Pierre Pelouzet, le médiateur des entreprises, est chargé de résoudre les différends entre entreprises, mais aussi de pacifier les relations entre le privé et les administrations publiques. | ERIC PIERMONT / AFP

Un sous-traitant aéronautique confronté à une brutale rupture de contrat de la part de son grand donneur d’ordre, un artisan menuisier dans l’impossibilité de faire réparer son utilitaire en raison d’une pièce manquante chez le constructeur, un fabricant de boîtes aux lettres victime d’un impayé d’un fournisseur étranger… Autant de cas que la médiation des entreprises, placée auprès du ministre de l’économie, Michel Sapin, s’emploie à résoudre. « Nous devrions arriver à un millier de saisines en 2016, contre 800 l’an dernier, pour un taux de réussite de 75 % », indique Pierre Pelouzet, le médiateur des entreprises, qui devait présenter un bilan d’étape, jeudi 6 octobre.

Depuis janvier, M. Pelouzet possède une double casquette : outre les différends entre entreprises, il s’occupe également de pacifier les relations entre le privé et les administrations publiques. Connues pour leurs mauvaises pratiques, notamment en termes de délais de paiement, ces dernières sont impliquées dans plus d’un tiers des saisines. « Nous agissons sur tout ce qui crée de la défiance entre acteurs économiques : délais de paiement, rupture de contrats, pénalités abusives… Confronté à ce type de situation, un patron de PME, même s’il a un carnet de commandes rempli, arrête souvent d’investir et d’embaucher », note M. Pelouzet.

Les cas que traitent les 60 médiateurs délégués opposent en effet des TPE-PME (88 % des saisines) à leurs grands donneurs d’ordre, multinationales ou administrations. Mais les choses évoluent, veut croire le médiateur. Et pas seulement à coups d’amendes – portées, depuis fin 2015, d’un maximum de 375 000 à 2 millions d’euros en cas de retard de paiement – ou d’actions coups de poing – la Direction générale de la concurrence (DGCCRF) publie désormais les noms des mauvais payeurs.

Embellie

M. Pelouzet assure ainsi :

« Mettre les gens autour d’une table est primordial : quand votre interlocuteur prend conscience qu’une facture en retard ou une clause contractuelle aberrante, ce sont des ouvriers non payés, les comportements changent. »

En matière de délais de paiement, le début d’année a marqué une embellie : ils atteignaient 12,2 jours au deuxième trimestre 2016, contre 13,6 jours un an plus tôt, selon le cabinet Altares. Mais sans surprise, les TPE-PME restent les plus fragiles. Et l’éclaircie économique que connaît l’Hexagone ne joue qu’à la marge. « En France, les rapports entre grandes et petites entreprises sont structurels. Et ce ne sont pas forcément ceux qui vont le mieux qui paient le mieux ! », précise-t-il.

Pour aller plus loin, la médiation des entreprises a commencé à ouvrir au secteur public (les Hauts-de-Seine, région Centre…) sa « charte relations fournisseurs » signée par plus de 1 600 entreprises depuis 2012. M. Pelouzet s’attaque aussi au crédit d’impôt recherche (CIR), grand succès français.

« Près de 10 % de nos médiations concernent des patrons à qui l’on a refusé un CIR ou, pire, qui font l’objet d’un redressement fiscal. »

La médiation a donc lancé un audit des cabinets de conseil qui épaulent les PME sur le sujet ; 26 d’entre eux sont désormais référencés, et autant devrait l’être. A terme, la quasi-totalité des sommes de CIR attribuées aux PME devrait être encadrée, soit 2 à 3 milliards d’euros sur les 5,5 milliards accordés dans ce cadre aux entreprises en 2013.