Francois Fillon lors de son discours à Chassieu, près de Lyon, le 22 novembre. | JEAN-PHILIPPE KSIAZEK / AFP

Il a affiché ses nouveaux amis. Arrivé largement en tête du premier tour de la primaire à droite, François Fillon a tenu son premier meeting de l’entre-deux-tours, mardi 22 novembre, à Lyon (Rhône), où plusieurs de ses récents soutiens étaient présents. Bruno Le Maire, éliminé dimanche, et Laurent Wauquiez, président par intérim des Républicains (LR), ont pris la parole à la tribune, devant de nombreux fidèles de Nicolas Sarkozy, qui ont eux aussi rallié le député de Paris : Eric Woerth, Guillaume Larrivé, Georges Fenech…

« Nous n’avons pas été toujours d’accord mais j’ai toujours eu du respect pour toi. Je te soutiens, souhaite que tu gagnes et que tu sois élu président de la République », a lancé le député de l’Eure, qui a réalisé un score de 2,4 % dimanche. « On te reproche d’être de droite ? Quelle horreur !, a lui ironisé le patron de la région Rhône-Alpes, qui incarne le courant droitier de LR. On dit que tes propositions vont trop loin. Ici, on sait qu’on peut faire une politique de droite sans s’en excuser. » M. Wauquiez s’en est ensuite pris à Alain Juppé, en lui reprochant ses critiques contre M. Fillon. « Depuis lundi, je vois toutes les attaques se porter contre toi avec une violence que je ne peux pas accepter (…). Il n’est pas acceptable de reprendre les arguments des socialistes. Ne faites pas le jeu de la gauche ! », a lancé le président par intérim de LR, en lançant « un appel à l’unité et au respect ».

« Si on ne peut rien faire alors mieux vaut rester chez soi »

Dans la foulée, François Fillon a pris la parole à la tribune. « Je viens amplifier ma campagne », a-t-il déclaré, avant de répondre aux attaques d’Alain Juppé – sauf sur celle portant sur l’avortement. Depuis lundi, le maire de Bordeaux ne cesse de le pilonner, en mettant en cause son programme économique et sociétal. En particulier sa proposition de supprimer 500 000 postes de fonctionnaires, une proposition que le maire de Bordeaux juge « impossible » à mettre en œuvre. « J’entends Alain dire que la réduction de 8 % des emplois publics en cinq ans serait impossible et le retour des 39 heures pour les fonctionnaires trop brutal. Si on ne peut rien faire pour éviter la faillite alors mieux vaut rester chez soi », a rétorqué M. Fillon devant près de 6 000, selon les organisateurs.

Alors que son concurrent a dénoncé le projet économique trop « brutal » de son rival, M. Fillon a défendu son projet de « rupture », aux accents tchatchériens :

« A tort, Alain Juppé juge mon projet trop radical, trop risqué… Je lui rétorque que si on n’est pas radical maintenant, je me demande quand on le sera ? Je lui réponds que si on ne prend pas tous les risques maintenant, je me demande quand on les prendra ? »

Lui a vanté son ardeur réformatrice, en moquant la frilosité supposée de son concurrent : « Moi je veux vraiment sortir des 35 heures, pas en sortir entre guillemets… » « Mieux vaut pour moi le risque d’oser que l’uniformité dans la médiocrité. » « Cela me fait sourire lorsqu’on me colle l’étiquette de libéral, comme on peignait, au Moyen Age, des croix sur les portes des lépreux… » Avant d’ironiser : « Et puis, entre nous, je trouve singulièrement piquant qu’on m’accuse d’être droit dans mes bottes ! »

« J’utiliserai tous les pays volontaires pour abattre l’Etat islamique »

Autre angle d’attaque de M. Juppé que M. Fillon a tenté de déminer : sa volonté d’opérer un rapprochement avec Moscou pour régler le conflit syrien. « J’entends les amis de mon concurrent me soupçonner de vouloir renouer avec la Russie une relation normale, faite de franchise et de coopération… Je les laisse à leurs circonvolutions ; moi, je prendrai tous les moyens pour protéger les Français et j’utiliserai tous les pays volontaires pour abattre l’Etat islamique », s’est-il justifié.

Par ailleurs, M. Fillon a aussi dit avoir « une pensée particulière pour Nicolas Sarkozy avec lequel nous avons tant de souvenirs partagés ». « Nous étions différents, nous sommes différents, mais nous avons tous deux formé l’un des tandems parmi les plus efficaces de la Ve République. Sa présidence fut tellement plus audacieuse que celle de François Hollande ! » « Le soir du premier tour je l’ai eu au téléphone. A l’heure où il se retire avec élégance, je lui adresse à nouveau le témoignage de mon respect », a-t-il poursuivi au sujet de celui qu’il n’a pourtant cessé de critiquer depuis son échec à la présidentielle de 2012.

Même s’il apparaît comme le grand favori pour le second tour, l’ex-premier ministre a pris soin de ne pas crier victoire avant l’heure. « Rien n’était joué avant le 20 novembre, et rien n’est encore joué », a-t-il affirmé, avant de lancer : « Nous avons gagné la première manche, mais je ne me laisse pas emporter par les vivats et les pronostics d’un microcosme qui m’enterrait il y a deux mois ! »