Pierre Dubuc (à gauche) et Mathieu Nebra, cofondateurs d’OpenClassrooms, dans les locaux de la startup à Paris. | DR

L’aventure d’OpenClassrooms a presque commencé comme une blague de potache, quand deux collégiens, alors respectivement âgés de 11 et 13 ans, Pierre Dubuc et Mathieu Nebra, ont mis en ligne leurs premiers tutoriels d’informatique sur Le site du zéro. Quinze ans après, rebaptisé OpenClassrooms, le site propose des dizaines de cours en ligne, dont certains certifiants, gratuits pour les demandeurs d’emploi grâce à un accord avec Pôle emploi. Il emploie 40 personnes, touche trois millions d’internautes par mois, et vient de lever 6 millions d’euros.

Vous avez lancé le site très jeune. Comment avez-vous convaincu vos parents et enseignants de vous laisser faire ?

Au début, mes parents ne le savaient pas forcément… Je faisais ça dans mon coin. Petit à petit, ça s’est vu. D’abord à la maison, puis, plus tard, dans les études. Mes professeurs n’ont appris que je réalisais des cours en ligne qu’à la toute fin de ma formation en école d’ingénieurs, à l’INSA Lyon. Des cours que les étudiants de ma promotion utilisaient d’ailleurs.

Détenteur d’un diplôme d’ingénieur, vous auriez pu entrer dans un grand groupe…

Durant mes études, j’ai effectué un stage. Il y a des avantages, notamment en matière de sécurité, mais j’ai une mentalité de « maker ». J’ai senti tous les murs qui allaient m’enfermer, avec tous ces n + 1, n + 2, n + 3, etc. De plus, l’avantage de se jeter tout jeune dans l’entrepreneuriat, c’est que l’on ne mesure ni les risques ni les difficultés. Avec le recul, je peux dire que si j’avais su, j’aurais probablement beaucoup plus hésité !

OpenClassrooms prétend révolutionner l’éducation. Comment ?

Notre projet est de rendre l’éducation plus accessible sur les plans technique, pédagogique et financier. Cela signifie pouvoir rentrer dans un cursus de formation à n’importe quel moment ; pouvoir le faire de façon flexible tout au long de la vie ; être accessible même aux débutants ; ne laisser personne sur le côté, grâce à une approche pédagogique qui consiste à n’avancer que si tous les concepts précédents ont été acquis… C’est une approche pragmatique, très professionnalisante, par projets, avec un mentor qui coache l’étudiant à distance en visioconférence chaque semaine. Nous ne proposons pas un processus descendant, où un professeur viendrait apporter un savoir brut, qui se retrouve très vite sur Internet ou ailleurs. Ce qui fait la différence, notamment en entreprise, ce sont les compétences que l’on va pouvoir apporter à partir de ce savoir.

Ces professeurs « mentors », comment les recrutez-vous ?

Comme dans beaucoup de start-up, nous avons inventé la majorité de nos métiers. Il serait donc vain de chercher des personnes opérationnelles d’emblée à 100 %, même s’il peut y avoir des dominantes dans les profils. Nos caractéristiques, ce sont la culture, la capacité à prendre des initiatives. Et surtout, l’envie d’apprendre : être capable de se remettre en cause fait partie des compétences de base dans notre monde.

La formation en ligne fonctionne mieux pour les adultes que pour les plus jeunes en formation initiale. Sortira-t-elle un jour de ce périmètre ?

Oui, je pense que cette façon d’enseigner se diffusera aux étudiants, puis aux lycéens, collégiens et élèves de primaire. Avoir commencé par les adultes nous a permis de réinventer une pédagogie, car beaucoup n’ont pas envie de se retrouver à l’école.

Afin de comprendre le monde de demain pour faire les bons choix aujourd’hui, Le Monde vous donne rendez-vous à O21/s’orienter au XXIe siècle, à Lille (6 et 7 janvier 2017), Bordeaux-Cenon (10 et 11 février), Lyon-Villeurbanne (15 et 16 février) et Paris (4 et 5 mars).