Fidel Castro et Ernesto « Che » Guevara ensemble lors d’un meeting dans les années 1960. | STR / AFP

Fidel Castro Ruz est né le 13 août 1926 dans la ferme paternelle de Biran, une commune rurale de la province d’Oriente. Originaire de Galice, son père Angel Castro avait découvert l’île comme soldat du corps expéditionnaire espagnol envoyé pour mâter les indépendantistes. Après la défaite de l’Espagne face aux Etats-Unis en 1898 qui transforme Cuba en un protectorat américain, Angel retourne quelques mois en Galice. La misère le pousse à repartir tenter sa chance à Cuba. D’abord manœuvre pour la toute puissante compagnie américaine United Fruit puis limonadier, ce colosse taciturne et travailleur acquiert bientôt une ferme à Biran.

Les années 1930 : l’enfance d’un chef

En quelques années, le domaine d’Angel s’étend sur des milliers d’hectares. Lina Ruz, la mère de Fidel, est la deuxième femme d’Angel. D’origine modeste, analphabète et bigote, elle travaillait comme domestique à la ferme jusqu’au décès de Maria Luisa Argota, la première épouse d’Angel. Fidel est le plus turbulent et coléreux des neuf enfants d’Angel, dont sept engendrés avec Lina.

Il n’a que six ans lorsque ses parents l’envoient à Santiago, la capitale de l’Oriente. Pensionnaire chez les maristes, il est renvoyé pour avoir mordu un répétiteur. Ses parents l’inscrivent au collège Dolorès, tenu par les jésuites. A dix ans, il écrit au président Franklin Roosevelt pour lui demander un billet de vingt dollars sous prétexte qu’il n’en a encore jamais vu.

Durant les grandes vacances, Fidel donne un coup de main à la ferme. Lorsqu’il ne conduit pas le tracteur, il nage dans le rio Biran, monte à cheval ou chasse avec le fusil offert par son père. En 1941, l’adolescent convainc ses parents de l’envoyer au collège Belén de La Havane, le meilleur établissement de l’île où se retrouvent les fils de la bourgeoisie cubaine.

Les années 1940 : une éducation jésuite

Rescapés de la guerre civile espagnole, les jésuites qui y enseignent sont franquistes, anticommunistes et antiaméricains. Ardent défenseur de la supériorité du monde hispanique, le père Alberto de Castro prédit au jeune Fidel un choc inévitable entre les Etats-Unis et l’Amérique latine. Stricte, l’éducation jésuite forge les caractères, encourageant l’effort, la discipline et l’esprit de sacrifice.

Alors que la guerre mondiale fait rage, Fidel Castro ne s’intéresse guère à l’actualité pas plus qu’au catéchisme. Il préfère le sport et veut être le meilleur dans toutes les disciplines. Grâce à son excellente mémoire, il sort de Belén dans les premiers. « C’est un élève excellent et un véritable athlète qui remplira le livre de sa vie de pages brillantes », note le père Francisco Barbeito, son professeur principal dans son dernier bulletin scolaire.

Lorsque Fidel Castro entre à la faculté de droit de l’université de La Havane en octobre 1945, il est politiquement analphabète. Territoire autonome où la police ne pénètre pas, l’université est le terrain d’affrontements de groupes armés dont l’activisme frôle parfois le banditisme. Castro se procure un revolver et se lance dans la bagarre. Il découvre aussi les classiques du marxisme par l’intermédiaire d’amis comme Alfredo Guevara. Au fil des manifestations étudiantes, il s’affirme comme un leader audacieux et un puissant orateur.

Les années 1950 : l’éveil à la politique

En 1947, il adhère au parti orthodoxe, une formation de centre gauche dont le chef, Eduardo Chibas, a acquis une grande popularité en dénonçant la corruption. Cette incursion dans la politique traditionnelle ne calme pas sa soif d’action. Il se porte volontaire pour une expédition armée contre le dictateur dominicain Rafael Trujillo. Sur pression de Washington, le gouvernement cubain fait avorter l’opération mais la notoriété de Fidel Castro grandit et il reçoit son premier entraînement militaire. En avril 1948, il est désigné membre de la délégation cubaine au « congrès des étudiants latino-américains anti-impérialistes » organisé à Bogota avec le discret soutien du président argentin Juan Peron pour protester contre la création de l’Organisation des Etats américains qui voit le jour dans la capitale colombienne.

L’assassinat de Jorge Gaitan, le leader charismatique de la gauche colombienne que Fidel Castro a rencontré deux jours avant sa mort, met Bogota à feu et à sang. Fidel s’empare d’un fusil et participe aux premiers affrontements de la guerre civile. De retour à La Havane, il épouse Mirta Diaz-Balart, la fille de riches propriétaires terriens. Le jeune couple s’envole en voyage de noces aux Etats-Unis. Pendant quelques mois, sa vie se calme. Mirta lui donne un fils, Fidelito, qui deviendra le patron du programme nucléaire cubain. Angel continue de payer les traites et Fidel obtient son doctorat en droit.

Mais le virus de la politique ne l’a pas abandonné et il compte bien gagner un siège de député sur les listes du parti orthodoxe aux élections de 1952. Le suicide spectaculaire de Chibas puis le coup d’Etat de Fulgencio Batista le 10 mars 1952 bouleversent ses plans. Pour Fidel, la révolution est désormais la seule solution.