moins 55 % des émissions mondiales soient couvertes ; l’annonce de New Delhi porte le chiffre à 52 % et la contribution de 6 des 28 membres de l’UE (Allemagne, Autriche, France, Hongrie, Malte, Slovaquie) va permettre de franchir ce deuxième seuil.

Pas de mesure coercitive

La France peut donc se féliciter de passer le relais au Maroc en ayant accompli sa mission, puisque la prochaine conférence climat (COP22), qui s’ouvrira le 7 novembre à Marrakech, devrait saluer l’entrée en vigueur de l’accord du 12 décembre 2015. Le pilotage de ce dossier par Laurent Fabius, puis par Ségolène Royal, ministre française de l’environnement et présidente de la COP pour quelques semaines encore, a contribué à ce succès, qui s’explique aussi par la nature même du compromis adopté lors de la COP21.

Si l’accord climat comporte certaines contraintes juridiques – notamment un mécanisme de transparence qui conduira un comité d’experts à vérifier les informations fournies par les Etats –, il ne prévoit pas de mesure coercitive à l’égard de ceux qui ne rempliraient pas leurs engagements. Il est moins contraignant, donc plus facile à respecter que le protocole de Kyoto (fondé sur des objectifs chiffrés de baisse d’émissions à atteindre par les pays développés), finalement mis en œuvre en 2005… huit ans après son adoption.

La réussite actuelle ne doit pas faire oublier une autre réalité, moins prometteuse celle-là : l’insuffisance des engagements des Etats face à l’emballement du thermomètre. La hausse des températures sur la Terre s’accélère et pourrait atteindre 2 °C dès 2050, par rapport à l’ère préindustrielle : « Il faut doubler, voire tripler les efforts » pour limiter les émissions de gaz à effet de serre, ont averti fin septembre sept climatologues de renom, dont Robert Watson, ancien président du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Ce n’est, malheureusement, ni une surprise ni une bonne nouvelle.