Justin Trudeau le 24 août à Ottawa. | CHRIS WATTIE / REUTERS

Il avait promis beaucoup aux Canadiens, mais surtout de leur redonner du rêve. Un an après son élection, la popularité de Justin Trudeau demeure intacte, et même meilleure que le 19 octobre 2015, puisque 65 % d’entre eux approuvent sa façon de gouverner. Même au Québec, toujours moins enclin à « aimer » un premier ministre fédéral, celui-ci compte 68 % de satisfaits. Du jamais vu ! Les seuls « couacs » résident dans la lutte contre le changement climatique et dans les rapports du premier ministre avec les gouvernements provinciaux et les autochtones.

Son charme naturel et son style rafraîchissant (qui en ont fait l’un des leaders les plus « glamour » au monde) jouent toujours leur rôle quant à la sympathie qu’il inspire aux Canadiens. Très présent sur le terrain, de Montréal à Vancouver, dans un amphithéâtre ou dans la rue, M. Trudeau a gardé sa réputation d’homme ouvert et accessible, posant pour des selfies à répétition.

Mesures progressistes et rayonnement international

Bien qu’il soit passé maître dans l’art de la consultation tous azimuts, pour, dit-il, mieux élaborer ses politiques, certains observateurs se demandent s’il ne cherche pas plutôt à gagner du temps sur des dossiers difficiles. Toujours est-il qu’un quart de la centaine de promesses du « programme positif, ambitieux et plein d’espoir », annoncé en campagne électorale, a déjà été tenu. Parmi ces réalisations figure celle de ce « féministe » affiché : avoir nommé autant de femmes que d’hommes au sein du gouvernement.

Dès son premier budget printanier, il a mis en avant des mesures fiscales progressistes : allocation pour enfants, réduction des impôts pour la classe moyenne et hausse pour les plus riches, programme d’infrastructures, doté de 120 milliards de dollars canadiens sur dix ans, pour relancer une économie déprimée par la chute des prix des matières premières.

Sur la scène internationale, il avait promis d’améliorer l’image de son pays, fortement ternie sous la gouverne du conservateur Stephen Harper. « Le Canada est de retour », avait lancé M. Trudeau peu après son élection, insistant sur sa volonté de voir son pays redevenir un membre « actif et constructif » de l’ONU. Il n’a pas tardé à en donner des preuves : lors de la COP 21 à Paris, fin 2015, il indiquait que le Canada ratifierait l’Accord sur la lutte contre le changement climatique, ce qui fut fait le 5 octobre dernier. Promesses tenues aussi pour l’accueil de 31 000 réfugiés syriens au Canada ; le retrait de chasseurs-bombardiers d’Irak, compensé par un triplement des forces canadiennes déployées dans ce pays ; et l’annonce, en août dernier, du déblocage de 450 millions de dollars supplémentaires pour appuyer les missions de paix de l’ONU.

Quelques points de tension

Au Canada, certains s’impatientent cependant de voir traîner certains dossiers, comme la légalisation de l’aide à mourir, celle de la consommation de marijuana à des fins récréatives et la mise en œuvre de l’Accord économique et commercial global avec l’Union européenne, en discussion depuis de longues années. Mais sur ce point, « l’équipe Trudeau » n’a pas lésiné sur les efforts de persuasion en Europe.

La grogne gagne aussi les premiers ministres des provinces et territoires. Premier accroc lors de l’annonce récente d’une taxe carbone nationale par M. Trudeau, faisant fi de discussions en cours avec eux sur le contenu du plan canadien de lutte contre le changement climatique attendu pour la fin d’année. Le ton a encore monté cette semaine à propos du niveau des fonds qu’Ottawa verse aux provinces pour les dépenses de santé, insuffisant selon elles, et sur le droit de regard qu’Ottawa souhaite garder quant à leur utilisation.

Les groupes autochtones commencent également à déchanter. L’enquête nationale sur plus de 1 200 femmes autochtones disparues et assassinées depuis trente ans n’a été mise en branle que le 1er septembre et ne rendra son rapport que fin 2018. Le plan Trudeau visant à améliorer le sort des autochtones vivant dans des conditions précaires, de logement, notamment, n’en est par ailleurs qu’au stade préliminaire d’application.

Les écologistes canadiens semblent les plus ambivalents vis-à-vis de M. Trudeau : d’un côté, celui-ci clame que la lutte contre le changement climatique est sa priorité ; de l’autre, il n’a pas changé la cible fixée par M. Harper pour une réduction (timide) de 30 %, par rapport à 2005, des émissions de gaz à effet de serre (GES) d’ici à 2030. D’un côté, il annonce une taxe carbone pour 2018 ; de l’autre, il autorise un vaste projet de transport de gaz liquéfié dans l’Ouest canadien, avec 6,5 millions à 8,7 millions de tonnes de GES par an à la clé…