Xavier Bertrand à Calais en février. | PHILIPPE HUGUEN / AFP

Il y a les mots et les actes, aime répéter Xavier Bertrand. Le président Les Républicains (LR) des Hauts-de-France a-t-il parlé trop vite, il y a un an, lorsqu’il s’est engagé à remettre sur le chemin de l’emploi 60 000 chômeurs dès septembre 2016 ?

Lundi matin, il est venu rendre des comptes aux 6 millions d’habitants de la troisième région de France : « L’objectif n’est pas atteint à 100 % », a-t-il reconnu. « En campagne électorale, on se voit plus beau et plus fort, a-t-il lâché aux journalistes. Mais la politique, c’est 10 % d’idées et 90 % de mise en œuvre. »

Le candidat Bertrand, celui qui a fait campagne sur « Notre région au travail », a partiellement échoué. Depuis janvier, près de 230 000 personnes ont retrouvé un emploi dans le Nord-Pas-de-Calais-Picardie, dont 50 522 avec l’aide du conseil régional. « C’était impossible de redonner du travail à 60 000 chômeurs en huit mois, estime le conseiller régional Philippe Eymery (Front national). D’après nos calculs, il n’y a eu que 991 créations d’emplois. Je suis révolté par le cynisme et le mensonge de Xavier Bertrand. » Le Front national, seule opposition représentée dans l’hémicycle, dénonce les opérations de communication du président Bertrand.

Au-dessus de la mêlée

Une communication omniprésente depuis son élection, le 13 décembre. L’ancien ministre de la santé de Dominique de Villepin, puis du travail avec François Fillon, a abandonné la cravate pour une éternelle chemise blanche au col ouvert et un sombre costume. Son bureau, c’est sa voiture. L’ancien assureur avale des milliers de kilomètres chaque mois pour être sur le terrain, « à portée d’engueulades ».

Aux côtés des salariés de la Française de mécanique à Douvrin, en débat avec des jeunes en formation à Beauvais, ou à la fête de la chasse à Compiègne, l’ancien secrétaire général de l’UMP a choisi d’incarner l’élu de terrain proche des gens. « A Paris, ils sont tous obnubilés par la primaire, confie-t-il à ses proches. Ils pensent que je suis devenu dépressif. Non, je suis un optimiste, mais il y a le danger FN. Et beaucoup d’électeurs rejettent la politique. » Pour redonner confiance aux Nordistes, ce Picard venu du monde de l’entreprise consacre 80 % de son agenda aux activités économiques. Ce statut de « maire de la nouvelle grande région » lui permet de voler au-dessus de la mêlée du parti Les Républicains.

D’ailleurs, il n’a toujours pas annoncé son soutien pour les primaires. En attendant les débats, il lit les ouvrages politiques des candidats à droite. Et ironise au sujet des propos de Nicolas Sarkozy, le qualifiant de « méchant » dans le livre de Patrick Buisson. « Si c’est vrai, c’est l’un des trucs les moins méchants que Sarkozy ait dits sur moi. »

A 51 ans, l’ancien maire de Saint-Quentin (Aisne) a passé l’âge de polémiquer. Il ne veut plus que les migrants à Calais ou les chiffres de l’emploi deviennent des sujets politiciens. Malgré son style sec, parfois cassant, il sait distribuer les bons points aux services de l’Etat, et même à François Hollande quand des dossiers avancent.

Depuis la campagne des régionales qui l’a « transformé », dit-il, il n’a plus qu’un mot à la bouche : l’emploi. Et pour ça, il est prêt à tout. Plateforme Proch’Emploi, aide à l’embauche pour les TPE et PME, aide au transport pour les salariés qui habitent à plus de 30 km de leur lieu de travail, avances remboursables versées aux entreprises : les dispositifs se multiplient au conseil régional. Pour quels résultats ? Quelques bonnes nouvelles économiques (création de 250 emplois par l’industriel aéronautique Safran dans le Valenciennois), mais aussi des échecs (fermeture d’Akers à Berlaimont). « Xavier Bertrand est un peu partout, il s’exprime, ce que ne faisait pas assez Daniel Percheron [son prédécesseur socialiste], estime Pierre de Saintignon, le candidat PS aux dernières régionales. Après, il faudra regarder les résultats. »

L’annonce attendue cette semaine de l’implantation d’un entrepôt géant d’Amazon près d’Amiens et son millier d’emplois espérés ne suffiront pas à effacer le triste chiffre de 385 000 chômeurs de catégorie A (sans aucune activité). Selon l’INSEE, les Hauts-de-France est la région la plus touchée par le chômage avec 12,3 %.