Documentaire, 26 octobre sur Canal+ à 20 h 50

« Game Fever », un documentaire diffusé sur Canal+. | CANAL PLUS

Corée contre Chine. Chine contre Corée. C’est l’un des principaux fils rouges de Game Fever, un documentaire d’Hervé Martin-Delpierre consacré aux joueurs professionnels d’e-sport, qui fait plonger le téléspectateur dans les coulisses des plus grands tournois de Starcraft II ou de League of Legends. Mais pas seulement : la caméra pénètre aussi à l’intérieur des gaming houses, ces appartements où les équipes de champions vivent, s’entraînent, s’engueulent parfois, s’interrogent toujours.

Dès les premières minutes, le ton est donné, lorsque sOs, l’un des plus grands joueurs de Starcraft II, explique sobrement, presque en s’excusant : « J’ai été chassé de ma famille parce que je jouais aux jeux vidéo. » Sans tomber dans le voyeurisme, le documentaire laisse entrevoir les difficultés du quotidien de ces champions asiatiques qui se consacrent entièrement à leur sport. A commencer par la quête de la reconnaissance familiale, presque un paradoxe pour des champions qui signent des autographes à la chaîne et comptent des millions de fans.

Et puis aussi, et surtout, le stress, la pression permanente, dans un secteur où les enjeux financiers sont énormes, les carrières courtes, et où l’on sent toujours en arrière-plan la tension nationaliste lorsqu’un match prestigieux oppose les équipes ou les joueurs chinois et coréens. En Corée du Sud, toujours officiellement en guerre avec la Corée du Nord, le conflit n’est jamais loin – et pour les professionnels du jeu vidéo, le service militaire obligatoire de deux ans met un coup d’arrêt fatal à la plupart des carrières. Certains parviennent à faire leur come-back, comme Moon, l’un des rares joueurs professionnels qui soit marié et ait des enfants.

Magnifiquement filmé, parfois brouillon, à la fois enthousiaste et mélancolique, Game Fever offre une belle galerie de portraits qui permet de mieux comprendre ce qu’est l’e-sport en Corée. On pourra regretter que la sobriété de l’approche soit un peu mise en porte-à-faux par la présence, en voix off, de commentateurs imaginaires et un peu clichés. Et que le documentaire fasse l’impasse sur les tactiques et les stratégies innovantes des champions qu’il met en avant.