Mohamed Baala, série « The time in my brain »  Courtesy Galerie127, Marrakech18 pages d’un livre d’histoire portant sur le colonialisme avec intervention au feutre, découpage et collage. | DR

Décidément, l’Afrique est en vogue auprès des organisateurs de salons d’art. Collant à l’événement que constitue la prestigieuse FIAC, organisée du 20 au 23 octobre au Grand-Palais, la foire off Young International Artists (YIA) orchestre un focus africain au Carreau du Temple, sous le parrainage de l’artiste marocain Mounir Fatmi. Ce salon dédié à la jeune création a choisi d’inviter des galeries du continent, comme la Tunisienne Aïcha Gorgi, l’Atelier 21 de Casablanca ou le Cube de Rabat.

Romain Tichit, directeur de l’événement, confie avoir eu l’idée de ce coup de projecteur après avoir visité la Biennale de Marrakech, en janvier : « J’ai découvert un paysage pluridisciplinaire plein de promesses, mais qui reste trop confidentiel en Europe. Il ne s’agit pas ici d’aider une scène, mais de la montrer, de lui laisser la place d’exister. C’est un exercice assez délicat, car le marché africain est en pleine structuration et il peut y avoir des abus. »

Pour Mounir Fatmi, qui organise pour l’occasion une exposition itinérante baptisée « Pavillon de l’exil » aux Archives nationales, l’accompagnement de ce projet allait de soi : « On est obligés de compter avec l’Afrique pour avoir une image complète de ce qui se passe dans le monde artistique. On ne peut plus monter d’exposition internationale sans avoir la vision de l’artiste africain. On ne peut plus prétendre, en tant qu’amateur averti, posséder une collection internationale sans avoir des œuvres d’artistes africains. C’est un fait. »

« D’autres visions du monde »

Un fait que d’autres organisateurs de salon ont bien compris. La galerie Zürcher qui organise pendant la FIAC une toute petite foire off baptisée « Salon Zürcher », compte lancer sur le même principe le « Salon Zürcher Africa » au moment de la foire Art Paris en avril 2017, et à New York pendant la foire 1:54 en mai 2017. D’après nos informations, ce microévénement qui devrait compter une demi-douzaine de participants aurait déjà obtenu l’adhésion de la galerie Sitor Senghor. Art Paris, qui a prévu d’organiser son focus sur l’Afrique sous la houlette de la commissaire d’exposition Marie-Ann Yemsi, n’est guère émue par cette concurrence. « L’imitation est la meilleure forme de flatterie », réplique Guillaume Piens, directeur d’Art Paris, qui a déjà fait le plein de sa section Afrique avec de bonnes galeries comme Magnin, Tiwani ou Mariane Ibrahim. Même son de cloche du côté de Touria Al-Glaoui, fondatrice de 1:54 : « Je me réjouis que notre foire donne des idées et l’envie de s’intéresser à la scène africaine, même s’il est difficile pour l’instant de donner un avis, car je n’ai pas d’informations sur ce qui va être présenté. »

A. Al-Montassir, « Résistance Naturelle », Courtesy Le Cube, Rabat. | DR

Reste à voir comment le « Salon Zürcher » parviendra à surnager dans une actualité africaine extrêmement dense au printemps prochain à Paris, entre l’exposition de la collection Jean Pigozzi à la Fondation Louis-Vuitton et la première édition d’Africa Aperta, manifestation pluridisciplinaire à La Villette, en passant par l’exposition sur les Arabes et l’Afrique à l’Institut du Monde arabe. Reste aussi à espérer que le soufflé ne retombera pas après cette effervescence soudaine. « Bien sûr, dans deux ans, on parlera davantage d’artistes d’Inde ou d’ailleurs, mais ça, c’est les médias, et tant mieux. Il faut que le public de l’art découvre d’autres sensibilités et d’autres visions du monde, analyse Mounir Fatmi. Pour autant, on ne terminera jamais de découvrir l’Afrique. »

Foire YIA, Focus Afrique, du 20 au 23 octobre, Carreau du Temple, 4, rue Eugène-Spuller, 75003 Paris, www.yia-artfair.com