A mesure que les échéances approchent, le pouvoir en place en République démocratique du Congo (RDC) durcit le ton. Depuis une semaine, le signal de Radio France internationale (RFI) est coupé à Kinshasa. Aucune raison officielle n’a été donnée par les autorités congolaises mais cette coupure, dans la nuit du vendredi 4 au samedi 5 novembre, est intervenue quelques heures avant un rassemblement de l’opposition interdit par le pouvoir. Radio Okapi, une autre radio très écoutée en RDC, celle-ci soutenue par les Nations unies, avait vu au même moment son signal brouillé avant de pouvoir émettre à nouveau depuis mardi soir.

Manifestement soucieux de contrôler les médias dans un climat politique de plus en plus tendu du fait du report de l’élection présidentielle, initialement prévue fin novembre, le gouvernement congolais annonce désormais son intention de « réévaluer l’accord de siège avec RFI », permettant à cette radio d’émettre en RDC et de disposer sur place d’un envoyé permanent. « Il y a des choses qui nous préoccupent depuis des années. Nous attendons une délégation de la direction de RFI pour leur dire ce qui cloche. Plus tôt l’on réévaluera notre accord, plus tôt reprendront les émissions », déclare le porte-parole du gouvernement et ministre de la communication, Lambert Mende, sans pour autant préciser la nature de ses reproches.

Quelques jours plus tôt, le ministre qui intervient pourtant très régulièrement sur les ondes de RFI expliquait que la coupure était intervenue, car ce média avait « relayé un message de l’opposition défiant les mesures de sécurité et d’ordre public prises par les autorités ».

« Inacceptable »

A la direction de RFI, cette coupure, loin d’être la première, suscite une relative incompréhension. « Nous maintenons le dialogue ouvert avec les autorités congolaises et continuons à réclamer le rétablissement de notre signal à Kinshasa », a indiqué, jeudi soir, un porte-parole de la radio à l’AFP. « Rien ne nous a été formellement notifié. Nous n’avons reçu aucun courrier », ajoute l’un de ses directeurs.

Cette coupure a suscité un flot de critiques. Les diplomaties française, américaine, belge et britannique ont fait part de leur préoccupation. « Inacceptable », a jugé le Quai d’Orsay, dont les relations sont de plus en plus dégradées avec Kinshasa. Michaëlle Jean, la secrétaire générale de la Francophonie, a indiqué le 7 novembre son « inquiétude » devant le Conseil de sécurité de l’ONU. Une délégation du Conseil de sécurité est d’ailleurs attendue vendredi soir à Kinshasa pour tenter d’apaiser le climat politique et le dossier RFI devrait être abordé avec le pouvoir congolais.

Sur place, à Kinshasa, opposants et ONG condamnent également cette coupure. La Voix des sans voix estime que cette censure traduit la volonté des « autorités congolaises de priver coûte que coûte la population de son droit à l’information en la maintenant dans l’obscurantisme, l’ignorance en ce qui concerne la gestion de la chose publique ».
Début novembre, Reporters sans frontières (RSF) avait accusé M. Kabila d’être un « prédateur de la liberté de la presse » alors que la RDC occupe la 152e place du classement mondial établi par cette ONG en 2016.