Des miliciens afghans, à Kunduz, le 4 octobre. | BASHIR KHAN SAFI/AFP

Mardi 4 octobre au matin, des groupes de talibans occupaient toujours certains quartiers du centre-ville de Kunduz, au nord de l’Afghanistan, qui était déjà tombé aux mains des insurgés, pendant quinze jours, début octobre 2015. Lundi, ces combattants avaient franchi les barrages des forces gouvernementales et fait flotter leur drapeau sur les édifices et ronds-points. Des images largement diffusées sur les réseaux sociaux. Le chef de la police de Kunduz, Qasim Jangalbagh, a reconnu, mardi, que les tentatives pour reprendre la ville dans la nuit avaient avorté.

Lundi soir, le commandement militaire américain à Kaboul a assuré que ses forces n’avaient pas mené de frappes aériennes à Kunduz contre les talibans tout en indiquant que des membres des forces spéciales et des avions étaient positionnés près de la ville en cas de besoin. Le général Charles ­Cleveland a tenu, pour sa part, à minimiser le coup de force taliban : « Il n’y a pas de preuve d’une offensive significative. »

Principale cité du nord-est du pays, forte de 300 000 habitants, carrefour régional situé à soixante kilomètres de la frontière avec le Tadjikistan, Kunduz, qui avait déjà été menacée, à plusieurs reprises ces dernières semaines, est un symbole fort d’une dégradation sécuritaire inquiétante. Le régime de Kaboul semble incapable de sécuriser son territoire au moment même où se tient, à Bruxelles, la troisième conférence dite des donateurs supposée soutenir financièrement la stabilisation du pays.

Les civils, premières victimes

Une inquiétude renforcée par la conduite d’attaques talibanes simultanées à celle de Kunduz dans la province du Helmand, dans le sud du pays, et d’Uruzgan, au centre. Lundi, des insurgés ont ainsi renforcé leur présence dans la partie nord du Helmand. Déjà très implantés dans leurs trois fiefs – Sangin, Musa Qala et Kajaki –, ils avaient lancé, début août, une offensive concertée vers Lashkar Gah, la capitale de la province, qui avait été repoussée.

Lundi, ils sont revenus et ont pris le contrôle, au sud de cette ville, du district de Nawa, qui était il y a peu l’un des plus sûrs de la province. Mardi matin, des escarmouches avaient encore lieu avec les forces gouvernementales mais les informations restaient parcellaires en raison de l’interruption des communications téléphoniques.

Les premières victimes de cette insécurité demeurent les populations civiles. La Mission d’assistance des Nations unies en Afghanistan (Unama) a dénoncé, le 2 octobre, la mort de dix-neuf per­sonnes, dans les provinces du Helmand et de Bagdhis, dont les véhicules ont sauté sur des engins explosifs posés par les insurgés.

Chose rare : le 29 septembre, l’Unama avait, cette fois-ci, vivement condamné la frappe aérienne américaine perpétrée contre une maison dans la province du Nangarhar, à l’est du pays, qui a tué quinze villageois et blessé le même nombre de personnes, dont des enfants. Ces civils, connus pour leur soutien au gouvernement de Kaboul, s’étaient réunis pour célébrer le retour d’un chef tribal local de La Mecque et dormaient au moment de lafrappe.Les Etats-Unis ont admis avoir ordonné le tir et indiqué qu’une enquête était en cours.

L’ONU s’était déjà alarmée, en juillet, « du nombre record » de morts et blessés civils au premier semestre. Avec 1 601 morts et 3 565 blessés, le bilan était en hausse de 4 % par rapport à la même période en 2015. Les chiffres retenus, qualifiés de « sous-estimés » par l’ONU, sont les plus élevés depuis le début de ce comptage en 2009. Depuis cette date, les pertes civiles étaient, au 30 juin, de 23 000 morts et de 41 000 blessés.