Les rebelles islamistes somaliens Al-Chabab ont mené, mardi 18 octobre, une offensive contre Afgoye, ville stratégique située à une trentaine de kilomètres au nord-ouest de la capitale, Mogadiscio, tuant au moins dix soldats et civils, avant de se retirer.

L’offensive, qui a duré plusieurs heures, a principalement visé un poste de police, attaqué à l’aide d’une voiture remplie d’explosifs, et des bases militaires de l’armée somalienne. De violents échanges de tirs ont par ailleurs été entendus dans plusieurs quartiers de la ville.

Les Chabab se sont finalement retirés avant l’arrivée de soldats de la force de la Mission de l’Union africaine (Amisom), stationnés à l’extérieur de la ville.

« Quand ils le souhaitent »

« Les terroristes se sont retirés de la ville, la situation est revenue à la normale, et les forces gouvernementales somaliennes ont le plein contrôle, a déclaré à l’AFP Abdukadir Ahmed, un responsable de la police locale. Nous n’avons pas le nombre exact de victimes, mais nous avons jusqu’à présent compté plus d’une dizaine de dépouilles, dont des civils. Il y a également des pertes parmi les assaillants. »

Selon un habitant interrogé par l’AFP, Fadumo Wariri, la plupart des personnes tuées l’ont été dans l’explosion de la voiture piégée : « Plus de dix personnes ont été tuées, principalement des soldats. » L’Amisom a confirmé sur son compte Twitter qu’une voiture piégée avait visé un poste de police, mais que les forces somaliennes avaient tenu leurs positions en attendant l’arrivée de renforts. Les Chabab ont ensuite fui par le nord, incendiant plusieurs maisons dans un village, affirme l’Amisom, qui n’a pas fourni de bilan de cette attaque.

Affiliés à Al-Qaida, les islamistes chabab ont de leur côté soutenu dans un communiqué avoir tué 35 soldats somaliens, et assurent avoir saisi une grande quantité de matériel militaire dans les bases attaquées. Il était toutefois impossible de dire dans l’immédiat si le véritable but des Chabab était de mettre la main sur de l’armement ou, comme ils l’ont affirmé dans leur communiqué, s’ils souhaitaient démontrer qu’ils sont « capables d’attaquer des bases ennemies quand ils le souhaitent », même en plein jour.

L’attaque, menée à quelques dizaines de kilomètres seulement de la capitale somalienne, met une nouvelle fois en évidence la fragilité du pays à quelques semaines d’un processus électoral censé conférer un peu plus de stabilité à cet état de la Corne de l’Afrique, après un quart de siècle de guerre civile.

Fragilité du gouvernement central

Afgoye constitue un carrefour stratégique vers le nord, l’ouest et le sud somaliens. Les Chabab avaient été chassés de cette ville en mai 2012 par l’armée somalienne et l’Amisom. Ces dernières années, la ville a été plusieurs fois la cible d’attaques du groupe islamiste.

« Les combattants chabab ont quitté le poste de police et les autres lieux qu’ils avaient pris cet après-midi », a témoigné auprès de l’AFP un habitant d’Afgoye, Abdirisak Isgowe, selon lequel des soldats somaliens et de l’Amisom ont depuis lors été vus dans plusieurs quartiers de la ville : « Il y a des cadavres, j’en ai vu onze dans notre quartier. » Un autre habitant, Amin Moalim, a assuré que l’attaque avait surpris la population. « Les gens sont déboussolés », avait-il dit alors que l’offensive était encore en cours. « Ils se cachent dans leurs maisons et ceux qui se trouvaient à l’extérieur se sont enfuis. »

Confrontés à la puissance de feu supérieure de l’Amisom, déployée en 2007, les Chabab ont été chassés de la capitale Mogadiscio en août 2011, et ont ensuite perdu l’essentiel de leurs bastions, dont Afgoye.

Mais ils contrôlent toujours de vastes zones rurales d’où ils mènent des opérations de guérilla et des attentats-suicides, souvent jusque dans la capitale ou contre des bases de l’Amisom, profitant de la fragilité du gouvernement central et de l’apathie de la force internationale.

Malgré cette menace constante du groupe Al-Chabab, qui multiplie les attentats depuis le début de l’année, la Somalie doit organiser des éléctions générales, prévues initialement en août, et déjà repoussées par deux fois. Près de 14 000 délégués sont appelés à voter pour désigner les députés qui siégeront l’Assemblée nationale du pays, tandis que les Etats fédérés doivent désigner les futurs sénateurs de la Chambre haute. Les deux Assemblées sont censées se réunir le 30 novembre pour élire le président de la République fédérale de Somalie.