Les avions de campagne de Donald Trump et Hillary Clinton à Las Vegas, mardi 18 octobre 2016. | LUCY NICHOLSON / REUTERS

A vingt jours de l’élection présidentielle américaine du 8 novembre, Hillary Clinton et Donald Trump vont débattre, mercredi 19 octobre. Leur troisième et dernier face-à-face, à l’université du Nevada à Las Vegas, commencera à 21 heures (heure de la côte Est, soit 3 heures du matin à Paris) et devrait durer 90 minutes.

Les « petits » candidats, le libertarien Gary Johnson, la Verte Jill Stein ou Evan McMullin – soutenu par des donateurs conservateurs opposés à Donald Trump et présent dans une poignée d’Etats –, qui n’atteignent pas 15 % d’intentions de vote dans les sondages n’ont pas plus été conviés là que pour les précédents débats.

De la dette publique à la fonction présidentielle

Comme lors du premier débat, Donald Trump et Hillary Clinton seront debout sur un plateau derrière des pupitres. Chaque candidat aura deux minutes pour répondre aux questions, puis à celles de son opposant, avant de laisser au présentateur le soin d’aller plus loin.

Le débat sera divisé en six segments de 15 minutes, consacrés à six sujets : la dette publique et les grands programmes sociaux, l’immigration, l’économie, la Cour suprême, les « points chauds » internationaux et l’aptitude à exercer la fonction présidentielle. La Cour suprême vient de faire un retour dans les thèmes de campagne : le sénateur John McCain a juré que les républicains feraient tout pour bloquer n’importe lequel des candidats avancés par Hillary Clinton pour remplacer le juge ultraconservateur Antonin Scalia.

La campagne de Trump sous tension

Ce tête-à-tête se déroule dans un climat difficile pour Donald Trump, désormais en difficulté dans les sondages. Hillary Clinton recueillait, lundi, 45,9 % des intentions de vote, en moyenne, contre 39 % pour Trump et 6 % pour le libertarien Gary Johnson, selon le site d’information politique RealClearPolitics. Il y a quatre ans, à la même date, Barack Obama n’avait que 0,4 point d’avance sur le républicain Mitt Romney.

Depuis le premier débat, le candidat républicain fait face à une série de révélations qui le mettent dans l’embarras, qu’il s’agisse des accusations sur ses impôts et ou de ses commentaires obscènes sur les femmes. Mais, comme si cela ne suffisait pas à lui nuire, le milliardaire multiplie les attaques brouillonnes. Il s’en prend aux membres du Parti républicain qui ont pris leurs distances vis-à-vis de lui.

Samedi, il s’est interrogé sur sa rivale démocrate :

« Je ne sais pas ce qui se passe avec elle : au début de son dernier débat, elle était gonflée à bloc. A la fin, elle pouvait à peine rejoindre sa voiture. Les athlètes doivent passer un contrôle anti-dopage, je pense que nous devrions passer un test anti-dopage avant le débat. Pourquoi pas ? »

Le candidat continue à propager la rumeur que l’élection du 8 novembre est truquée au bénéfice d’Hillary Clinton, exprimer des soupçons sur le déroulement du vote et dénonce l’attitude des médias.

Les arguments des candidats

S’il ne changera pas la manière dont les électeurs votent, ce face-à-face sera la dernière occasion pour Donald Trump de faire « passer son message à des dizaines de millions de téléspectateurs », affirme le Wall Street Journal. C’est justement ce que déplore Michael Cohen, ancienne plume du département d’Etat qui, dans une tribune au Boston Globe, a demandé l’annulation de l’émission qu’il voit comme une tribune offerte à Donald Trump pour propager son discours complotiste.

Mercredi soir, Donald Trump utilisera les atouts qui lui restent pour attaquer son adversaire : son discours anti-establishment, l’attitude de l’ancienne secrétaire d’Etat vis-à-vis de la guerre en Syrie, de l’attaque contre le consulat américain de Benghazi en 2012 ou la publication par WikiLeaks de messages piratés sur la messagerie de John Podesta, le président de l’équipe de campagne de Hillary Clinton.

Donald Trump est annoncé avec deux invités spéciaux, indique le Washington Post : Patricia Smith, la mère d’un Américain tué lors de l’attaque de Benghazi et Malik Obama, le demi-frère de Barack Obama, en rupture de ban, qui soutient le candidat républicain. La dernière fois, pour déstabiliser la candidate, il avait invité des femmes accusant Bill Clinton d’agression sexuelle.

Donald Trump est annoncé avec deux invités suprises : Patricia Smith, la mère d’un Américain tué lors de l’attaque de Benghazi et Malik Obama, le demi-frère de Barack Obama. | JOE RAEDLE / AFP

Estimant que les deux premiers débats ont eu jusqu’à présent un impact positif sur la campagne, les stratèges du camp Clinton ont laissé du temps à l’ancienne secrétaire d’Etat pour se préparer. Mercredi, elle pourrait tourner la page de l’élection et en profiter pour dévoiler ce que serait sa présidence, de jouer l’unification du pays et d’utiliser la carte fournie par Michelle Obama clamant sa révolte en lançant : « Quand eux s’enfoncent, nous on s’élève », face aux dérapages de Trump vis-à-vis des femmes lors d’un discours dans le New Hampshire, affirme le New York Times.

Selon l’entourage de la candidate, Hillary Clinton a prévu de répondre sur l’affaire de la messagerie de son directeur de campagne en soulignant que le piratage portait la signature de Moscou… La démocrate accusant Donald Trump d’être trop accommodant envers le président russe, Vladimir Poutine.

Le modérateur

L’émission sera animée par Chris Wallace (69 ans), journaliste politique animateur de Fox News Sunday, chaîne dont la ligne éditoriale est très conservatrice. S’il est enregistré comme électeur démocrate « par pragmatisme » à Washington D.C., nul doute qu’il sera sans concession avec Hillary Clinton. En septembre 2006, il avait interrogé Bill Clinton, demandant à l’ancien président s’il avait fait assez pour capturer Ousama Ben Laden [4’15″ dans la vidéo].

Journaliste pugnace, il a interrogé Donald Trump sans ménagement, critiquant les chiffres fantaisistes avancés par le candidat lors du débat entre les républicains le 3 mars 2016.

Audiences

Le débat de mercredi est le 23e du cycle électoral de 2016 (en incluant les primaires), note le site d’information Vox, et à ce stade de la campagne, il est illusoire d’espérer des audiences record.

En 2012, 41 millions de personnes avaient suivi le troisième débat entre Barack Obama et Mitt Romney. Quarante-cinq millions de téléspectateurs avaient regardé le deuxième débat Obama-Romney et 46 millions avaient suivi le premier.

Pour l’élection de 2016, les audiences à dépasser sont impressionnantes : 84 millions de téléspectateurs pour le premier débat et 66,5 millions pour le deuxième.

Enfin, ce débat intervient tardivement : le vote anticipé et le vote par correspondance ont commencé dans de nombreux Etats. Plus de 2 millions de bulletins ont été déjà été retournés, indique le United States Election Project, de Michael McDonald, professeur à l’université de Floride.