Vue d’ensemble d’une des salles de l’exposition « L’Histoire commence en Mésopotamie » au Louvre-Lens en octobre 2016. | MUSÉE DU LOUVRE-LENS/SABRINA HADID

L’ancien président de la région Nord-Pas-de-Calais, Daniel Percheron (PS), avait lancé, le 24 mars : « Il faut que le Louvre-Lens se bouge. » Le musée est-il en danger ? Après la création de grandes régions autonomes, en décembre 2015, la question se pose. En 2016, et pour la deuxième année, le Louvre-Lens affichera 400 000 visiteurs – dont 85 000 scolaires –, loin des 500 000 de 2014, objectif annoncé en 2012 à l’inauguration de cette annexe du Louvre, ancrée sur le carreau de mines lensois. Baisse attribuée, comme à Paris, aux attentats.

La nouvelle région, baptisée Hauts-de-France, qui fusionne le Nord-Pas-de-Calais et la Picardie, continuera-t-elle à verser chaque année les 10 millions d’euros de subventions au Louvre-Lens, sur les 15 millions du budget de fonctionnement du musée ? Xavier Bertrand (LR), nouveau président de la région, s’y était engagé. François Decoster, vice-président des Hauts-de-France, chargé de la culture, le confirme, vendredi 28 octobre, au Monde : « C’est un ­budget important, on a voté cette contribution et souhaité poursuivre cet impact pour la région. »

Le département et la communauté de communes versent chacun 1,5 million d’euros. Les 2 millions d’euros restant sont financés sur les recettes, le mécénat et les dons récoltés dans l’urne placée à cet ­effet dans le musée.

Catherine Ferrar, administratrice générale du Louvre-Lens : « C’est la sortie dominicale des gens du coin »

Pour fidéliser les 60 % des visiteurs des Hauts-de-France et élargir encore le public, le conseil d’administration du Louvre-Lens du 2 octobre a renouvelé le principe de la gratuité de la Galerie du temps. « Cela fait partie de nos gènes, c’est la sortie dominicale des gens du coin, des ouvriers, des employés, des retraités, du territoire au sens large. Le Pas-de-Calais est le département au plus fort taux de chômage en France », souligne Catherine Ferrar, l’administratrice générale.

C’est cet impact réussi sur le territoire, d’autant plus que « le Louvre devient un interlocuteur pour les 80 musées de la région », rappelle François Decoster, qui l’a convaincue d’aller plus loin : « Le budget pour la culture des Hauts-de-France, qui est de 70 millions d’euros, va augmenter en 2017 pour atteindre 120 millions d’euros », affirme-t-il. Sa politique en faveur du cinéma multipliera par deux et demi les aides à la coproduction d’œuvres.

« Casser les frontières »

François Decoster est dithyrambique : « La Galerie du temps est construite sur un concept muséographique qui révise tous les codes et offre un parcours d’éducation à l’histoire des arts unique au monde. On est là dans un terrain d’aventure exceptionnel de la muséographie, avec beaucoup d’inventivité pour conquérir le jeune public. » Quinze médiateurs sont à tour de rôle dans la Galerie du temps pour jouer les « Impromptus », des pauses de dix minutes autour d’une œuvre. « Et ça marche très bien », se réjouit Marie ­Lavandier, la nouvelle directrice du Louvre-Lens.

Connue pour son énergie bienveillante, elle ne boude pas son plaisir : « C’est un projet fascinant, un cas d’école pour inventer une manière différente de faire parler une grande collection des beaux-arts et d’archéologie, et capter un public qu’on a du mal à séduire depuis trente ans. Il faut casser les frontières, la présentation par département. Innover, inventer, avec une approche plus transversale, plus thématique, plus universelle, à l’origine même de ce “Louvre autrement” », résume-t-elle, exprimant le désir d’aller dans cette direction pour la programmation des expositions. Son passé au Quai Branly, en charge du recollement et du déménagement des œuvres du Musée de l’homme, puis au Centre de recherche et de restauration des musées de France (C2RMF) et à la direction des musées de Nice, n’est pas pour rien dans sa nomination, en juin.

Le chantier du Centre de réserves et de conservation du Musée du Louvre devrait démarrer fin 2017

Autre confirmation, le Centre de réserves et de conservation du Musée du Louvre va bien être construit. « Le projet définitif devrait être validé dans les prochaines semaines, affirme François Decoster. La région mettra 5 millions d’euros, plus 18 millions sur les fonds européens. Avec les 5 millions de l’Etat et les 30,6 millions du Louvre. Reste 1,4 million de mécénat à trouver, pour couvrir les 60 millions du projet. »

A Lens, mardi 1er novembre, François Hollande a annoncé, après sa visite de l’exposition sur la Mésopotamie, que le centre « aurait aussi vocation à accueillir le patrimoine menacé, en particulier en Irak et en Syrie ». « Cette décision devrait se concrétiser, a-t-il précisé, début décembre à Abou Dhabi, lors d’une conférence internationale sur la préservation du patrimoine en péril préparée par Jack Lang, président de l’Institut du monde arabe. »

Le chantier devrait démarrer fin 2017, pour un déménagement des réserves en 2019.

Lire la critique de l’exposition : L’Histoire s’est d’abord écrite en Mésopotamie