La NES Mini Classic est ultra-légère et tient dans la main (ce qui ne sert à rien). | Nintendo

Ressortez les Captain Choc, les Yes, du pain d’épice Prosper et la bouteille de Banga : la Nintendo Entertainment System (NES), console 8-bits phare des années 1980 est de retour, et ça mérite un goûter. L’heure n’est pas aux gâteaux, mais avec la commercialisation samedi 12 novembre de la NES Mini Classic, réédition miniature avec 30 jeux intégrés, Nintendo offre l’occasion aux vétérans de croquer dans une Madeleine de Proust, comme aux plus jeunes de se plonger dans la Pléiade des jeux vidéo d’il y a trente ans.

Petit problème de longueur

Pour pareil évènement, ressortez votre plus beau tapis de sol. Pas seulement pour célébrer, mais juste parce qu’avec la vingtaine de centimètres qu’offre le fil de la manette, la NES Mini Classic ne vous laissera jamais vous assoir là-bas sur le canapé – sauf à le rapprocher à un quart de mètre de l’écran. Coupons court au suspense : la taille riquiqui du câble du contrôleur est de très loin le principal défaut du produit. On pourra s’offusquer de ces économies de bouts de chandelle de la part de Nintendo, qui par ailleurs n’intègre pas d’adaptateur secteur dans la boîte (il faut utiliser celui de son smartphone) : la NES Mini est vraiment mini, à tous points de vue.

Mais il y a une autre manière de voir les choses. En fait, le demi-bout de lacet qui fait office de câble a une vocation profonde : vous obliger à tirer sur le fil d’alimentation pour sortir la NES Mini du meuble TV où trônent déjà, impériales, PlayStation 4 noir laqué et Freebox design : cette mini-console est comme un jouet, qui se pose sur le tapis au centre du salon.

Mieux, la NES Mini Classic vous oblige à quitter le douillet canapé où l’adulte s’affale (avouez), pour prendre position, assis en tailleur, à même le sol, comme enfant autrefois, face à un écran de télévision devenu soudain géant. Là, par la grâce d’un câble HDMI bienvenu et de téléviseurs numériques à la diagonale gourmande, l’univers des 8-bits d’antan se rallume avec une ampleur, une luminosité, une qualité d’immersion inédits. Le petit boîtier fait de vous un môme ; et à 50 cm de l’écran l’émerveillement et la redécouverte ont la délicieuse saveur de l’excitation d’antan.

Redécouvertes en HD

Les intemporels Donkey Kong et Pac-Man, la trilogie Super Mario Bros., les fameux The Legend of Zelda I et II, l’adorable Kirby’s Adventure, des classiques de l’action comme Castlevania, Probotector (version américaine) ou Megaman II, du sport rétro avec Exite Bike, Punch Out!! et Tecmo Bowl, et même des inédits comme le premier Final Fantasy ou le jeu d’aventure Star Tropics... La NES Mini Classic propose un catalogue à la fois complet et varié. On pourra toujours regretter l’absence de tel ou jeu (Duck Tales, Tortues Ninja, Nintendo World Cup...) ou tout simplement l’impossibilité d’ajouter le moindre titre à la liste par défaut. Mais en l’état, la ludothèque offre déjà un vrai cocktail de plaisirs mêlés, entre la nostalgie et la découverte.

Et même quand l’on croit connaître les jeux, le grain d’image nouveau permet parfois de dissiper des malentendus vieux de plusieurs années.

La qualité de l’émulation est irréprochable, presque trop : les développeurs français de la console, NERD, ont poussé la fidélité jusqu’à retranscrire le moindre ralentissement d’époque. L’expérience de jeu est ainsi strictement identique à celle qu’ont pu avoir les joueurs des années 1980 – et les plus puristes pourront même opter pour un effet mimant l’affichage flou des télés cathodiques d’époque.

Surtout, derrière sa présentation rétro et sa posture nostalgique, ce petit boîtier ultraléger dispose de fonctionnalités modernes ultra-bienvenues. Comme la possibilité de sauvegarder n’importe quel jeu, à n’importe quel instant, bien pratique pour des titres à la difficulté souvent d’un autre temps.

Des jeux qui résistent au temps

Les jeux eux-mêmes n’ont pas tous vieilli de la même façon. Pac-Man et Dr. Mario résistent avec insolence aux ravages du temps. Super C surprend par sa prise en main d’une souplesse et d’un dynamisme très contemporains, tout comme le jeu de boxe Punch Out !! et ses combats dignes d’un dessin animé. Le charme de l’atmosphère envoûtante de Metroid et Zelda continue d’opérer. Castlevania, Ninja Gaiden et Megaman 2 rappellent que la difficulté était plus élevée à l’époque, mais réveille le compétiteur enfoui, tandis que même des expériences plus sommaires comme Gradius et Excite Bike divertissent. A part un Final Fantasy vraiment très lent, ou un Balloon Fight et un Ice Climber à l’intérêt limité, la magie fonctionne.

Mike Tyson's Punch Out!! (NES) Full No Death Playthrough
Durée : 35:49

Du reste à 60 euros avec une manette inclue, le prix est faible : 2 € le jeu, et 0,037 cts l’heure de jeu si vous les finissez tous (calcul non contractuel). Malgré tout, certains signaleront que cela reste plus cher qu’un classique logiciel d’émulation, ou qu’une console rétro sans droits. Le choix appartient à chacun : ces derniers apportent des fonctionnalités similaires, et surtout la possibilité non négligeable d’essayer quasiment tout le catalogue de la console. Mais parfois au prix d’une qualité d’expérience désastreuse.

La NES Mini Classic offre de son côté une expérience légale (pratique pour ne pas prendre le risque d’être réincarné en cactus dans une vie ultérieure), et surtout une qualité d’émulation impeccable, une manette exactement identique à l’originale, des sensations fidèles, et ce je-ne-sais-quoi d’émerveillement à retrouver l’univers Nintendo des années 1980 jusque dans les détails les plus anodins de l’emballage. C’est enfin, avec sa forme craquante et ses jeux fédérateurs, une excellente occasion pour organiser une soirée rétro chez soi. Ou mieux, un goûter rétro – avec des barres Inca, du Tropico, quelques Raiders et un verre de Tang.

En bref

On a aimé :

  • L’ambiance de Metroid, les mystères de Zelda, les secrets de Mario...
  • Tant de classiques des années 80 réunis
  • 60 € l’enfance, c’est pas cher
  • Jouer assis par terre en tailleur à l’ancienne
  • Meilleure boîte de l’histoire des boîtes
  • La possibilité de sauvegarder n’importe quand : merci, merci, merci.

On n’a pas aimé :

  • La seconde manette pas intégrée (comptez 10 €)
  • Le collègue pro-Sega qui est venu nous chambrer (traître)
  • Et Duck Tales ? Et Nintendo World Cup ? Et [insérez votre jeu préféré d’époque] ?
  • Le fil de la manette a la taille d’un lacet, mais ne rentre pas dans les trous des chaussures

C’est plutôt pour vous si :

  • Vous n’avez pas eu besoin de chercher « Banga », « Inca » et « Tang » sur Google
  • Vous voulez une expérience de jeu simple, directe, et voyager dans le temps
  • Vous cherchez à cultiver votre fils qui est en cure de désintox de Call of Duty

Ce n’est plutôt pas pour vous si :

  • Jouer à 50 cm de l’écran vous incommode
  • Vous jouez sur un rétroprojecteur de 5 mètres de diagonale
  • Vous êtes pro-Sega et préférez pourrir en enfer que de rejoindre enfin le camp du Bien

La note de Pixels :
7,9 bits sur 8