La police américaine, le FBI et la CIA s’intéressent aux données de réseau social. | DADO RUVIC / REUTERS

Utiliser les données de Twitter « pour pister ou identifier des manifestants ou des militants est absolument inacceptable et interdit ». L’entreprise a mis les points sur les i mardi 22 novembre, après avoir essuyé quelques critiques sur la façon dont ses données pouvaient être exploitées par les forces de l’ordre.

La semaine dernière, le FBI avait annoncé sa volonté d’utiliser Dataminr, un logiciel permettant de se connecter aux données publiques de Twitter et de les analyser en temps réel, ce qui avait soulevé quelques inquiétudes. « Le FBI a besoin d’obtenir des informations sur les actualités les plus urgentes et sur des événements en temps réel, expliquait l’agence fédérale américaine dans un document. Ce qui se passe dans le monde est d'abord relayé sur Twitter, qu’il s’agisse d’attaques terroristes, d’actions militaires, d’événements épidémiologiques et de catastrophes naturelles, parmi d’autres. » C’est ainsi que le FBI justifie son souhait d’utiliser Dataminr, dont Twitter possède 5 %, afin de « pouvoir chercher, en temps réel, à travers des filtres personnalisables qui permettent de suivre les sujets prioritaires pour le FBI ».

Des sujets prioritaires qui concernent aussi, précise un second document, « les organisations terroristes et autres criminels », qui utilisent Twitter pour « communiquer, recruter et lever des fonds pour financer des activités illégales ».

Révélations sur la police américaine

Pourtant, les conditions d’utilisation des données de Twitter sont très claires, et interdisent aux logiciels comme Dataminr d’« afficher, distribuer ou de rendre disponible du contenu à toute entité qui voudrait enquêter, pister ou surveiller les utilisateurs de Twitter à partir de leur contenu ».

Le mois dernier, la puissante American Civil Liberties Union (ACLU), une association de défense des libertés civiques aux Etats-Unis, avait révélé que la police américaine exploitait de cette façon les données de Twitter, Facebook et Instagram via un autre logiciel, Geofeedia. Un outil qui lui a notamment servi à surveiller les manifestations ayant suivi la mort, en août 2014, de Michael Brown, un jeune homme noir tué par un policier. Elle a aussi pu, grâce à Geofeedia, identifier des manifestants grâce à la reconnaissance faciale, et en interpeller certains.

La CIA privée d’accès

Après la publication de ces informations, Twitter avait immédiatement coupé l’accès de Geofeedia à ses données. En mai dernier, Twitter avait aussi révoqué l’accès de la CIA à Dataminr, expliquant que les données de son site étaient publiques et que « le gouvernement américain [pouvait] consulter les comptes publics de lui-même, comme n’importe quel utilisateur le peut ».

C’est pourquoi certains observateurs se sont étonnés d’apprendre que le FBI comptait lui aussi utiliser un logiciel du même type, sans que Twitter ne l’interdise. Pour apaiser les esprits, Dataminr a assuré au site spécialisé TechCrunch que l’agence n’aurait accès qu’à « une version limitée de [ce] produit ». Twitter, de son côté, a cru bon de réaffirmer publiquement ses principes. Ces informations « nous ont beaucoup préoccupés », assure la firme sur son blog : « Pour être clairs : nous interdisons aux développeurs d’utiliser [les données de Twitter] pour permettre aux forces de l’ordre – et autres entités – de les exploiter à des fins de surveillance. » Ce qui ne change pas, bien sûr, le fait que Twitter se plie aux décisions de justice quand celle-ci lui réclame des informations sur un utilisateur. Twitter promet que les développeurs enfreignant ces règles verront leur accès aux données coupées et qu’il renforcera l’application de cette politique « au fil des prochains mois ».