« Après mon bac S, j’hésitais entre une école de commerce et une d’ingénieurs. Je ne voulais pas faire que des maths ou de la physique. J’aime aller de l’avant, faire preuve de leadership, avoir des idées » Clara Morise, 22 ans, est aujourd’hui en cinquième année à l’Iteem (Institut technologique européen d’entrepreneuriat et de management), un département de Centrale Lille qui forme des « ingénieurs-manageurs-entrepreneurs ». A quelques mois de sa sortie, elle se définit comme « 100 % ingénieur et 100 % manageur ».

« Ce qui me plaît dans cette formation, explique l’étudiante, c’est d’avoir le matin des maths et de la mécanique et l’après-midi du management de projet et du marketing. Il n’y a pas de coupure entre le scientifique et le commercial. » C’est cette synthèse que sont venus chercher ceux que l’on appelle les « iteemiens » sur le campus de Centrale Lille.

Préparer à des emplois polyvalents

La formation dispensée à l’Iteem – créé en 2003 par Centrale en partenariat avec Skema Business School et codirigée par les deux écoles – est l’une des rares de ce type en France. Durant cinq ans, les étudiants ingénieurs et manageurs suivent un cursus mêlant les disciplines des deux filières. Pour les préparer à des emplois polyvalents, l’accent est mis sur l’international et sur les stages – dix-sept mois au total dont huit à l’étranger. Clara, par exemple, a effectué son premier stage dans la vente, et son second dans l’ingénierie.

L’Iteem recrute après le bac. Pour une promotion annuelle de 64 étudiants, l’institut reçoit quelque 600 dossiers de candidatures. La sélection – sept épreuves écrites et un entretien – est exigeante:

« Pas question de prendre un candidat excellent en maths mais faible en histoire-géo et en français, souligne Nathalie Dangoumau, directrice de communication de Centrale Lille, qui a auparavant dirigé l’Iteem. Car cela signifie qu’il baisse les bras devant des matières avec lesquelles il n’accroche pas. Or on cherche des profils très équilibrés. »

Actuel responsable de l’Iteem, où il enseigne l’informatique, Hervé Camus confie qu’il sort parfois vidé des cours. « Ce sont des étudiants très curieux, qui refusent le train-train, ont besoin de comprendre et posent beaucoup de questions. C’est passionnant car cela nous remet en question. »

« 62 % de nos diplômés de l’Iteem sont embauchés avant même d’avoir leur diplôme », explique Emmanuel Duflos, directeur de lEcole centrale de Lille

Directeur de l’Ecole centrale de Lille, Emmanuel Duflos souligne, lui, l’intérêt des entreprises pour ces diplômés multicartes, entreprenants et volontiers portés vers l’innovation. « La preuve en est que nos diplômés de l’Iteem ont une aussi bonne insertion que nos ingénieurs centraliens, explique-t-il : 62 % sont embauchés avant même d’avoir leur diplôme. » Plus généralement, il pointe une évolution dans les formations d’ingénieur qui réservent une place de plus en plus grande à l’entrepreneuriat et au management.

Centrale Lille propose deux autres voies pour s’y former. L’élève centralien peut prendre, en troisième année, la spécialisation « entrepreneuriat ». Ou bien, grâce à un accord avec l’Edhec, il peut, après deux ans à Centrale, rejoindre la grande école de management. Après deux ans encore, il décrochera le double diplôme Centrale-Edhec.

C’est le choix effectué par Vincent Degraeve, qui a suivi la voie classique : classe prépa scientifique, concours, Ecole centrale. A 21 ans, il est en deuxième année. Il a décidé de postuler pour entrer à l’Edhec après l’année de césure qu’il prendra l’an prochain. « Je ne savais pas au départ que ça m’intéresserait, explique-t-il, je l’ai découvert ici, avec le projet de groupe inscrit à notre programme, en première et deuxième années, à sept ou huit élèves. Ce que j’aime, c’est la gestion de projets et d’équipes. Cela s’est confirmé au travers de mon activité associative. » Depuis mars, Vincent préside le bureau des élèves, une équipe de 24 personnes qui anime la vie de l’école et dispose d’un budget de 100 000 euros.

Se fixer un défi personnel

Dans sa réforme du cursus de l’Ecole centrale, qui prendra effet l’an prochain, Emmanuel Duflos met l’accent sur le travail en groupe et l’autonomie, à l’instar des écoles de management. En deuxième année, chaque élève devra, par exemple, se fixer un défi personnel, un « challenge pour apprendre à se dépasser ». Il mènera aussi un projet de groupe, avec vingt à trente élèves. « L’idée est avant tout de donner du sens à la formation, car les jeunes générations sont en quête de sens », observe-t-il.

En bonne « iteemienne », Clara ne veut pas d’un chemin tout tracé. « Je me vois dans une petite entreprise qui partage mes valeurs et mes convictions, comme ces start-up qui luttent contre le gâchis alimentaire », imagine-t-elle. En attendant, l’an prochain, elle songe à faire une césure, « pour aller dans une école de cinéma… juste pour découvrir ».

Un dossier spécial et un Salon étudiant pour tout savoir sur les écoles d’ingénieurs

Retrouvez notre dossier spécial dédié aux écoles d’ingénieurs, publié progressivement sur notre site (rubrique Ecoles d’ingénieurs) et dans un supplément de 12 pages à paraître dans « Le Monde » daté du jeudi 24 novembre, avec des décryptages, des reportages dans les écoles ainsi que des témoignages.

Des informations à compléter lors du Salon des grandes écoles du Monde, samedi 26 et dimanche 27 novembre à Paris, grâce aux conférences animées par nos journalistes et en rencontrant des responsables et étudiants de nombreuses écoles d’ingénieurs représentées. Entrée gratuite, préinscription recommandée.