Deux jours après la révélation, par l’agence de presse Reuters, que Yahoo! avait mis en place un système de surveillance de masse des courriels échangés par ses utilisateurs, le New York Times révèle plusieurs détails sur la manière dont ce programme fonctionnait. Selon le quotidien américain, l’entreprise a modifié son service de filtre antispam – également utilisé pour détecter la pornographie infantile – pour qu’il soit capable de détecter certaines « signatures numériques » (des mots-clés), et transmette les messages ainsi détectés au FBI, la police fédérale américaine.

Selon le FBI, des enquêteurs ont fait cette demande après avoir découvert que des membres d’un groupe terroriste, non identifié à ce stade, utilisaient les services de Yahoo! pour communiquer, utilisant une méthode qui nécessitait un élément d’identification « largement unique ». Les enquêteurs affirment qu’ils ne savaient pas quelles boîtes e-mails étaient utilisées pour ces échanges, raison pour laquelle ils ont demandé à Yahoo! de mettre en place ce système de surveillance de masse.

Toujours selon le New York Times, la demande du FBI, validée par un tribunal secret, était accompagnée d’une interdiction, pour Yahoo!, de révéler l’existence de ce système de filtre.

Protestations en Europe

En Europe, la Commission à la protection des données privées – l’équivalent irlandais de la CNIL –, en charge du contrôle de Yahoo! pour l’Europe, a annoncé qu’elle avait ouvert une enquête pour déterminer si des citoyens européens avaient été indûment mis sous surveillance. « Toute forme de surveillance de masse violant les droits fondamentaux de citoyens européens serait une cause de grave inquiétude », a dit la Commission.

Plusieurs élus européens, dont l’Allemand Fabio de Masi (Die Linke), ont demandé à la Commission européenne de demander des explications aux autorités américaines. La révélation de cette affaire intervient quelques mois après l’adoption de l’accord dit « Privacy Shield », qui encadre les transferts de données personnelles entre les Etats-Unis et l’Europe, et qui interdit théoriquement toute forme de surveillance de masse. Mais les adversaires de ce texte dénoncent l’absence de garanties concrètes proposées par les Etats-Unis sur ce point, malgré la possibilité, introduite par l’accord, de porter plainte aux Etats-Unis pour les citoyens européens victimes d’abus de surveillance.