Réfugiés attendant d’être évacués du camp de Calais, le 24 octobre. | OLIVIER LABAN-MATTEI / MYOP POUR LE MONDE

Le maire de Saint-Gaudens (Haute-Garonne) a décidé, jeudi 3 novembre, de maintenir la suspension du contrat de ville passé avec l’Etat en 2014. Il entend ainsi protester contre l’implantation d’un centre d’accueil pour les demandeurs d’asile (Cada) de trente-huit places, destiné à accueillir des migrants de Calais dans sa ville. Une première en France. « Nous avons été mis devant le fait accompli, sans concertation avec la population, argumente le maire (divers gauche) Jean-Yves Duclos. Je suis d’accord pour accueillir des réfugiés, mais pas dans ces conditions et pas dans ce périmètre, qui compte plus de 29 % de chômeurs. »

« Inadmissible », « incompréhensible », « un gâchis », « complètement irresponsable ». La décision, votée par le conseil municipal le 12 septembre, provoque depuis lors les foudres des collectivités parties prenantes du dispositif : communauté de communes, département, conseil régional, Etat.

De fait, cette suspension inédite bloque toutes les aides, exonérations fiscales ou subventions dont bénéficient commerçants, entreprises et associations. Le maire assure que les crédits concernés, environ 58 000 euros, représentent peu par rapport au budget de la ville, et que personne ne souffrira de cette situation.

« Je ne veux pas subir de diktat »

Ce n’est pas l’avis de Jean-Raymond Lépinay, président de la communauté de communes du Saint-Gaudinois, et ancien maire socialiste de Saint-Gaudens. « Le maire a accepté de devenir maître d’ouvrage du contrat de ville et c’est donc lui qui tient toutes les manettes. Prendre ainsi en otage sa population, ce n’est que basse manœuvre politicienne », commente celui qui avait été battu aux élections par M. Duclos.

Le 10 octobre, le ministre de la ville Patrick Kanner était déjà venu, entouré de la présidente de région Carole Delga, ainsi que du président du conseil départemental Georges Méric, tous deux socialistes, pour essayer de faire revenir le maire sur sa décision. Mais rien n’y a fait. Depuis cette rencontre, M. Duclos campe sur ses positions. « Pour moi, ce n’est pas une bataille politique, je ne suis candidat à rien, lance-t-il. Je ne fais pas le lit du Front national, je ne veux simplement pas subir de diktat. »

A la préfecture de région, le sous-préfet de Saint-Gaudens admet « être dans une impasse, un flou juridique ». Au ministère de la ville, on avance que le manque à gagner pour la commune sera plus important qu’annoncé : il pourrait avoisiner plusieurs centaines de milliers d’euros. Des exonérations de taxe d’habitation ou de cotisation foncière des entreprises sont par exemple incluses dans ces contrats de ville. Elles pourraient être annulées.

Vendredi 4 novembre, à la sortie d’une réunion avec les maires des communes alentour, Georges Méric a reçu des représentants associatifs, inquiets de la tournure que pourraient prendre les événements. La maison des jeunes, le centre d’art contemporain, des associations sportives ou culturelles bénéficient en effet des crédits du contrat. M. Méric a tenu à les rassurer, affirmant que le département continuerait à verser ses subventions. Et il a proposé de faire avec toutes les collectivités concernées un courrier commun au préfet de région.