Prévision des concentrations maximales de PM10 à l’échelle européenne, publiée par Copernicus-Atmosphère pour le 25 octobre. | Copernicus-Atmosphère

Avec l’open data, l’information sur la qualité de l’air franchit un pas décisif. Mardi 22 novembre, Météo France et l’Institut national de l’environnement industriels et des risques (Ineris) ont présenté, après un an de rodage, le service « Atmosphère ». Développée dans le cadre du programme européen Copernicus de production de données environnementales, cette plateforme en ligne donne un accès libre et gratuit à des données sur la pollution en Europe, d’un volume et d’une précision sans précédent.

Forts de leur expertise en matière de prévision de la qualité de l’air, pionnière au sein de l’Union, les deux instituts français ont été chargés par la Commission européenne de mettre en œuvre et coordonner un tel service, sous l’égide du Centre européen de prévision météorologique à moyen terme.

Les quelque 800 cartes haute résolution diffusées chaque jour sont la synthèse des prévisions élaborées par les modèles de sept des meilleures équipes spécialistes de la qualité de l’air en Europe. Outre Météo France et l’Ineris, on compte les services météorologiques nationaux de la Finlande, de la Norvège, de la Suède, l’Institut hollandais de gestion des risques environnementaux et le laboratoire de recherches environnementales de l’université de Cologne en Allemagne. « Pour la première fois, elles combinent tous les types de données disponibles : celles des réseaux de mesures in situ, celles des observations satellites, comme celles résultant de modélisation », souligne Laurence Rouil, responsable du pôle modélisation environnementale de l’Ineris.

Prévisions à trois jours d’échéance

Résultat : tous les matins à dix heures, la plateforme Copernicus-Atmosphère diffuse les prévisions, jusqu’à trois jours d’échéance, des concentrations d’une dizaine de polluants sur l’Europe : ozone, monoxyde d’azote, dioxyde d’azote, monoxyde de carbone, dioxyde de soufre, particules fines PM10, PM2,5, ammoniac, composés organiques volatils… Ainsi que des analyses à J + 1, consolidant les prévisions avec les observations de la situation réelle de la veille.

Les prévisions sont établies heure par heure avec une résolution de dix kilomètres. A partir de ces données européennes, il est possible de réaliser des prévisions plus précises encore sur des territoires plus circonscrits, un pays, une région, une ville. « Copernicus-Atmosphère permet aux systèmes de prévision nationaux ou locaux d’intégrer des données hors de leurs limites, et ainsi de prendre en compte des polluants présents sur leur territoire mais émis ailleurs, en Europe, et même hors d’Europe », souligne Sylvie Guidotti, responsable de la division environnement et santé de Météo France.

Carte de prévision à l’échelle mondiale des niveaux de particules fines (PM10 et PM2,5), toutes sources confondues, pour le 25 octobre 2016 à 6 heures du matin, heure GMT. On observe que des particules désertiques venues du Sahara se dirigent vers la France. | COPERNICUS-ATMOSPHERE

Outils d’aide à la décision

Au-delà de la finesse de l’analyse, l’outil permet aussi de regarder et de suivre tous les polluants extérieurs à l’Europe. Il est ainsi possible de savoir si une concentration élevée en particules fines à Marseille et dans le sud est de la France est due à une remontée d’Afrique de particules désertiques. Copernicus peut d’ailleurs apporter depuis peu des informations pour chaque grande ville européenne sur la part locale de pollution et la part venue d’autres régions ou pays. « Les pouvoirs publics peuvent voir arriver et anticiper ce type de phénomène », relève Sylvie Guidotti.

De la même façon, il peut aussi donner à trois jours d’échéance une estimation de l’action des sources prépondérantes sur la pollution prévue : trafic routier, chauffage résidentiel, agriculture, industrie.

En France, alors que les préfets peuvent déclencher des mesures d’urgence en prévision d’un épisode persistant de pollution, ces informations sont utiles aux pouvoirs publics pour anticiper l’efficacité des décisions prises et mesurer les conséquences d’une action dans tel ou tel secteur. « Si Copernicus peut être un outil précieux d’aide à la décision dans la gestion des pics de pollution, réduire la pollution de fond est tout aussi essentiel », rappelle Laurence Rouil, de l’Ineris.

Libres d’accès, toutes les données mises à disposition par Copernicus-Atmosphère intéressent les collectivités et les associations de surveillance de la qualité de l’air, mais aussi de nombreuses entreprises de conseil ou encore des start-up qui développent des services d’information pour le grand public.

Fabien Brocheton, directeur général de NUMTech, qui propose des outils numériques de prévision et de suivi de la pollution à l’échelle des villes, a vu ainsi ses perspectives de marché grandement s’élargir, les données offertes par Copernicus lui permettant désormais de proposer ses services dans des pays où il n’existe pas de structure nationale de surveillance de la qualité de l’air. Et de se féliciter : « Copernicus est le seul service qui fournit des informations sur la qualité de l’air, harmonisées, à l’échelle du monde. »