Jean-Michel Aulas, PDG d’OL Groupe, a investi 450 millions d’euros pour construire son nouveau stade uniquement sur fonds privés. Une nouveauté dans le paysage français qui a déjà permis à l’Olympique lyonnais de redevenir positif financièrement, et qui s’inscrit plus généralement dans une économie du foot en pleine croissance.

Le Parc OL est totalement privé et les ressources ne sont pas liées seulement au foot. Est-ce le modèle du développement du futur ?

Je pense. Nous montrons surtout qu’un grand projet privé peut assumer des valeurs qu’une collectivité ne peut plus financer. C’est le seul stade fonctionnant sur énergie verte, la seule construction entièrement digitalisée ou chaque utilisateur vit son expérience comme il le souhaite ! C’est aussi novateur sur l’emploi avec en particulier nos 1 000 permanents, logés sur le site. Et les soirs de matchs, ils sont 2 500 de plus. Or la plupart des compétences dont nous avions besoin n’existaient pas.

Au lieu de créer des gouffres dans les finances publiques avec des partenariats public-privé, nous avons investi de l’argent privé, mais sur des valeurs qui donnent un avenir.

Le Parc OL est-il un projet de développement territorial cohérent sur l’Est lyonnais, mais impulsé par le privé ?

Oui, car nous avons lié intelligemment projet privé et politiques publiques. L’accord sur l’emploi avec Décines, Vaulx-en-Velin, Meyzieux, Villeurbanne et Chassieux vient de notre volonté de nous inscrire dans un projet de territoire dépassant la construction du parc. Au lieu de créer des gouffres dans les finances publiques avec des partenariats public-privé, nous avons investi de l’argent privé, mais sur des valeurs qui donnent un avenir. Ces valeurs nous permettront d’éviter l’antagonisme privé-public et de nous concentrer uniquement sur les finalités économiques et sociales des investissements.

Avec 250 entreprises sur l’aire du Parc OL, votre « business model » tient-il plus du centre d’affaires et des loisirs qu’à la billetterie du foot ?

Comme entrepreneur, j’ai longtemps loué des loges à Paris ou à Marseille pour inviter mes clients et on me proposait une loge pour dix-huit matchs et puis, basta ! J’ai donc imaginé que nos loges soient des bureaux ouverts 365 jours par an. Ce n’est pas un stade ouvert les seuls soirs de matchs. C’était le moment d’investir car le foot est une activité avec 10 à 15 % de croissance annuelle. Même la Ligue 1 est équilibrée. Certes il y a les subventions des Qataris à 250 millions la passe annuelle mais, en dehors du PSG, tous les clubs font l’effort de se restructurer. L’OL est redevenu positif et a digéré la construction du stade. L’économie du foot arrive à maturité. Les Chinois d’IDG Capital Partners investissent 100 millions d’euros à l’OL car notre modèle est celui dont ils vont s’inspirer pour développer le foot chinois.

Cette économie fondée sur les droits télé va-t-elle favoriser la création de ligues fermées pour que soit préservé l’investissement des clubs ?

Non. En France, en Allemagne ou en Espagne on ne substituera pas à un modèle foncièrement amateur un autre modèle qui, même s’il a une raison économique de fond, justifierait une ligue fermée. Il faut préserver les montées et descentes, mais permettre aux clubs des grandes métropoles qui ont investi de s’inscrire dans ce schéma européen en cours de construction et donner la possibilité à quatre ou six clubs français d’aller capter cette richesse au niveau européen.

Cet article fait partie d’un supplément réalisé dans le cadre d’un partenariat entre Le Monde et l’agglomération de Thau, qui organisent ensemble, le 18 novembre à Sète-Balaruc-les-Bains (Hérault) le colloque « Quand le sport change la vie ».