Le président turc Recep Tayyip Erdogan en visite au mausolée de Mustafa Kemal Ataturk, le 29 octobre, à Ankara. | ADEM ALTAN / AFP

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a affirmé samedi 29 octobre que le rétablissement de la peine de mort, évoqué depuis la tentative de coup d’Etat en juillet, serait soumis au Parlement, malgré les critiques de l’Occident.

« Bientôt, bientôt, ne vous en faites pas. C’est pour bientôt, si Dieu le veut », a déclaré M. Erdogan lors de l’inauguration d’une gare dans la capitale turque, en réponse à la foule qui scandait « nous voulons la peine de mort » pour les auteurs du coup d’Etat manqué.

« Notre gouvernement soumettra cela au Parlement. Et je suis convaincu que le Parlement l’approuvera et, quand cela arrivera devant moi, je le ratifierai », a poursuivi le chef de l’Etat turc, sans avancer de calendrier.

« Virus » factieux

Dès le surlendemain du putsch avorté du 15 juillet, le président Erdogan avait évoqué un possible rétablissement de la peine capitale afin d’éliminer « le virus » factieux au sein de l’Etat, provoquant l’indignation de l’Union européenne (UE) avec laquelle Ankara entretenait déjà des relations orageuses.

« Aucun pays ne peut adhérer à l’UE s’il introduit la peine de mort », avait prévenu en juillet la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini. « L’Occident dit ceci, l’Occident dit cela. Excusez-moi, mais ce qui compte, ce n’est pas ce que dit l’Occident, c’est ce que dit mon peuple », a rétorqué M. Erdogan samedi.

La peine de mort a été abolie en 2004 dans le cadre de la candidature d’Ankara à l’entrée dans l’UE, et son rétablissement sonnerait le glas des négociations sur une adhésion de la Turquie.

35 000 personnes arrêtées

Plus de 35 000 personnes ont été arrêtées en Turquie dans le cadre des enquêtes ouvertes après le coup d’Etat manqué, selon les chiffres du gouvernement. Ankara accuse un prédicateur exilé en Pennsylvanie, aux Etats-Unis, Fethullah Gülen, d’avoir ourdi le putsch et réclame son extradition à Washington.

Plus de 450 membres des forces de sécurité ont été mis à pied vendredi, et deux entreprises jugées proches de Gülen ont été placées sous tutelle de l’Etat samedi.

Ces vastes purges suscitent l’inquiétude des partenaires occidentaux de la Turquie, d’opposants au gouvernement et d’organisations de défense des droits de l’Homme qui redoutent que l’état d’urgence en vigueur ne serve de prétexte pour réprimer toute voix dissidente.

La semaine dernière, l’ONG Human Rights Watch a affirmé que des suspects arrêtés avaient été torturés, ce que les autorités turques réfutent catégoriquement.

La répression touche également la minorité kurde. Un tribunal a interdit toute sortie du territoire à la coprésidente du principal parti prokurde HDP, Figen Yüksekdag, en procès pour « appartenance à une organisation terroriste », a rapporté samedi l’agence de presse progouvernementale Anatolie.

Mme Yüksekdag, jugée depuis plusieurs mois pour « propagande terroriste et appartenance à une organisation terroriste armée », n’est plus autorisée à quitter la Turquie « en raison d’activités qui font craindre une fuite ».

Vidéo : M. Erdogan donne une interview au « Monde » trois semaines après le putsch raté
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