Le démocrate Tim Kaine et le républicain Mike Pence, le 4 octobre à Farmville en Virginie, à l’occasion du débat entre les vice-présidents. | JONATHAN ERNST / REUTERS

Les républicains, troublés par le style et le manque de constance de leur candidat à l’élection présidentielle, Donald Trump, ont sans doute soufflé, au terme du débat qui opposait, mardi soir 4 octobre, à la Longwood University, en Virginie, le colistier du milliardaire, Mike Pence, à Tim Kaine, celui de son adversaire démocrate Hillary Clinton. Ils ont en effet retrouvé avec le premier le calme et la solidité doctrinale d’un conservateur on ne peut plus orthodoxe, prompt à dénoncer un Etat inefficace, à défendre une politique étrangère musculeuse et des valeurs morales qui commencent par l’opposition à l’avortement.

A cinq jours du deuxième débat prévu entre la candidate démocrate et son adversaire (dimanche 9 octobre), l’opposition entre leurs deux colistiers a été le parfait contraire de leur première confrontation. Chargé manifestement d’instruire le procès du milliardaire, le sénateur de Virginie Tim Kaine, réputé affable, a fait preuve, pratiquement tout au long du débat, d’une agressivité qui l’a desservi. Ses interruptions systématiques du gouverneur de l’Indiana, qui n’a cessé de lui opposer une impavidité tout aussi préparée, ont rappelé celles de M. Trump le 26 septembre, qui n’avaient pas peu contribué à sa mauvaise performance.

M. Kaine avait pour stratégie de sommer M. Pence, tout au long des quatre-vingt-dix minutes du débat, de défendre les propos les plus controversés de M. Trump, qu’il s’agisse de ses déclarations outrancières sur les immigrants mexicains ou les femmes, de son refus de publier ses déclarations de revenus, de son indifférence vis-à-vis de la prolifération nucléaire, ou de son jugement porté sur Vladimir Poutine. « Il a son Mont Rushmore personnel, avec Vladimir Poutine, Kim Jong-un, Mouammar Kadhafi et Saddam Hussein », a raillé M. Kaine, accusant ses adversaires de confondre leadership et dictature.

Positions fluctuantes

Mais M. Pence s’est gardé de se laisser prendre au piège. Mieux que le magnat de l’immobilier, il a su répliquer en contre-attaquant sur le bilan de l’administration démocrate, après deux mandats consécutifs. « Vous pouvez tourner les chiffres comme vous voulez, les gens souffrent », a-t-il assuré, avant de se présenter comme un candidat du changement, alors que « Hillary Clinton et Tim Kaine veulent que les choses restent les mêmes ». Contrairement à M. Trump, il a exploité avec plus d’efficacité les faiblesses de Mme Clinton, qu’il s’agisse de l’utilisation d’un serveur privé pendant ses années passées à la tête du département d’Etat, ou bien des liens entretenus à la même période avec la fondation créée par son mari, l’ancien président Bill Clinton.

A de nombreuses reprises, cependant, le gouverneur de l’Indiana a baissé la garde en évitant, face à l’insistance de M. Kaine, de défendre certaines positions tenues par M. Trump, sur la prolifération nucléaire ou bien sur le sort des millions de sans-papiers sans casier judiciaire – que M. Trump a menacés d’expulsion. Plus curieusement, il s’est même démarqué des positions certes souvent fluctuantes du milliardaire, notamment sur la politique étrangère, en revenant à un interventionnisme plus conforme avec la tradition républicaine. Notamment vis-à-vis de la Russie, alors que M. Trump laisse entendre que les Etats-Unis auraient tout intérêt à trouver un terrain d’entendre avec ses dirigeants. Au risque de faire apparaître que le ticket républicain, sur le style comme sur le fond, campe inconfortablement sur deux lignes pas tout à fait identiques.