Le gardien du PSG Alphonse Areola, le 3 octobre. | FRANCK FIFE / AFP

A défaut d’être porté par ses stars, le Paris-Saint-Germain d’Unai Emery s’en remet à « ses » jeunes en cette entame de saison compliquée. Outre le talentueux milieu Adrien Rabiot (21 ans), formé au club, un autre pur produit de l’académie de la capitale se distingue avec régularité cet automne. A 23 ans, le gardien Alphonse Areola connaîtra sa quatrième titularisation consécutive en Ligue des champions, mardi 1er novembre, au Parc Saint-Jacques, face aux Suisses du FC Bâle. Promis au rôle de doublure jusqu’à la mi-septembre, le jeune homme a réussi à renverser la hiérarchie des portiers parisiens, reléguant sur le banc des remplaçants l’Allemand Kevin Trapp, de trois ans son aîné et titulaire la saison dernière.

Décisif en Ligue 1, Areola l’est également sur la scène européenne. Le 28 septembre, il arrête un penalty et permet à ses partenaires de s’imposer (3-1) dans la douleur sur la pelouse des Bulgares de Ludogorets. « Le plus important est le résultat collectif mais j’y ai mis ma petite patte, sourit-il ce jour-là. Rien n’est acquis, à moi de continuer à travailler, de montrer que je suis décisif et de continuer comme ça. »

Cela fait dix ans que le destin du gardien d’origine philippine est lié à celui du PSG. En avril 2006, à 13 ans, il est repéré par Pierre Reynaud, responsable du recrutement du centre de formation du club parisien, lors d’une détection pour l’Institut national du football (INF) de Clairefontaine (Yvelines). Une radio de son poignet permet de pronostiquer sa taille à l’âge adulte (autour d’1,90 m). Le résultat convainc les dirigeants du PSG de lui proposer un contrat de formation de cinq ans.

Tout en répétant ses gammes en semaine à l’INF Clairefontaine, Areola remporte un titre de champion de France des moins de 14 ans avec la formation de la capitale. Sous la houlette de Bertrand Reuzeau, patron de l’académie du PSG, il est surclassé dans toutes les catégories d’âge. Au point de retenir l’attention de Charles Villeneuve, éphémère président du club (2008-2009) sous l’ère Colony Capital. « Je me rendais au centre de formation chaque mercredi et ce goal très courtois m’avait impressionné, se rappelle l’ex-dirigeant. Bertrand Reuzeau me l’avait présenté parmi quelques très bons joueurs qui pouvaient devenir titulaires en équipe première. »

« L’un des futurs gardiens de l’équipe de France »

Charles Villeneuve se souvient surtout d’un rendez-vous avec la mère du jeune portier, pour qui de nombreux clubs anglais proposaient « une somme importante. » « Avec Alain Roche [alors responsable du recrutement du PSG] et Bertrand Reuzeau, on croyait beaucoup dans les capacités de ce gosse explosif, réactif et doté de qualités au sol et dans les airs. On voulait le garder dans le patrimoine du PSG car il pouvait être l’un des futurs gardiens de l’équipe de France, raconte l’ancien patron du club. On a attendu qu’il ait 16 ans pour lui faire signer un contrat professionnel et il est rapidement devenu le gardien numéro 3 du club. Aujourd’hui, les Qataris doivent beaucoup à Colony Capital, qui a aussi repéré et formé Rabiot. »

Surnommé « Superstar » à l’INF Clairefontaine, Areola attend patiemment son heure dans la cage de l’équipe réserve du PSG. Le 18 mai 2013, à 20 ans, il dispute son premier match en Ligue 1 en remplaçant Salvatore Sirigu lors d’une victoire (3-1) contre Brest, au Parc des Princes. « Cette entrée, c’était la cerise sur le gâteau », se remémore son agent, Franck Belhassen. Ce jour-là, sous les yeux de l’entraîneur parisien Carlo Ancelotti, il évolue aux côtés de la légende anglaise David Beckham, qui dispute le dernier match de sa carrière.

