Sur le site d’Alstom à Belfort, le 4 octobre. | SEBASTIEN BOZON / AFP

Un séisme. Les rumeurs d’une restructuration massive avaient filtré mais son ampleur a surpris. Pour la ville, le coup est dur. Une icône industrielle, fondée à la fin du XIXe siècle, va fermer les portes de ses usines. Le ministre de l’industrie monte au créneau et somme l’entreprise de s’expliquer. Nous ne sommes pas à Belfort, mais à Boras, au sud-ouest de la Suède. Et il ne s’agit pas de relocaliser 500 personnes, mais d’en licencier 3 000. Mardi 4 octobre, le groupe Ericsson, leader mondial des équipements de téléphonie mobile, a annoncé la suppression de 20 % de ses effectifs en Suède. Cela touchera surtout ses derniers sites industriels, de Boras et de Kumla, et des services administratifs.

Face au déclin de son chiffre d’affaires et à l’attentisme de ses clients, les opérateurs de télécommunication, Ericsson a tranché dans le vif. En juillet, son PDG a été débarqué par le conseil d’administration et son successeur a promis un plan d’économie de plus d’un milliard d’euros par an. Avec en ligne de mire les usines. Comme l’ensemble de ses concurrents, la firme met le cap sur les logiciels et les services où se situe l’essentiel de la valeur ajoutée du métier. Comme l’avait annoncé il y a plus de dix ans un certain Serge Tchuruk, alors PDG d’Alcatel, l’avenir du métier est dans le « fabless », les industries sans usines. Conspué à l’époque, et encore aujourd’hui, il avait pourtant raison. Le principal adversaire mondial d’Ericsson, le chinois Huawei, ne dispose d’aucune usine.

Qu’a fait Mikael Damberg, le ministre suédois de l’industrie ? Conseillé par le gouvernement français, il aurait certainement décrété un plan d’équipement de la Laponie orientale en réseau de téléphonie mobile haut débit de cinquième génération et commandé en avance le matériel pour sauver le site de Boras. Malheureusement dépourvu du génie français, il s’est contenté de nommer des coordinateurs pour trouver des solutions aux employés des sites concernés.

Dynamisme entrepreneurial

Et les solutions ne manquent pas. D’abord, Ericsson a indiqué dans le même temps qu’il allait embaucher près de mille personnes dans ses laboratoires de recherche. Ensuite, il peut compter sur le dynamisme entrepreneurial du pays. La croissance devrait cette année atteindre les 3,5 %, après une hausse de 4,2 % en 2015. Le taux de chômage est descendu sous les 7 % et poursuit sa baisse. Déjà, le pays accueille en masse des ingénieurs indiens pour pallier les manques actuels. A Boras aussi, la ville compte bien amortir le choc avec son institut de recherche technologique, le plus important de Suède, et ses centres logistiques. H&M y a implanté le siège mondial de ses activités Internet.

Le problème de la Suède n’est pas de sauver des symboles industriels des siècles précédents mais, comme le dit son ministre, d’améliorer encore le système éducatif pour qu’il s’adapte aux besoins en compétences qui émergent, notamment dans le numérique. C’est cela un Etat stratège.