Une cinquantaine d’organisations américaines de défense des libertés civiles ont exprimé, mardi 18 octobre, leur « profonde inquiétude » concernant l’usage des technologies de reconnaissance faciale par la police et le FBI. Dans une lettre commune adressée au ministère de la justice, ces organisations, parmi lesquelles la puissante American Civil Liberties Union (ACLU) ou encore Amnesty International USA, demandent des enquêtes sur les pratiques des polices locales qui ont recours à ce type de logiciel.

« Les technologies de reconnaissance faciale sont de plus en plus utilisées dans le cadre d’activités policières courantes, avec un impact potentiel sur toutes les juridictions américaines. Et pourtant, les garde-fous pour s’assurer que cette technologie est utilisée avec responsabilité semblent quasiment inexistants. »

Les inquiétudes de cette coalition reposent notamment sur une étude menée par le Center of privacy and technology de l’université de Georgetown Law, et publiée le même jour. On y apprend que la moitié des Américains adultes auraient fait l’objet d’une reconnaissance faciale de la part des autorités, pour des raisons extrêmement variées, allant de la vérification d’identité d’une personne arrêtée à l’analyse en temps réel de piétons filmés par une caméra de surveillance.

Des technologies « biaisées »

L’ACLU avait par exemple révélé la semaine dernière que la police de Baltimore avait utilisé ce type de logiciel sur des images issues des réseaux sociaux, pour identifier les personnes ayant participé au mouvement de protestation ayant suivi la mort de Freddie Gray, un jeune homme noir tué par un policier en avril 2015.

Les organisations de défense des libertés civiques redoutent aussi que ces « puissants » sytèmes de reconnaissance faciale soient aussi « biaisés », au détriment des Afro-Américains. Elles s’appuient pour cela sur une étude de 2012, cosignée par un expert du FBI, qui affirme que ces logiciels sont 5 % à 10 % moins précis quand il s’agit d’analyser des personnes noires que des personnes blanches. « Ces inexactitudes augmentent le risque que, sans garde-fous appropriés, des Afro-américains innocents soient placés par erreur sur des listes de suspects, ou fassent l’objet d’une enquête pour un crime, uniquement parce qu’un algorithme faillible n’a pas su identifier le bon suspect », préviennent les organisations. Cette étude soulignait aussi que ces logiciels perdent en précision quand ils analysent le visage de femmes ou d’enfants.

« La reconnaissance faciale a d’énormes conséquences sur les libertés civiles et doit être examinée de près pour s’assurer qu’elle ne violent par les droits civiques des Américains », plaide cette coalition.