En concertation avec Leonardo, le directeur sportif du PSG, et son successeur, Olivier Létang, Areola est ensuite prêté à Lens pour une saison. Cette parenthèse avec les Sang et Or lui est profitable dans la mesure où il est élu, à 21 ans, meilleur gardien de Ligue 2. Les difficultés financières du club artésien le poussent toutefois à s’engager sous la forme d’un prêt à Bastia. Le jeune homme s’aguerrit en Corse tout en enchaînant les matchs parmi l’élite. En avril 2015, il dispute même la finale de la Coupe de la Ligue contre son club formateur, s’inclinant (4-0) face à Zlatan Ibrahimovic et consorts.

Dans la foulée, le PSG décide de prêter son jeune portier à la formation espagnole de Villareal. « Alphonse avait des perspectives d’évolution énormes et on avait prévu qu’il fasse une troisième année à l’étranger pour qu’il prenne son envol, explique Franck Belhassen. Villareal était le point de chute idéal. Il y a réalisé une excellente saison. » Areola profite notamment de la blessure du gardien titulaire du « Sous-marin jaune » et dispute une trentaine de rencontres en Liga, gardant sa cage inviolée durant 620 minutes. Par ailleurs, il atteint les demi-finales de la Ligue Europa avant d’être éliminé par Liverpool (1-0/0-3).

« Il n’est pas revenu au PSG pour s’asseoir »

De retour au PSG, Areola est alors déterminé à gagner une place de titulaire au sein de l’effectif entraîné par le coach espagnol Unai Emery. « Il n’est pas revenu pour s’asseoir, son but a toujours été d’être numéro 1 au PSG. C’est son truc », confirme Franck Belhassen. En début de saison, le nouvel entraîneur du PSG décide d’instaurer une « vraie concurrence » entre ses portiers

« J’ai confiance en mes deux gardiens. Ce seront leurs performances et la confiance qui les anime qui diront qui joue. Il n’y a pas de règle. Rien ne dit que celui qui joue un match joue le suivant, insiste alors Emery, désireux de maintenir ses deux gardiens sous pression. Je déciderai qui jouera avant chaque match ». Auteur d’une solide prestation contre Arsenal (1-1) en Ligue des champions, le 13 septembre, Areola finit par prendre le dessus sur son rival. Depuis, il n’a plus cédé sa cage, disputant son premier clasico contre l’Olympique de Marseille (0-0), le 23 octobre. « C’est un modèle de gestion de carrière. On avait prévu les choses, s’enorgueillit Fracnk Belhassen. C’est une grande satisfaction de le voir numéro 1 dans cette équipe-là, dotée de tels moyens. Il le mérite de par ses performances. »

Le nouveau statut du Parisien en club lui a d’ailleurs permis de conforter sa position en équipe de France. Numéro 3 dans la hiérarchie des gardiens fixée par Didier Deschamps, Areola est en passe de définitivement supplanter le Rennais Benoît Costil. Champion du monde avec les moins de 20 ans en 2013, réserviste dans l’optique de l’Euro 2016, ce représentant de la fameuse génération née en 1993 (à l’instar de Paul Pogba, Raphaël Varane et Lucas Digne) devrait à nouveau jouer les doublures d’Hugo Lloris et de Steve Mandanda contre la Suède, le 11 novembre, dans le cadre des éliminatoires au Mondial russe de 2018.

S’il n’a pas encore honoré sa première sélection avec les Bleus, Areola est régulièrement loué par Deschamps, qui apprécie sa « sérénité ». Au point d’apparaître, à long terme, comme le successeur d’Hugo Lloris, titulaire dans la cage des Tricolores depuis 2009 ? « J’espère qu’il continuera comme ça, a récemment déclaré le défenseur brésilien Thiago Silva, son capitaine au PSG. Car c’est le prochain gardien de la sélection française. »