Les deux candidats à la vice-présidence américaine, le républicain Mike Pence (à gauche, le 21 septembre) et le démocrate Tim Kaine (à droite, le 27 juillet). | MANDEL NGAN,SAUL LOEB / AFP

Le premier a longtemps été un élu de la Chambre des représentants, le second siège au Sénat. Le premier est actuellement gouverneur de l’Indiana, le second a occupé cette fonction en Virginie. Les deux candidats à la vice-présidence, le républicain Mike Pence et le démocrate Tim Kaine, doivent s’affronter pour la première et dernière fois mardi 4 octobre au soir, au cours d’un débat que le site Politico décrit comme « un rare moment sensé » de la campagne, et ils ont plus d’un point commun.

Ils recueillent par exemple le même nombre d’avis favorables (40 %), le même nombre d’avis défavorables (31 %) et un taux équivalent de sans opinion (17 %) dans le sondage publié lundi 3 octobre par la chaîne d’information continue CNN. Petite humiliation également partagée, selon la même étude : un peu plus d’un électeur sur dix avoue n’avoir jamais entendu parler d’eux près de trois mois après leur désignation.

La tâche de colistier n’est jamais simple dans une élection présidentielle américaine, mais s’y ajoute en 2016 une extrême polarisation autour des deux principaux candidats mal aimés, le républicain Donald Trump et la démocrate Hillary Clinton. Depuis leur intronisation en juillet par les conventions de Cleveland et de Philadelphie, les deux hommes tentent pourtant de répondre aux objectifs qui leur ont été assignés.

Rôle pacificateur

Le chrétien conservateur Mike Pence a été élevé comme catholique avant de se convertir au protestantisme évangélique. Ancien animateur radio qui se présente comme « la version décaféinée de Rush Limbaugh », le tribun des ondes conservatrices, il a pour mission principale de rassurer la droite religieuse, qui peut être troublée par les prises de position parfois déroutantes du magnat de l’immobilier. Cette dernière n’a pas oublié les combats de M. Pence contre l’avortement, la recherche sur les cellules-souches ou le mariage homosexuel, invariablement au nom de la liberté religieuse qui, selon lui, doit permettre par exemple à un commerçant de refuser de servir un couple de même sexe au nom de sa foi. C’est d’ailleurs auprès de cet électorat que le gouverneur de l’Indiana recueille ses soutiens les plus élevés (65 % dans le sondage de CNN).

Mais le gouverneur, qui se définit invariablement comme « un chrétien, un conservateur et un républicain, dans cet ordre », ne parvient pas toujours à vaincre les résistances. Il a ainsi plaidé vainement en faveur de M. Trump auprès de Michael Farris, le responsable de la Home School Legal Defense Association. Cette dernière milite pour que les enfants soient retirés du système scolaire afin que leurs parents prennent en charge leur éducation. M. Farris, qui doute ouvertement des lettres de créances conservatrices de M. Trump, a demandé à plusieurs reprises qu’il se retire au profit de M. Pence. Le président de la Southern Baptist Ethics and Religious Liberty Commission, Russell Moore, qui a qualifié dans un entretien au New York Times M. Trump de « conservateur à la Howard Stern », l’animateur radio réputé pour ses frasques à caractère sexuel, a suggéré la même manœuvre.

D’une loyauté sans faille vis-à-vis d’un candidat dont il ne partage pas le style et certaines obsessions, l’austère gouverneur de l’Indiana a également un rôle pacificateur par rapport au Congrès, compte tenu de la méfiance que M. Trump a longtemps inspirée au Sénat comme à la Chambre. Faute de soutien actif de la part des dirigeants du Grand Old Party, M. Pence doit également se démultiplier sur le terrain.

Equipe rodée

Il en va autrement pour Tim Kaine, qui a été intégré à une équipe parfaitement rodée et qui suit un plan de campagne millimétré. Mme Clinton bénéficie en effet du soutien actif de tout ce que sa formation compte de talents, à commencer par le président, Barack Obama, le vice-président, Joe Biden, l’épouse du président, Michelle Obama, ou les figures de l’aile gauche démocrate, jusqu’au sénateur indépendant du Vermont Bernie Sanders.

Ancien maire de Richmond et ancien gouverneur de Virginie, M. Kaine doit permettre aux démocrates de conserver cet Etat, une ancienne terre républicaine, pour tenir à distance M. Trump. En contrepoint de la protestante Mme Clinton, une méthodiste, il peut jouer de sa foi catholique, de sa maîtrise de l’espagnol et d’une expérience humanitaire au Salvador, dans le cadre d’une mission de jésuites, pour s’adresser à une communauté latino qui vote peu, mais qui peut permettre au camp démocrate de conserver des Etats comme le Colorado et le Nevada, pour ne pas parler de la très stratégique Floride.

Personnalité enjouée appréciée par ses adversaires républicains du Sénat, M. Kaine, qui fait régulièrement campagne avec sa femme, Anne Holton, ancienne secrétaire à l’éducation de Virginie, instille enfin dans la campagne démocrate la chaleur et la spontanéité qui fait notoirement défaut à Hillary Clinton.