L’entrée de la Cour de cassation, le 16 juillet 2014, à Paris. | MARTIN BUREAU / AFP

La Cour de cassation a renvoyé l’affaire des suicides à France Télécom devant la chambre de l’instruction, en lui demandant d’examiner les liens entre les deux anciens cadres poursuivis et les victimes ; une décision qui retarde la perspective d’un renvoi en procès, a appris l’Agence France-Presse (AFP), mardi 11 octobre, de sources concordantes.

Alors que les juges d’instruction avaient terminé leurs investigations à la fin de 2014, le parquet de Paris avait pris le 22 juin ses réquisitions de renvoi en procès, visant notamment l’entreprise et son ancien PDG, Didier Lombard. Mais deux anciens cadres, poursuivis pour complicité de harcèlement moral, ont contesté leur mise en examen en affirmant que certaines des trente-neuf victimes mentionnées dans le dossier ne relevaient pas de leur autorité hiérarchique ou de leur service. Le 5 février, la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris avait rejeté leur demande.

C’est cette décision qui a été cassée par la Cour de cassation ce mardi. Selon l’arrêt, consulté par l’AFP, la plus haute juridiction estime qu’« une personne ne peut être mise en examen » pour complicité de harcèlement moral « qu’à l’égard d’une ou de plusieurs personnes déterminées ». Elle ajoute que la chambre de l’instruction « devait rechercher (…) s’il existait à l’encontre des mis en examen des indices graves ou concordants d’avoir été complices d’un harcèlement moral à l’égard » de chacune des victimes visées. Elle a donc renvoyé l’affaire devant une chambre de l’instruction composée d’autres magistrats, toujours à Paris.

« Créer un climat anxiogène »

Me Patrick Maisonneuve, l’avocat de l’un des deux cadres poursuivis, estime que « la position du parquet de Paris et des magistrats sur un harcèlement moral général et institutionnel est mise à mal ». « La Cour de cassation vient de rappeler qu’il faut établir un lien de causalité direct entre le comportement de celui qu’on présente comme le “harceleur” et la victime », a-t-il ajouté.

Dans ses réquisitions, le parquet de Paris a pointé une politique d’entreprise délibérée, à partir de 2007, pour « créer un climat anxiogène et la déstabilisation des personnels dans le but de donner envie de partir », sans recourir aux méthodes légales et habituelles.

Le parquet demande le renvoi en procès pour harcèlement moral de France Télécom, de son ex-patron Didier Lombard et de deux autres dirigeants, ainsi que de quatre cadres pour complicité.